Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.1.djvu/18

Cette page n’a pas encore été corrigée
21
22
PAUL IV


nèse. Voilà pourquoi la candidature de l’anglais Pôle et celle d’autres cardinaux italiens furent mises en avant, sans effet. On s’accorda finalement sur le choix d’un personnage renommé par la sainteté de sa vie, sa vaste culture littéraire, sa supériorité intellectuelle, qui avait aidé puissamment saint Gaétan à fonder, en 1524, l’ordre des théatins. Jean-Pierre Carafa, évêque d’Ostie (depuis le. Il décembre 1553), recueillit les suffrages des membres du conclave le 23 mai 1555 ; son couronnement eut lieu le 26. Il avait soixante-dix-neuf ans ; cf. G. Coggiola, I Farnesi ed il conclave di Paolo IV, dans Studi storici, t. ix, 1900, p. 61-91, 203-227, 449-479.

Paul IV inaugura son court pontificat par une faute qu’il racheta d’ailleurs. Faisant trêve à ses désirs de rénovation religieuse, il se laissa fléchir par les prières instantes du Sacré-Collège et octroya la pourpre, le 7 juin 1555, à son neveu Carlo, qui ne méritait pas une telle faveur, car il avait été jusque-là un condottiere et un débauché, à telles enseignes qu’il dut recevoir l’absolution générale de tous ses méfaits, voire de ses crimes. Le nouveau cardinal nourrissait le dessein de se créer un apanage à Sienne et de travailler à grandir sa maison. Il entraîna son oncle, qui ne possédait pas l’intelligence des choses politiques, dans une guerre contre les Espagnols et une alliance avec la France. Paul IV détestait l’Espagne et voulait affranchir l’Italie de son joug : les hasards de la guerre le forcèrent à capituler et à assurer l’hégémonie espagnole en souscrivant le traité de Cavi (14 septembre 1557).

Dès lors, le pape s’adonna à l’œuvre de la réforme catholique dont jusque-là il n’avait pu que tracer le programme. A la vérité, il semblait donner le mauvais exemple en continuant sa confiance à son intrigant neveu. En 1558, Carlo Carafa dirigeait les administrations, les finances, les institutions judiciaires et la politique du Saint-Siège en maître absolu. Paul IV ne contrôlait pas ses actes ; il se réfugiait dans la vie monacale et s’effaçait volontairement. Carlo Carafa donnait libre cours à ses instincts ; il menait une vie licencieuse, cédait à sa passion du jeu et se livrait à des chasses fastueuses. Un théatin eut le courage d’avertir le pape ; sommé de justifier sa conduite, Carlo Carafa nia tout et acquit un plus grand crédit près de son oncle qui ne le crut pas coupable (août 1558). La vérité apparut bientôt : Paul IV, dans le consistoire du 27 janvier 1559, déclara ses neveux déchus de toutes les dignités et avantages qui leur avalent été jusqu’ici accordés et les condamna à quitter Rome dans les douze jours. R, Ancel, La disgrâce et le procès des Carafa, dans Revue bénédictine, t. xxiv. i !)117, p. 227 gq. La sentence ne fut pas inspirée par la politique, niais par le désir de punir avec sévérité les abus de confiance qui avaient été commis à son détriment et une vie licencieuse. Elle fut bénigne en comparaison du cbfttl ment qu’édicta Pie IV : on sait que Carlo Carafa fut étranglé en 1561 et son frère, le duc de Paliano, décapité.

Paul IV tint à honneur de ne nommer comme cardinaux que des ecclésiastiques vertueux et versés dans les connaissances théologiques. Il ne Uni aucun ompte ries désirs de l’Autriche ci de la France qui, chacune, tendaient à peupler 1< Sacn Collège de leurs créatures. Bien plus, certains de ses choix purent être considérés comme la m fini ion des intérêts politiques du Saint-Siège. En tous cas, la constitution Cum secundum./>ostolum (16 décembn 1558) édicta <Ii —s peines lèvera contre les cardinaux qui, du vivant d’un pape. Intrigueraient en vue de s’a isurer la tiare. Bullarum, dtplomalum, t. xi, [>. 545, Elle coupait court ; i la simonie qui pouvait s’introduire dans les élet lions pontlfii ci visait les agissements « lu cardinal d’Esté. Paul IV se plut à dire : il ne sera Jamais vrai qu’un simonie que m’ait succédé sur ce siège. » R. Ancel, L’activité réformatrice de Paul IV. Le choix des cardinaux, dans Revue des questions historiques, t. lxxxvi, 1909, p. 95.

