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PÉCHÉ ORIGINEL. LES ANTIOCHIENS


entre nature et grâce, entre la nature humaine, telle que Dieu l’a faite à l’origine, et la nature humaine telle qu’il aurait pu la faire ; avec l’évêque de Nysse et la tradition, elle maintiendra qu’Adam était exempt de ]a mort, mais, contrairement à sa pensée, elle dira que l’homme est naturellement mortel, qu’il ne pouvait être immortel dans son corps que par grâce. Elle n’admettra pas que les peines du corps et de l’âme consécutives au péché ne soient nécessairement que médicinales. Elle rejettera la théorie origéniste de la restauration universelle qui imprègne la pensée de l’évêque de Nysse. Enfin, de cet optimisme exagéré touchant la nature idéale de l’homme, on ne s’étonnera pas que découle logiquement, pour notre auteur, un certain pessimisme touchant l’apparition de la condition actuelle de l’homme déchu.

On trouverait chez Grégoire de Nazianze à peu près les mêmes idées sur la déchéance que chez son ami, l’évêque de Nysse. Orat., xix, 13-14, P. G., t. xxxv, col. 1060 ; xiv, 25, col. 889-892 ; xxii, 13, col. Il là ; xlv, 8-12, t. xxxvi, col. 631-640.

Transmission du péché.

Les Cappadociens ne

paraissent pas avoir enseigné que notre âme ait été, au sens strict, souillée par le péché d’Adam.

Dans son traité De infantibus qui præmalure moriuntur, Grégoire de Nysse compare le sort des adultes qui, par leur faute, se placent en dehors de ce qui est la nature, toù xaxà cpûaiv, et se privent ainsi de cette vie qui nous est adaptée, avec celui des enfants qui, eux, sont dans un état conforme à la nature : « L’enfant, dit-il, sans expérience du mal, sans maladie des yeux de l’âme, qui l’empêcherait de voir la lumière, se trouve dans ce qui est conforme à la nature, èv tw xaxà cpuaiv yivETat, il n’a pas besoin de la santé qui rient de la purification, jx/j Ssôfxsvov ttjç èx toû xaQxpOY]vat. ûyisîaç, car il n’a point admis la maladie dans son âme dès le principe. T. xlvi, col. 117 D. Aussi l’âme d’enfant ainsi disposée commencera-t-elle à jouir, dans la mesure de son pouvoir, de la connaissance et de la participation de Dieu, jusqu’à ce que, par l’usage progressif de sa liberté, elle devienne capable de connaître Dieu davantage, et d’en être participant dans une plus large mesure. Col. 180 D.

Même doctrine chez saint Grégoire de Nazianze : dans une longue instruction sur le baptême, il s’exprime ainsi sur les enfants qui meurent non baptisés : « Puisqu’ils meurent sans le sceau du baptême, et sont cependant sans péché, àTCoWipouç. ils ne seront ni châtiés, ni récompensés par le juste juge. Celui qui n’est pas digne de supplice ne mérite pas de ce fait l’honneur ; de même celui qui est indigne d’honneur, ne mérite pas aussitôt le chat i ment. Oral., XL, 23, P. G., t. xxxvi, col. 389 C. Ils sont donc exclus du ciel, mais ils n’ont pas de peine à subir (autre que l’exil du ciel). parce qu’ils sont sans péché. Les deux Grégoire sein blent bien réserver le mot de « péché » aux fautes actuelles.

/II. LES ANTIOCHIENS. — Tandis que les Alexandrins, par le moyen de leur exégè orique, mêlent souvent aux données scripturaires, pour les interpréter, les vues philosophiques de leur mysti cisme intellectualiste, les Vntiochiens s’en tiennent plutôt, selon la méthode exégétique de leur école, à l’explication littérale du texte : de là, chez eux, une présentation spéciale de la doctrine traditionnelle de la faute originelle et de ses conséquences.

