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PÉCHÉ ORIGINEL. LES LATINS DU IV* SIÈCLE


ascendit in regnum cœlorum nisi per sacramentum baptismi. De Abraham, ii, 79, t. xiv, col. 494 C. La porte du ciel, fermée par Adam, n’est ouverte que par le baptême. Il le dit plus explicitement encore en commentant le texte : Nisi guis renatus fuerit : …Uliguc millum excipit, non in/antem, non aliqua præventum necessitate. Habeant tamen illam opertam pœnarum immunilatem, nescio an habeant regni honorem. Ibid., 84, col. 497 A. Ambroise revendique ici, dans la première phrase, la nécessité absolue du baptême poulie salut des entants ; dans la seconde, il leur reconnaît d’abord, s’ils meurent sans baptême, l’immunité mystérieuse des peines qui menacent le pécheur ; puis il ajouterait : « Je ne sais s’ils auront l’honneur du royaume. » Ceci ne cadre guère avec ce qu’Ambroise a dit plus haut ; aussi les bénédictins ont-ils supposé là une interpolation. S’il était permis de proposer, à titre simplement hypothétique, une correction dans l’esprit de l’évêque de Milan, on pourrait lire, semblet-il : « Qu’ils aient cependant l’immunité mystérieuse des peines, s’ils n’ont point (nisi) l’honneur du royaume. »

Dans cette perspective, c’est bien le baptême qui ouvre la porte du ciel ; le lavement des pieds apporte seulement la diminution ou la purification de l’entraînement au péché. Encore, cette manière de concevoir l’efficacité du lavement des pieds, commune à Ambroise et à l’auteur du De sacramentis, est-elle présentée, par ce dernier auteur, comme particulière à son Église et inconnue à Rome, où l’on n’ajoute rien au baptême. De sacramentis, ibid., col. 433.

3. Rôle de la génération.

La génération induit dans l’humanité une contagion, une tache héréditaire.

Ambroise en trouve l’affirmation dans la parole du ps. l, 7 : Ecce in iniquitatibus conceptus sum, et in delictis peperit me mater mea. Il la commente abondamment. « Seul le Christ, continue-t-il, fut à l’abri, par sa conception et sa naissance virginales, de la souillure d’une origine mortelle. Il était juste, en effet, que celui qui ne devait point connaître dans son corps le péché d’entraînement, peccatum prolapsionis, ne fût affecté d’aucune contagion naturelle de la génération. C’est donc à bon droit que David déplorait lui-même ces souillures de la nature qui font que la tache en l’homme précède la vie. » Apol. de David, xi, t. xiv, col. 873-874. Dans ce texte, qui, par endroit, annonce la doctrine de saint Augustin, l’auteur marque comment se transmet par la génération une contagion héréditaire, sans se soucier ici de remonter à la source de cette contagion, à Adam lui-même.

En résumé, saint Ambroise enseigne certainement une solidarité de tous en Adam. Cette solidarité existe non seulement dans la peine, mais d’une certaine façon aussi dans la faute. Il ne faudrait cependant pas identifier, ni en eux-mêmes, ni dans leurs conséquences, les péchés héréditaires et les péchés personnels. Ceux-ci sont remis par le baptême, sinon ils entraînent une punition positive dans l’autre vie. Ceux-là impliquent une souillure, une contagion, un entraînement au péché, une participation mystérieuse au péché d’Adam ; ils impliquent certainement l’exclusion du ciel, mais non point un châtiment positif. Le remède spécifique en serait le lavement des pieds pour Ambroise et l’auteur du De sacramentis ; il enlèverait ainsi le lubricum delinquendi. De toute façon, le baptême est requis pour entrer dans le royaume des cieux.

