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    1. PÉCHÉ ORIGINEL##


PÉCHÉ ORIGINEL. LES ANTIOCHIENS

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auprès des esprits invisibles, comme auprès des êtres privés tle raison.

b. — Placé dans le milieu favorable du paradis, il y puisait tout en abondance. Tout en étant constitué pour une vie mortelle, In Gen., iii, 21, col. 641, il avait la promesse d’une vie immortelle, conditionnée par le précepte. Pour cette raison, Théodore ne craint pas de désigner cet état précaire par le terme d’immortel : « Si le premier homme était resté immortel, la vie présente n’existerait pas, mais il est devenu mortel par le péché. » In GuluL, I, 3-5, col. 899, et H.-B. Swete, Theodori in cp. II. l’aidi comment., t. i, p. 7.

A ce privilège d’immortalité conditionnelle s’ajoutait celui de l’innocence : < ils n’avaient point conscience de leur nudité et ils n’en rougissaient pas… Ainsi, les enfants n’ont pas honte de leur nudité non qu’ils ne la voient pas, mais parce qu’elle n’éveille en eux aucun mauvais sentiment. Ainsi Adam et sa compagne, apparus depuis peu, sans péché, sans soupçon du mal, ne voyaient rien de honteux ni dans leur nudité, ni dans aucune partie de leur corps. » In Gen., iii, 7, col. 639.

Et donc, au moins dans ses écrits exégétiques, l’évêque de Mopsueste est, comme Jean Chrysostome et la tradition générale, un témoin de l’immortalité conditionnelle du premier couple et de son innocence naïve. Mais il l’est à sa façon.

c. — Dieu, d’après lui, sachant que la mortalité serait utile à l’homme, a posé le précepte, « et a fourni ainsi à Adam l’occasion de le transgresser librement ». //i Gen., ibid. Celui-ci, trop confiant dans les paroles du démon, enflammé et aveuglé par le désir du fruit défendu, désobéissant au précepte, a succombé à l’occasion que lui fournissait la loi posée par Dieu. In Rom., vii, 8, col. 810.

d. — Ainsi se réalise le plan divin : « Dieu a d’abord montré par le fait du précepte et par la désobéissance d’Adam que la mortalité était utile. Ensuite, il nous l’a donnée… Qu’il ait préparé l’homme pour la vie mortelle, nous en avons la preuve dans ce fait que, dès l’origine, le Créateur a établi les sexes en vue de la procréation des enfants. Les hommes étaient ainsi constitués pour une vie mortelle ; l’imposition du précepte les mit en face du choix libre et leur offrit l’occasion d’exercer leur volonté ; elle leur révéla l’utilité delà mortalité. » In Gen., iii, 17, col. 641.

e. — La faute du premier couple entraîne un changement profond dans son état spirituel et corporel, soit pour lui-même, soit pour ses descendants, dans les rapports aussi de la créature avec le reste de l’univers. Adam et Eve, après la chute, acquièrent le sens de la pudeur qui doit les détourner du péché, XoyiafAÔç tt)ç oàcr/ùvr)ç ùnb @eoô elç ttjv xarà tîjç âfiap-daç fJoï)6siav et arrêter les élans de la concupiscence. In Gen., iii, 7, col. 640. C’est alors qu’Adam, sous l’inspiration de Dieu, se fait de l’écorce des arbres un vêtement. Ibid., iii, 22, col. 641.

La faute originelle a été surtout source de mortalité et de péché pour le premier couple et pour ses descendants. « Quand Adam eut péché, il devint pour cela mortel : le péché fit son chemin parmi ses descendants, et la mort régna justement sur tous les hommes. » In Rom., v, 13, col. 797. « Le péché d’un seul amena la mort chez tous. » « Le péché d’Adam amena le châtiment sur ses descendants et soumit tous les hommes au joug commun de la mort. » « Ce péché infecta la race, è^é’Kay.^s xoùç éÇ^ç. » v, 16, ibid.

A conclure de ces textes que, pour Théodore, le péché d’Adam et d’Eve est source de péché et de mort au sens traditionnel du mot, on se méprendrait. Le mot « pécheur », appliqué à l’état de l’homme déchu, n’implique lias un état de péché, mais l’inclination très vive au péché : « Le péché d’Adam a fait tous les hommes

mortels, et, pour cela, enclins au péché ; voilà ce que signifie le mot à|jtapTWÀoî. » Ibid.

