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    1. PÉCHÉ ORIGINEL##


PÉCHÉ ORIGINEL. L’ORIENT AU Vie SIÈCLE

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d) La transgression du premier père n’a pas nui seulement à lui personnellement, niais à tous ses descendants ; elle amena dans leur nature la mortalité, fruit de la condamnation et de la malédiction divines. « Le Christ a été exaucé lorsqu’il a prié pour que nous fussions par lui sauvés et délivrés de la malédiction de mort portée contre Adam, qu’il a détruite par sa propre mort. » Hom., lix, P. 0., t. viii, p. 212.

Dans Vhom. i.xviii, il développe le contraste entre Adam en possession des biens excellents et supérieurs de la création : « corps léger, très obéissant, porté aux choses d’en haut, avide d’aliments immatériels, volonté nullement inclinée vers les choses d’en bas, grâce de l’immortalité ; et l’homme déchu, lourd dans son corps, appesanti dans son âme, condamné aux peines et à la corruption de la mort. » Ibid., p. 373378. Ce que le sage a dit : « Le corps corruptible alourdit l’âme et cette demeure terrestre entraîne l’esprit aux pensées multiples » (Sap., ix, 15), n’a eu lieu qu’après la transgression du commandement, à l’occasion de laquelle l’homme a été condamné à la chute du paradis, aux ennuis, aux misères, aux peines et à la corruption de la mort… Mais, avant d’avoir désobéi au commandement de Dieu, qui éprouvait sa liberté, il était honoré de la grâce de i immortalité ; car celui qui a dit : « le corps corruptiblealourditl’âme », a ditun peu auparavant : « ce n’est pas Dieu qui a fait la mort, et il ne se réjouit pas de la perte des vivants » (Sap., i, 3). De même, en effet, que depuis qu’Adam, après avoir violé le commandement, a été revêtu de tuniques de peau, c’est-à-dire « de mortalité, qui est la suite de la condamnation à la mort…, de même, lorsque avant la transgression du commandement, le corps, à cause de sa légèreté et de son manque de pesanteur, était élevé et porté en haut en même temps que l’âme, il était également nourri en même temps que celle-ci par des aliments appropriés… L’homme désirait avidement les aliments du paradis, qui étaient avant tout immatériels. » Ibid.

Sévère est ici l’écho de la tradition grecque qui avait tendance à assimiler le corps d’Adam innocent à la condition des corps ressuscites. Comme Athanase, il affirme nettement le caractère privilégié, gratuit de cet état.

b) C’est pour nous racheter de cet état « de corruption », de « péché », de « paralysie », de « langueur », « d’esclavage », d’ « inimitié » et d’ « abandon de Dieu » que le Verbe s’est incarné. « Celui qui a créé et formé est venu restaurer non une autre créature, mais celle qui était tombée et avait subi la corruption du péché, quand il s’est jeté lui-même comme ferment dans toute la masse du genre humain, qu’il est devenu le second Adam et nous a fait passer de l’état mortel et terrestre à la vie incorruptible et céleste. » Hom., lxiii, t. viii, p. 298. « Quelle était la tyrannie qui s’exerçait contre nous et contre notre péché, et quelle était la multitude des maladies qui en sont sorties, j’en suis saisi d’étonnement et de stupeur, puisqu’il était besoin d’une telle guérison, celle d un Dieu, de telle sorte que c’est après la richesse de la guérison qu’a été connue la grandeur de la maladie, inconnue auparavant. » ifojn., lxvi, ibid., p. 331.