Un pape aussi épris de la réforme catholique eût dû réunir le concile, toujours suspendu depuis avril 1552. Il n’en fut rien. Le concile n’avait point produit les effets qu’on en attendait ; les abus persistaient comme par le passé. Paul IV se rendit compte qu’une législation ne valait que dans la mesure où elle était appliquée. D’autre part, il se défiait du concile, craignait un séjour à Trente et eût préféré le voir se tenir à Rome à sa proximité, afin de parer aux dangers d’insubordination et d’éviter l’ingérence des princes dans les affaires spirituelles. D’ailleurs, les guerres qu’il dut soutenir contre l’Espagne rendirent impossible une assemblée conciliaire dans les États pontificaux.

Paul IV se résolut à employer des moyens plus efficaces. 11 établit des commissions ou congrégations, embryons des futures congrégations romaines, qui travailleraient à élaborer des mesures de réforme. Le 20 janvier 1556, se réunit une congrégation générale, composée de soixante-deux membres (cardinaux, prélats, généraux d’ordre, théologiens). Le 29 et le 30, une organisation nouvelle fut instituée : il y eut trois classes différentes, présidées par un cardinal et comprenant chacune quarante-quatre personnes ; les conclusions qui ressortaient des discussions étaient soumises au pape, lors d’une réunion plénière. Mais ce système, sage en lui-même, comportait des inconvénients : les séances spéciales se passaient en discussions qui tournaient en longueur ; Paul IV estima plus pratique de produire des actes et d’édicter des mesures salutaires de réforme.. Il s’attaqua à la simonie (constitution Intcr cetrras curas, 27 novembre 1557), élargit les attributions du tribunal de l’Inquisition, supprima les revenus de la Oaterie, diminua les redex’ances qui échéaient aux cardinaux à l’occasion des collations bénéficiâtes. Bullarum, t. vi, p. 528 et 532. Les choix épiscopaux furent davantage contrôlés : un laps de temps s’établit entre la présentation des candidats et leur nomination effective. Constitution Sanctissimus dominas noster, 3 décembre 1557, Jlullarum, t. vi, p. 531. Le pape se montra intransigeant sur l’âge des élus et leurs mérites : il prolongea même, outre mesure, la vacance des évêchés ; il exigea l’observation stricte de la résidence et renforça l’autorité épiscopale. Contre le concubinage et les mauvaises mœurs des lois furent promulguées, Bullarum, t. vi, p. 537 ; les hérétiques et les schismatiques furent frappés de graves peines et de censures. Ibid., p. 551. Quant aux religieux qui vivaient hors de leurs couvents, des règlements les obligèrent à reprendre la x le commune. Constitution Postquam divina bonitas, du 20 juillet 1558, ibidem, p. 538. Paul IV ra aussi en matière de foi contre les hérétiques qui niaient le dogme de la Trinité, la divinité du Christ, sa conception par l’œuvre du Saint-Esprit, la virginité de Marie. Constitution Cum quorumdam hominum, 7 août 1555, ibid., t. vi, p. 500. C’esl lui qui publia le premier Index des livres condamnés par le tribunal de

l’Inquisition. Il réforma le bréviaire et supprima celui de Qulnonez.

Légiférer ne lui suHit pas : il appliqua durement les lois promulguées : le cardinal Morone, suspect d’hérésie, fut entenné au château Saint-Ange et le cardinal d’Esté, coupable d’intrigues, chassé de Rome, là même la police rechercha les moines sortis indûment de leurs monastères et eu mit une centaine eu étal d’arrestation. Les privons (| les galères i se remplirent » dl vagabonda. Un familier des Farnèses prétendait qu’en i Rome était devenue un monastère de Saint François. Ainsi, tout en dépassant parfois la mesure, Paul iv Imprima une Impulsion décisive a la réforme Dlique et prépara le succès futur du concile.