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PÉCHÉ ORIGINEL. LA FIN DU XV » SIÈCLE


1898 ; Immaculée conception, col. 1073 sq. Sa doctrine de l’immaculée conception va être accueillie dans les écoles scotiste et nominaliste.

4. Les conséquences.

Le péché originel entraîne de graves conséquences, soit dans cette vie, soit dans l’autre. Pour Duns Scot et Occam, comme pour saint Thomas, les blessures de la nature déchue n’impliquent nullement une corruption de cette nature dans ses énergies constitutives, mais une soustraction de la perfection surnaturelle qui lui venait du fait de la justice originelle. Si in peccando imlneratur in naturalibus, lunr, si iterum peccaret, corrumperet substanliam voluniatis. Report., II, dist. XXIX, q. ii, n. 3. Occam dit de son côté : Per peccatum morlale, nihil corrumpitur nec tollitur in anima, quia non substantia, nec accidens, eertum est. In JV am Sent., q. viii et ix D.

De ce fait, la nature déchue, ainsi privée de la justice originelle et de la grâce qui l’accompagne, est totalement impuissante à récupérer par elle-même la vie surnaturelle ; mais elle garde intactes les forces libres de son intelligence et de sa volonté, ce qui la rend capable d’une certaine moralité naturelle. Elle peut accomplir des actions droites, observer suffisamment la loi naturelle morale, et même être capable d’un amour naturel de Dieu par-dessus toutes choses. Voir Duns Scot, col. 1898-1905, Xominalisme, col. 76977(5, et Justification, col. 2127-2129.

Bref, pour Scot et Occam, comme pour saint Thomas, la nature déchue ne diffère de la nature pure que par la privation d’une perfection surajoutée et par la souillure de la culpabilité.

Dans l’autre vie, il en est de même que dans la vie présente : la peine consécutive au péché originel est purement privative : les enfants morts sans baptême ne jouissent pas de la vision de Dieu ; mais, en revanche, ils ne connaîtront pas la peine des sens et ils goûteront une certaine béatitude naturelle dans l’exercice normal de leur intelligence. Op. Ox., II, dist. XXXIII. n. 2-4. Voir Duns Scot, col. 1939. Tel est le sentiment général dans l’École au xive siècle et dans les suivants

"). /{émission du péch ?. — Au baptême, l’enfant ne récupère pas la justice perdue qu’il devrait avoir : mais il « n’a plus cependant le péché originel. Sans doute, il ne possède pas la justice primitive, mais, grâce au baptême, il n’est plus obligé de l’avoir Sa dette est commuée en une dette équivalente, il n’est tenu que d’avoir la grâce sanctifiante. Op. Ox., II, dist. XXXII. n. 16, ad.."’". La grâce sanctifiante, en effet, lui communique et la capacité de mériter, et la remise de la peine éternelle, et les forces nécessaires pour vaincre la concupiscence et reconquérir l’har inonie de l’âme.

Les écoles scotiste et nominaliste vont développer, .i la suite de leurs maîtres, dans la considération du péché originel, un sage optimisme, à égale distance « lu pélagianisme et du pessimisme futur de Luther et de Balus. Jusque dans la nature déchue, à côté du Vide fail par la perle immense des biens salutaires, ils reconnaissent la réalité el la bonté propre qui reste à Cette nature dans ses éléments constitutifs. Ils peu vent, les uns et les autres, excéder dans la confiance qu’ils donnent à ces forces pour accomplir le bien : m. lis

il reste qu’Us veulent respecter et qu’ils respectent, <ie

♦ m il. les don n ces Ira il il ion ne Iles de la foi. Ils font écho, en.n dégageant les conséquences, au vieux principe dyonisien mis en valeur par saint Thomas ci reproduit par Scot et Occam : Sutiirnlia manent intégra m pu catore, justifia originalis non manet.

