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PÉCHÉ ORIGINEL. DOCTRINE DE S. AUGUSTIN


des péchés d’imitation, comment pourrait-on dire qu’elle est portée pour un seul délit, tandis que nombreux sont les péchés personnels ? » De pecc. merit., I, xii, 15, t. xliv, col. 117 sq.

Ensuite, un dernier argument tiré du contraste d’Adam et du Christ : il résume tous les autres : « Si l’Apôtre a maintenu l’antagonisme entre Adam et le Christ, de préférence à toute autre, c’est pour une raison nécessairement différente de l’imitation de leur conduite. Cette raison, il faut la chercher uniquement dans le fait que tous deux sont principes de générations bien distinctes, celle des enfants de Dieu par la grâce qui régénère l’esprit, et celle des hommes pécheurs au moyen de la génération naturelle. Pour cela également, saint Paul se sert de la même expression pour les deux cas en écrivant : « De même que par la faute d’un seul la condamnation atteint tous les hommes, de même par la justice d’un seul, la justification qui donne la vie s’étend à tous les hommes. » Non pas certes en ce sens que tous ceux qui sont engendrés en Adam sont régénérés dans le Christ, mais parce que, de même qu’il n’existe aucun homme qui ne descende d’Adam, ainsi il n’est aucun juste qui ne soit régénéré dans le Christ. De pecc. merit., i, xiv, 18, t. xliv, col. 119, cité dans Merlin, Saint Augustin, le dogme du péché, originel et la grâce, Paris, 1931, p. 32.

Même idée, Op. imperL, II, 146, t. xlv, col. 1202 : Videtisne qiue mala vos consequantur, quando Adam et Christum Apostolo proponente, dos imitationem imitationi, non regenerationem generationi vultis opponere ? L’adversaire de Pelage ne peut qu’admirer la précision, l’exactitude, la clarté de ce passage de l’Apôtre : Per uniun homincm, per unius deliclum, per inobedientiam unius hominis. De nupt. et concup., II, xxviu. IIS. t. xliv, col. 46 1.

Au fait, l’exégèse d’Augustin en met en lumière l’idée cohérente. Aussi cette exégèse a-t-elle inspiré les Pères et les conciles qui, à sa suite, ont vu. dans le t. 12 de l’épître aux Komains, la preuve scripturaire la plus forte en faveur de l’existence du péché originel. A se débarrasser avec l’exégèse moderne de l’inexactitude grammaticale qu’elle contenait, l’explication augustinienne n’a fait que rajeunir sa valeur dogmatique et historique.

b) Augustin utilise aussi le texte Nisi quis renatus fuerit… non potest introire in regnum cœlorum, Joa., m.."). qu’il rapproche de cet autre : Qui manducai meam carnem habet vitam seternam, Joa.. vi, 55, pour rejeter la distinction imaginée par les pélagiens entre le royaume des cieux et la vie éternelle.

Il argumente ainsi dans le De pecc. mer., I. xx, 26, t. xliv, col. 12 !  : l.es pélagiens attribuent aux enfants non baptisés la vie éternelle a cause de leur Innocence et ils les excluent (lu royaume des cieux

qu’ils n’ont pas reçu le baptême. Écoutons le Seigneur disant, non en parlant du baptême, mais eu parlant du sacrement de sa sainte i able, que reçoivent ment ceux qui sont baptisés : Si vous ne mangez ma chair, vous n’aurez pas la vie en vous. Que veut-on de plus i De fait, si l’eucharistie est nécessaire pour la vie éternelle, le baptême l’est a plus finie raison et, conséquent, la distinction entre le royaume des et la vie éternelle est vaine. Et si les enfants non baptisés sont exclus de la ic, c’est qu’ils ne sont pas Innocents. Puisque tant de témoignages divins s’ac Cordent a en ici ; ner qu’il n’y a ni salut, ni ie (’-le in et lien dehors du haptême ainsi que du corps ri du sai Seigneur, c’est en vain qu’on promet cette vie éternelle aux petits enfants. Or. le péché seul peut’l’homme du salut t de la ie éternelle. Il suit donc de la que ci iacrements enlèvent aux petits enfants ouillure de péché, une souillure dont il est écrit que personne n’est pur. pas même celui qui n’a qu’un

jour. » De pecc. mer., i, xxiv, 34, t. xliv, col. 128. D’ailleurs, même dans l’hypothèse pélagienne, les enfants sont exclus du royaume des cieux, donc soumis à une peine. Si toute peine suppose une faute, ils sont donc coupables. Ibid., i, xxx, 58, col. 142.