1° Dlodore de Tarse i vers 3 Il est extrêmement difficile de reconstituer la doctrine du maître de saint Jean Chrysostome et de I héodore de Mopsueste d’après les quelques fragments connus de ses œuvres. D’après le fragment sur Gen., i, 26, el ii, 7. P'.. t. xxxtn, col, 1561 1565, l’évêque « le Tarse, comme plus t ; ird son disciple. Jean Chrysostome, ne <>ii

l’image de Dieu que dans l’homme seul, non dans la femme. L’image consiste, selon lui, dans ce que l’homme a été constitué maître de la création. D’après un autre fragment sur Gen., iii, 8, col. 1568, la désobéissance d’Adam a entraîné un changement dans la nature de nos premiers parents, qui d’immortelle est devenue mortelle et, par le fait, source de concupiscence.

Dans un fragment du commentaire de l’épître aux Romains, v, 15, il entend le êç’<ï> 71râvTSç -rç^apTOv dans le sens : « parce que tous ont péché personnellement ». Dans Cramer, Catena, 48 et 44 ; cf. J. Freundorfer, op. cit., p. 117.

2° L’auteur des « Constitutions apostoliques ». — Il semble considérer la mort comme voulue de Dieu et non pas comme un châtiment du péché d’origine : « Si Dieu avait voulu que tous les hommes fussent immortels, il aurait pu le faire…, mais nous sommes persuadés que la mort n’est pas un châtiment, puisque les saints et même le Seigneur des saints, Jésus-Christ, l’ont subie. Dieu envoie la mort, afin de pouvoir punir ou récompenser chacun de nous lors de la résurrection. » Const. apost., v, 78, éd. F.-X. Funk, t. i, p. 253. En tenant ce langage sur la mort, qui n’est pas un châtiment, cet auteur se rapproche de Théodore de.AIopsueste en son ouvrage « contre ceux qui disent que les hommes sont pécheurs par nature et non par volonté ». P. G., t. lxvi, col. 1005-1012.

3° Saint Jean Chrysostome (344-407). — Le grand orateur de Const an tin ople a souvent parlé du péché d’origine dans ses homélies sur la Genèse et sur saint Paul. Il le fait selon la méthode exégétique d’Antiochc, en homme respectueux de la tradition, soucieux de rappeler à ses auditeurs les vérités doctrinales qui se dégagent des passages de la Genèse et de saint Paul touchant l’état primitif, la chute et ses conséquences. Si, nulle part, il ne présente ex professo une théorie d’ensemble du péché originel, il nous livre, vraisemblablement, dans ses homélies, les points de la doctrine courante, qu’il estimait les plus utiles à connaître pour ses auditeurs sur ce sujet.

1. État primitif de l’homme.

Saint Jean y insiste

beaucoup avec la tradition ; tel qu’il est sorti des mains de Dieu, l’homme a été fait à l’image du Créateur. Cela implique la domination du premier homme sur toute la création, même sur la femme. Cette royauté éclate dans ce fait qu’Adam pouvait donner des noms aux animaux, comme à des serviteurs soumis, et qu’Eve pouvait converser avec le serpent. In Gen., nom. viii, 3, P. G., t. un, col. 72, et nom. ix. i. col. 79. Dieu a non seulement dit : « Faisons l’homme à notre image » : il a ajouté : « et à notre ressemblance », montrant par là que, par nos forces humaines, nous pouvons parvenir à la ressemblance avec lui, et maîtriser complètement, si nous le voulons, ces animaux intérieurs que sont les passions, aussi bien que ceux du dehors. In Gen., nom. ix, 3, col. 78.

L’homme tel qu’il a été créé à l’origine, n’était ni corruptible, ni mortel, mais, comme une statue d’or qui vient d’arriver de la fonderie et brille de tout son éclat, il était exempt de toute corruption dans son corps. d popul, Int., hom. xi, 2, t. xi.ix, col. 121. Dieu le voulait immortel. In Gen., hom. m. 9 col. 1 17.

Dans cet état heureux, placé au milieu du paradis. Adam et Eve menaient une vie angélique sans douleur ni fatigue, sans souci de leur corps et de s : l propagation, smiis préoccupai ion du vêtement, inconscients

qu’ils étalent de leur nudité, ou plutôt revêtus de cette

gloire d’en haut <|iii les COUVrâil plus que toul

ment lu Gen., nom. kvi, ô. col. 131 : jcvi, i, col. 128 ; hom. xviii, l, col. 153.

Enfin, dernier prlvUègi de cel étal primitif : la