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leurs guides pour faire connaître la l biologie de presque toute l’École à la v cille de la Réforme est s ; ms

doute Gabriel Biel († 1495), le théologien de Tubingue en son Collectorium circa quatuor sententiarurn libros. Par sa fidélité aux décisions de l’Église, par son éclectisme aussi qui, tout en réservant une place de choix à Occam, reste cependant très attentif à la pensée des grands théologiens, saint Anselme, Alexandre de Haies, saint Thomas, saint Bonaventure, Duns Scot. Gerson, par son souci enfin de situer les solutions moyennes qu’il propose parmi l’ensemble des doctrines vraies qui les expliquent, s’en distinguent ou s’y opposent, Biel se trouve, dans son exposé, nous faire entendre non seulement ses propres pensées sur la question du péché originel, mais celle des principaux représentants des tendances variées de l’École, et enfin la doctrine reçue alors dans l’Église au xve siècle, telle que la connaîtra Luther en lisant, quelques vingt ans après, le Correclorium.

Altenstaig († 1523), en son Lexicon theologicum, éd. d’Anvers, 1576, donne, lui aussi, en s’inspirant surtout de Biel, un résumé de la doctrine alors courante ; on trouvera un exposé brillant de la doctrine thomiste à cette époque dans le grand commentaire de la Somme théologique de Cajétan (vers 1510), édition léonine de la Somme.

Définition du péché originel.

Biel la construit

en fonction de l’idée de nature pure, et du caractère surnaturel de la justice originelle.

L’homme, dans l’état de nature pure, aurait connu la rébellion de la chair contre l’esprit : par conséquent, la difficulté de la vie morale. Pour connaître la tranquillité et l’harmonie avec la facilité de la vertu, l’homme avait besoin d’un secours qui l’arrachât à l’empire des sens et l’entraînât vers les biens spirituels par une délectation supérieure. Ce secours était surnaturel : c’était la justice originelle. In I I" m Sent., dist. XXX, q. i, a. 3.

Avec l’École, Biel distingue entre grâce sanctifiante et justice originelle. La première seule est principe du mérite, la seconde facilite plus que la première l’union à la fin dernière. On conçoit une justice originelle. c’est-à-dire l’harmonie des facultés, sans la grâce, et la grâce sanctifiante existant dans l’âme sans la justice originelle. Les baptisés ont celle-là sans posséder celle-ci. Ibid., dist. XXX, q. i, a. 3, dub. il.

Ainsi la possession de la grâce sanctifiante n’est-elle pas le formel de la justice originelle : elle en est le couronnement.

De cette définition de la justice primitive découle [a notion du péché originel : Biel, avec l’École, la définit comme une privation de l’harmonie première là où elle devrait exister : carentia justiliir originalis cum debilo habendi. Entre la nature pure et la nature déchue, il n’a d’autre différence que l’obligation contractée en celle-ci de posséder l’harmonie origi Délie et l’impossibilité de la récupérer ; elle est, de ce fail. effet al de péché, et la mort, l’ignorance, la rébcl lion de la chair ne sont plus seulement des défauts naturels, mais des peines. Ibid., dist. XXX. q. i. a. 3, dub. iv.

Biel ne s’en tient pas la : il sait la variété des définitions mises en axant pour expliquer la nature du péché originel : il les rappelle, les classe et les discute. Il y a. d’abord, celle du Maître des Sentences qui décrit le péché de liai lire comme une qualilns murbida in mente. I)isl XXX, q. II, 8. 1. n. 1. Il a aussi celle de saint Anselme, qu’il attribue justement a Occam.

et a tort à Grégoire de Rimini, ibid., q, ii, a. i H. et

d’après laquelle le pèche originel Constitue la volonté

comme debitrix justifiai, i ne troisième, Intermédiaire,

établit enfin une concordance eiilie les deux premières. C’est celle d’Alexandre, de Bonaventure, du

bienheureux Thomas ; elle distingue un double ele

ment, l’un matériel, la concupiscence, l’autre Forma]