2. La tradition.

A la preuve scripturaire. Augustin ajoute le témoignage des Pères qui l’avaient précédé. Il le fait au gré de ses lectures et suivant les nécessités de la défense.

Dès 412, il en appelait au témoignage de saint Cyprien et de saint Jérôme. De pecc. mer., III, v-vn, 10, 12, 13, t. xliv, col. 190-193. En 418, dans le De pecc. orig., xli, 47, col. 409, il citait saint Ambroise. Il dut approfondir son enquête pour répondre à Julien. Celui-ci prétendait avoir pour lui les Pères, (’.ont. Jul., I, vii, 29, t. xliv, col. 661 ; il en appelait particulièrement à ceux d’Orient, I, iv, 14, col. 649, surtout à saint Jean Chrysostome, I, vi, 21, col. 654. C’est alors qu’Augustin, dans le Contra Julianum, t. I, t. xliv, col. 644-660, évoqua devant son adversaire le cortège des témoins de la tradition catholique : les Latins d’abord : Irénée, Cyprien. Réticius d’Autun, Olympius, évêque espagnol, Hilaire de Poitiers, Ambroise, « son Père dans le Christ » ; puis les Grecs : Grégoire de Nysse, Basile, les quatorze évêques de Palestine qui, sans doute, avaient absous Pelage, mais seulement après lui avoir demandé une profession de foi ; il en appela enfin au témoignage du grand évêque de Constantinople. Tous ces textes opposés à Julien forment, dans leur ensemble, une belle preuve de la continuité, dans l’Église des premiers siècles, de la foi à l’existence du péché originel. Il y a des nuances entre ces témoignages : ils sont plus ou moins explicites. Tous proclament la chute, admettent un rejaillissement de la faute d’Adam sur le genre humain et tiennent pour héréditaires les peines du péché d’Adam. Mais admettre l’hérédité de la peine n’était-ce point se mettre dans la nécessité logique d’admettre l’hérédité de la faute ? Mieux que personne, Augustin a vu cette nécessité de conclure de la peine commune à la faille commune ; tous ses prédécesseurs sont loin de l’avoir vue avec une égale clarté. Nous avons établi qu’un certain nombre avaient eu conscience explicitement d’un état de péché héréditaire. Si d’autres n’ont pas dépassé une vue plus extérieure de la déchéance humaine, on ne saurait nier que celle vue contenait implicitement la notion du péché d’origine. Saint Augustin n’avait donc pas tort de se référer à la tradition ancienne de l’Église pour affirmer l’existence du péché originel.

. ;. Lu liturgie du baptême. - l.es exorcismes employés au baptême pour soustraire l’enfant au pouvoir du démon fournissaient de l’existence du péché originel une nouvelle preuve. La soumission de ces enfants à cet empire ne s’expliquait qu’en punition du

péché originel : Qu’esl ce qui les tient enchaînés au ponvoir du diable Le péché ; or, ces petits enfants

n’ont commis aucun péché personnel. Reste donc le péché originel qui les tient captifs sous la puissance du démon, tant qu’ils ne sont pas rachetés par le bain de la régénération ci par le sang du christ. De nupt., i,

xx. 22, t. XLIV, col. 126. l.es pélagiens ne savaient que répondre : saint Augustin le leur rappelle. Cont. -lui.,

VI, v. il. t. xi. iv. col. 829.

i L’expérience, c’est à dire l’< : i<d actuel, physique et

imtrid. de l’homme, enfant <m adulte, Tandis que

saint ipustin établissait les preuves précédentes sur les données de la foi. il lire la dernière des faits de l’expérience BCtUelle : Souffrance des enfants, misère

du genre humain. loi » nce de la concupiscence,

Il y a d’abord 1rs souffrances des enfants : elles

dénotent chez eux un étal malheureux qui ne pi ut être que pénal, par conséquent coupable t n juste