Dans Vhom. lxxiv, Sévère compare l’humanité déchue au boiteux guéri au Temple par les apôtres. « Autrefois elle boitait sous le rapport de la connaissance de Dieu, et depuis le sein de sa mère elle était paralysée par le péché à cause de la transgression d’Adam et d’Eve, et elle disait : « car voici que j’ai été « conçue dans l’iniquité et le péché, et ma mère m’a « conçue dans les péchés. » Elle n’aurait pu faire une action qui fût droite, si, par leur doctrine, les apôtres n’avaient pas fortifié et réparé sa force droite et natu- |

relie, en lui donnant la main. T.xii, p. 102-105. Il

ne faut point se hâter de voir dans le commentaire du ps. L, 7, l’idée augustinienne de la transmission du péché originel par la concupiscence. Plus tard, au cours de la controverse julianiste, Sévère s’expliquera sur ce texte : « Il sait que certains l’interprètent de la concupiscence qui préside à la génération ; personnellement, il préfère y voir une figure de style. Une fois tombé dans le meurtre et l’adultère, David incrimine l’ensemble de sa vie, comme si celle-ci s’était passée tout entière dans le péché ; la mère qui l’engendre èv &[tccpxloæ, c’est Eve engendrant après le péché et dans l’état d’affaiblissement auquel l’a réduite le péché. Le psalmiste mentionne cette circonstance pour inviter Dieu à le prendre d’autant plus en pitié. » R. Draguct, p. 131.

c) Selon la tradition commune, il enseigne que la tare originelle est propagée par la génération charnelle ; il n’y a pas de trace de péché en Jésus-Christ parce qu’il est né d’une vierge. « Estimez-vous que notre chair contracte quelque impureté ou quelque souillure en Dieu le Verbe, sans comprendre qu’il n’y a qu’une seule chose capable de nous rendre impurs, à savoir la corruption du péché ? Et où y a-t-il trace de péché, là où le Verbe de Dieu s’est incarné sans changement, où la mère est vierge…, où la semence virile est absente, et où la concupiscence est absolument exclue et absente ? Hom., lxiii, t. viii, p. 298-299. Cf. Hom., lxvii, p. 357-359.

Il semble bien que, d’après ces paroles, l’humanité, du fait de la génération charnelle, est soumise, d’une certaine façon, à cette corruption qui vient du péché et qui épargne le fils de la Vierge.

2. Durant la controverse julianiste. — Si Sévère, comme Julien, a toujours enseigné, avec la tradition, que la nature humaine est, par la faute d’Adam, placée sous le régime de la corruption du fait de la génération charnelle, il s’est écarté de lui dans la façon dont il s’est représenté l’action de cette corruption dans la nature, la relation de celle-ci avec le péché d’Adam, et avec la concupiscence qui la transmet.

a) En opposition avec Julien qui voit dans l’incorruptibilité et l’impassibilité des accompagnements nécessaires de la nature saine et normale de l’homme, Sévère distingue très nettement, du point de vue philosophique, entre la nature dans ses éléments constitutifs essentiels, et la grâce par laquelle Dieu avait primitivement perfectionné cette nature.

L’état primitif était un état où la grâce venait perfectionner la nature. Le péché originel a dépouillé l’homme, non de la nature, mais de la grâce : Rem confirmât Cyrillus quod namque non natura sed gralia spoliavit se homo ob suam declinalionem. (Critique du tome (de Julien), trad. de Mai, Spicil. rom., t. x a, p. 175.) Sur la nature de cette grâce, voir ibid., p. 174 : Gratia immortalilalis ipsa fuit et partici patio quædam Dei atque illustratio…

Le péché a fait perdre à la nature humaine la grâce de l’immortalité : une fois cette grâce enlevée, « la nature reste entière et identique à ce qu’elle était… le simple jeu des éléments constitutifs de la nature laissée à elle-même suffit à produire les souffrances et la mort xocxà çûaiv ». R. Draguet, op. cit., p. 135. Sévère l’affirme dans la Critique du tome, Spic. rom., p. 179.

b) Il distingue aussi nettement entre corruption physique et corruption morale ; la première est conforme à la nature, la seconde seule ne l’est pas. La corruption physique a sa cause dans la faute originelle qui a détruit la grâce et ramené l’homme à sa nature : « L’homme n’aurait pas subi la dissolution en laquelle consistent la mort et la corruption si, auparavant, il n’avait pas admis en lui la corruption de l’âme qui,