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PÉCHÉ ORIGINEL. LE PÉLAGIANISME ET L’ORIENT


dans la formulation, la justification et l’interprétation de celle-ci.

1. Sous son influence, les conciles et les papes, dès 418, avaient défini l’existence du péché originel en face de l’erreur pélagienne.

2. Dans ses écrits sont rassemblées, pour la première fois, une série de preuves qui sont encore utilisées aujourd’hui pour la défense de la doctrine traditionnelle.

3. Dans sa controverse avec les pélagiens, il développe, au service de la vérité catholique, un système cohérent déjà arrêté dans sa pensée dès 397, pour expliquer le péché d’origine.

Selon cette théologie, le péché originel en Adam consiste en un péché d’orgueil ; envisagé dans ses descendants, il est l’état de culpabilité dérivé dans la nature déchue du fait de la participation de celle-ci à la volonté prévaricatrice d’Adam.

Cette solidarité du genre humain avec la culpabilité d’Adam s’explique par l’unité de nature ; nous sommes solidairement responsables de la faute originelle en ce sens que, virtuellement et matériellement présents en la personne d’Adam, au moment de sa prévarication, nous l’avons commise avec lui. Toute la nature alors ramassée en lui a été pécheresse.

La transmission du péché originel, son extension successive à de nouveaux membres de la famille humaine, se fait par la contagion de la concupiscence charnelle qui accompagne l’acte de la génération.

La concupiscence et l’ignorance comme telles, dans leur réalité physique, n’ont point nécessairement le caractère d’un péché. Dans les non baptisés, elles sont le péché originel dans la mesure, autant et aussi longtemps qu’elles sont en eux un désordre volontaire, issu du libre arbitre d’Adam. Elles sont alors non seulement effets du péché originel et cause des péchés actuels, mais la culpabilité même du péché d’origine se prolongeant dans ses effets. Dans les baptisés, toute culpabilité disparaissant, elles ne sont plus péché que parce qu’elles sont filles et cause du péché.

4. Le péché originel entraîne une transformation en mal dans toute la race : il implique, pour la vie présente, outre l’ignorance, la concupiscence et l’affaiblissement du libre arbitre, la nécessité de souffrir et de mourir, la damnation éternelle en compagnie des mauvais anges pour l’autre vie.

5. Par la miséricorde divine qui s’affirme dans l’économie rédemptrice et particulièrement dans le baptême, la culpabilité en quoi consistait le péché originel est complètement effacée, mais le désordre, la misère de la nature consécutive au péché originel, lulte intérieure, ténèbres, souffrances, etc., demeurent, dans une certaine mesure, comme une épreuve salutaire. Le libre arbitre, fortifié et exalté par la grâce, est en état de mériter la vie éternelle. Ainsi la libellas d’Adam, qui consistait à pouvoir ne pas pécher, perdue par la faute, est surabondamment récupérée par la grâce du Christ. Pour les élus, elle s’épanouit dans la béatitude où la volonté ne pourra plus pécher : Prima ergo libertas voluntatis erat posse non peccare ; nouissima ergo mullo major, non posse peccare. De corrept. et gratia, xii, 33, t. xi.iv, col.’Xi.

8. Il serait faux de prétendre que cette synthèse ugustinienne s’identifie, dans tous ses éléments, avec la doctrine de l’Église sur le péché d’origine. Quand Augustin meurt, li d<’. < loppement du dogme et de la théologie du péché originel est loin d’être achevé. L’Eglise, par ses conciles et dans sa liturgie, conti nuera en fait à utiliser les formules d’Augustin pour exprimer sa foi ; mais elle ne canonisera pas en bloc toute ta doctrine e( en laissera certains éléments a la discussion de ses docteurs. Dans quelle large mesure la pensée et le langage du représentant de la doctrine

catholique contre l’hérésie pélagienne ont-ils contribué aux précisions doctrinales postérieures de l’Église sur le dogme du péché originel, dans quelle mesure aussi sa théologie personnelle a-t-elle excité, orienté, alimenté les spéculations postérieures, l’étude de la tradition ecclésiastique jusqu’à nos jours le dira.

7. Telle qu’elle est proposée par le docteur d’Hippone, avec les spéculations qui l’accompagnent, la doctrine du péché originel offre certes quelque chose de rigide, et de pessimiste au premier abord : elle fait contraste avec les vues de certains Pères (Irénée, Jean Chrysostome) qui, même dans les ruines de l’humanité déchue, se plaisaient surtout à montrer les pierres d’attente qui s’offrent aux reconstructions de la grâce. Par son expérience personnelle, Augustin fut amené de préférence à prendre une conscience très vive, dans la lumière de saint Paul, de l’incapacité absolue de la nature déchue à se relever ; il se plut avant tout à décrire la faiblesse, qu’il avait éprouvée douloureusement en lui, avec une acuité de touche qu’on n’avait plus rencontrée depuis saint Paul. A la suite du grand apôtre, il dénonça la cause de cette corruption : le péché originel ; mais il en proclama le remède : la grâce de Jésus-Christ : « En défendant cette doctrine contre Pelage avec son âme tout entière, il contribua sans nul doute à lui donner un relief qu’elle n’avait pas auparavant, à la faire passer au rang de ces vérités centrales qui illuminent la pensée et la vie. ».1. Rivière, art. cité, col. 412. Au fait, chez saint Augustin la doctrine du péché originel, remise dans l’ensemble de sa pensée et de sa vie, n’est point source de découragement, mais se résout, en définitive, en un appel confiant et optimiste au Dieu qui sauve : consciente de sa corruption, l’âme déchue s’humilie dans la prière pour solliciter le secours divin dont Pelage méconnaît la nécessité ; mais, en possession de ce secours, elle se relève pour accomplir les actions méritoires de la vie éternelle.

Quoi qu’il en soit, d’ailleurs, des vues personnelles qui donnent à sa synthèse doctrinale un aspect rigide, pessimiste, et qui seront d’ailleurs abandonnées ou discutées dans la suite, il faut reconnaître que, sous ces apparences austères, c’était bien, au fond, la révélation de l’Écriture et la croyance traditionnelle de l’Église à l’incapacité de l’homme déchu et à la nécessité de l’initiative souveraine de Dieu dans l’œuvre du salut, qui arrivaient à leur pleine clarté dans le témoignage d’Augustin.

8. Par rapport à l’avenir, la doctrine d’Augustin est d’un dynamisme puissant. Sa complexité, la variété des éléments qu’elle synthétise, offrent aux esprits qui la scruteront la possibilité des développements les plus divers ; suivant qu’ils méconnaîtront cette complexité, exagéreront la valeur de tel ou tel élément de cette synthèse, en les isolant, ils s’exposeront à la déformer et à tomber dans l’erreur sur la notion du péché d’origine et de la grâce.

Parce qu’Augustin a déjà soulevé autour du péché originel la plupart des questions que se poseront les théologiens dans la suite, parce qu’il en a proposé des solutions, on verra à chaque époque de controverse ou de crise revivre sa doctrine.

II. La CONTROVERSE EN Orient (412-431). — La controverse pélagienne ne provoqua en Orient ni la même attention, ni des réactions aussi vives qu’en Occident. Cependant, ni à Jérusalem, ni à Antloche, ni a Alexandrie, la doctrine ecclésiastique de la chute ne fui laissée sans témoignage ; le concile d’I -".plièse. en

431, devait lui même confirmer les condamnations précédentes de Célestlus.

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