Le lien est très étroit entre la mortalité de l’homme déchu et son inclination au péché : « Le péché suit la condition des êtres mortels. » In Eph., iv, 22-24, dans Swete, t. i, ]). 173. La raison en est que « nous succombons au plaisir du boire et du manger, et à l’attrait du commerce avec les personnes de sexe différent… ce qui n’arriverait point à une nature immortelle. Puisque nous sommes devenus mortels et le sommes par nature, nous sommes troublés violemment par de tels. al traits et très souvent entraînés au péché. » In Rom., v, 21, col. 800. Théodore reconnaît donc, comme suite au péché d’Adam, une certaine hérédité de la mortalité et de l’inclination au péché.

Cela n’empêche pas que le dynamisme de la mortalité ne produise en chacun son triste effet par le seul intermédiaire des fautes personnelles. Il commente ainsi le f. Mors regnavit etiam in eos qui non prsevaricaverunt in similitudincm prævaricationis Adæ : « Les autres hommes ne sont pas exempts de la mort du fait que leurs péchés sont d’une autre espèce que celui d’Adam. La mort a dominé sur ceux qui ont péché de n’importe quelle façon. La mort a été établie comme la peine non pas de tel ou tel péché, mais de tout péché. Voilà pourquoi il faut que, quelle que soit la malice qui ait inspiré les hommes dans leur péché, la mort règne sur tous. » Ibid., v. 13, col. 796. Théodore parle ici des péchés personnels : il ne paraît pas voir que la mortalité, chez les enfants, ne s’explique bien, dans sa perspective, que s’ils meurent pour avoir participé d’une certaine manière à un péché, celui d’Adam.

Enfin, par le l’ait de la chute et de la mortalité, a été rompu le lien qui unissait le monde sensible au monde invisible. En voyant les hommes s’enfoncer de plus en plus dans la mortalité par leurs péchés, les anges les abandonnèrent. Dieu, cependant, par bienveillance pour nous, leur fit connaître son dessein de renouer un jour d’une façon infrangible le lien d’amour qui relie toutes les parties de la création. Aussi se mirent-ils à nous secourir, en encourageant en nous l’espérance de l’immortalité par leurs révélations.

Ce ne sera qu’au jour de notre résurrection définitive que toute la création retrouvera l’harmonie et la liberté. En attendant, elle gémit et communie à nos malheurs. In Rom., viii, 19, col. 825-827.

2. La doctrine de Théodore d’après son ouvrage sur le péché originel. — Cet ouvrage ne nous est connu, malheureusement, que d’une manière fragmentaire par les propositions 57. 58, 59, 60 du Conslilulum de Vigile sur les Trois-Chapitres, par les extraits de la Collectif Palatina (Marius Mercator) et par ceux que Photius fournit, Bibl., clxxvii, P. G., t. ciii, col. 513. Ils sont rassemblés dans P. G., t. lxvi, col. 1005 sq., et dans H.-B. Swete, éd. cit., t. ii, p. 322. Prendre le texte de la Palatina dans E. Schwartz, Acta concil. œcum., t. i, vol. v, pars prior, p. 173-176.

Le titre même de l’ouvrage de Théodore, LTpôç toùç XsyovTaç çtiæt xal où Yvwu.75 TTTaîeiv toÙç àvGptâttouç, indique bien sa tendance : réfuter ceux qui disent que les hommes pèchent par nature et non par volonté. Qui l’évèquc de.Mopsueste veut-il atteindre ? Saint Jérôme, saint Augustin’? Le collecteur de la Palatina pensait que Théodore visait Augustin : mais c’est certainement une erreur, car les renseignements fournis par Photius montrent, sans doute possible, quec’était saint Jérôme (le Jérôme des Dialogues contre les pclagiens) qui était visé. La composition de l’ouvrage doit se placer peu après le concile de Diospolis, décembre 415.

Notre auteur le prend de très haut avec celui qu’il appelle, avec une ironie un peu lourde, » l’admirable défenseur du péché originel ». P. G., t. i.xvi, .