2° L’Ambrosiaster (voir l’art. Isaac, t. viii, col. 1). — Cet auteur — dont on ignore encore la personnalité véritable — vivait et écrivait à Rome au temps du pape Damase. Il a dû rédiger son commentaire sur les épîtres de saint Paul et les Qwesliones Veteris et Novi Testamenti entre 374-378. Le commentaire

mérite une particulière attention au point de vue du péché originel ; par l’exégèse qu’il donne du texte de la vieille version latine pour Rom., v, 12 : In quo omnes peccauerunt, il anticipe, au moins sur un point important, le langage et la doctrine de l’évêque d’Hippone. Saint Augustin lui-même en fait foi ; il cite ce passage de notre auteur, sous le nom de saint Hilaire, et le propose comme le modèle de la véritable exégèse qu’il faut donner au texte de l’Apôtre. Cont. duas epist. Pelag., iv, 4-7, P. L., t. xliv, col. 614.

Dans la suite de son exégèse de l’épître aux Romains, l’Ambrosiaster s’éloigne encore beaucoup cependant de ce que sera l’exégèse organique, proposée par Augustin, de l’ensemble Rom., v, 12-19 ; il se rapproche davantage de la manière d’Origène et des autres Pères grecs.

1. L’idée du péché originel d’après le commentaire de l’épître aux Romains. — a) Le texte biblique qu’utilise notre auteur a toutes chances d’être la version communément employée à Rome entre 370 et 380 (celle que saint Jérôme appelle la vulgatio editio).

Pour ce qui concerne le péché originel, cette version traduit le è<p’w par in quo au t. 12, et ne connaît point de négation au ꝟ. 14 ; l’Ambrosiaster lit ainsi ce f. : sed regnavil mors ab Adam usque ad Moysen et in omnes qui peccaverunt in simililudinem prævaricationis Adæ. Il sait sans doute que le grec porte : qui non peccaverunt ; mais il ne cache pas une grande défiance pour les manuscrits grecs qui ont, dit-il, des leçons variées, et il garde sa sympathie pour la leçon de Tertullien, de Victorin et de Cyprien. In Rom., v, 14, P. L. (éd. 1845), t. xvii, col. 96. On peut se demander si l’auteur de la vieille version latine rapportait déjà Vin quo à Adam, comme le fait l’Ambrosiaster ; il y a lieu d’en douter. Voir, à ce sujet, les remarques faites par F. Prat, op. cit., t. i, 7e éd., p. 256, n. B.

b) Le commentaire doctrinal que l’Ambrosiaster donne au texte biblique envisage plutôt le péché originel dans ses tristes conséquences pour la race que dans l’acte même d’Adam. Il laisse cependant entendre ce qu’il fut en notre premier père et quelle déchéance il amena en la propre personne de celui-ci.

a. Le péché d’Adam. — Il ressemble à un péché d’idolâtrie, puisqu’il consista, pour le premier homme, à croire qu’il pourrait devenir Dieu. In Rom., v, 14, col. 94 C.

C’est l’âme surtout qui a péché ; mais l’âme a corrompu ainsi le corps. Cette corruption du corps entraîne la mort corporelle : Hic enim beneficium Dei perdidit, dum prævaricavit, indignus factus edere de arbore vitee, ut moreretur. vii, 18, col. 113 A. Mors autem dissolutio corporis est, cum anima a corpore separatur. v, 12 col. 92 CD.

En mettant, par sa crédulité à l’égard du démon, celui-ci à la place même de Dieu et en se faisant l’esclave de la mort, Adam s’est soumis à l’empire de celui qui est le péché ; il a fait du démon le compagnon de son âme : Nom ante prsevaricationem hominis, priusquam se manciparet morti, non erat his (aux esprits mauvais) potestas ad interiora hominis accedere et cogitationes adversas inserere… Postquam autem circumvenit eum et subjugavit, potestatem in cum accepit, ut interiorem hominem puisard, copulans se menti ejus. vii, 14, col. 112 B. Comment le démon, qui est le péché, habite-t-il comme chez lui aux portes de l’âme, dans la chair ? Ce n’est pas que la chair soit devenue* mauvaise par elle-même ; mais, par suite de la faute du premier homme, la corruption du péché, c’est-à-dire, sans doute, les germes de dissolution, demeure dans son corps comme le signe de l’empire du démon sur lui ; en venant ainsi vers la chair en qui habite le péché, le diable s’y trouve comme chez lui ;