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PECHE ORIGINEL. METHODE D’OLYMPE


s’implante dans l’homme par la concupiscence et qui ne peut être détruit que par la mort. Depuis le jour, en efïet, où l’homme séduit viola le commandement, le péché prenant naissance dans la transgression s’établit à demeure en lui : « Ainsi disparut la stabilité de l’état primitif, et nous commençâmes à être remplis d’agitations troublantes et de pensées étrangères. Privés du souffle divin, nous sommes depuis ce temps remplis de désirs charnels que le serpent a soufflés en nous… C’est pour éteindre le péché que Dieu a trouvé comme remède à notre situation la mort, afin que le mal ne s’éternisât point par notre immortalité (corporelle). » II, vi, p. 339-340.

a) Le péché qui habite en nous. — Méthode s’efforce, en plusieurs endroits, d’analyser ce « péché qui habite en nous ». Il le conçoit comme la source inépuisable des pensées mauvaises. De ce péché, comme de jeunes pousses, sortent les pensées voluptueuses : « il y a en nous deux sortes de pensées, celles qui naissent de la concupiscence…, celles qui naissent de la loi intérieure. » Ibid., p. 340. Le malin vient du dehors attiser à travers les sens la concupiscence, et faire couler jusqu’à l’âme, comme une traînée de bitume, les pensées qui fortifient la loi de la chair. Ainsi l’homme déchu est divisé entre le bien et le mal. « Lorsque le meilleur est plus fort que le pire, toute l’âme est entraînée vers le bien ; lorsque ce qui est mauvais opprime l’âme de son poids, l’homme est livré aux mauvaises pensées. » Ibid., p. 340. Mais il faut s’entendre : Méthode, par là, n’est pas déterministe. Il sait que la lutte dure jusqu’à la mort ; mais que l’homme peut et doit résister à ses penchants. II, m-iv, p. 333-336.

Lorsque l’Apôtre parle de la sagesse -de la chair qui ne peut être soumise à l’esprit, il faut entendre, dit-il, la propension à la volupté et aux plaisirs, et non l’irréductibilité de la chair même. Autrement, il ne faudrait recommander ni la tempérance, ni la chasteté. Ceux qui pratiquent ces vertus domptent leur corps. Paul ne recommande-t-il point de faire régner la justice sur nos membres ? C’est donc qu’il sait que l’esprit peut résister aux penchants mauvais, tout en ne les supprimant point. I, i.vm, 8 ; i.ix, p. 322-323.

L’Apôtre dit pourtant : quod facio, non cognosco ; et quod odi facio et ego vero carnalis sum et venuindalus peccato. Oui. répond Méthode, mais il s’agit ici des pensées étrangères qui nous provoquent au mal ; dans ce sens, le mal habite en nous comme le frelon boul donnant autour du rayon de miel. Il n’est point en notre pouvoir de penser ou de ne pas penser le mal : mais nous pouvons admet lie ou rejeter les pensées mauvaises. ii, n-iv, p. 331-335.

En raison du péché qui habite en nous, les pensées excitées du dehors, comme « les essaims de mouches, comme des chiens rendus enragés par le prince (lu mai,

sont là pour éprouver la résistance des I s soldats ;

mais celle-ci est possible : l’exemple de l’Apôtre le prouve. Ibid. Sans doute, avant la loi du Christ, la puissance de bien dans l’homme était faible et succombait sous le poids des soucis terrestres ; niais I tien est venu confirmer et fortifier la force de bien qui et ail mine in nous, et qui avait succombé a la eoneiipis cence inhérente a notre chair ; il nous a envoyé ii Christ pour condamner a morl le péché qui habite dans le corps. ii, iv. 2-v, p. 336 339.

b) La mort, conséquence et remède du péché. - La mort, c’esl a dir< la séparation de lame d’avec le corps, est non seulement l’application de la sanction portée par Dieu au paradis terrestre, contre Adam coupable, mais le remède a la multiplication du péché.

La raison pour laquelle Dieu a écarté Adam de l’arbre de vie, ce n’est point que, par repentir, il.ut voulu détruire son œuvre ; ce qu’il a voulu d’abord, dans sa providence, c’est, par la mort, détruire le

péché, pour que l’homme, purifié par elle, reçût la nourriture de vie. I, xxxviii-xxxix, p. 280-284.

Les tuniques de peau dont Jahweh a revêtu l’humanité déchue, signifiaient sa volonté de détruire jusqu’aux dernières racines le péché dans les descendants d’Adam en les faisant mortels. Tel un figuier poussé sur les murailles d’un temple ne cesse de propager ses racines à travers les pierres, jusqu’à cequel’édifieesoit renversé et les pierres assemblées de nouveau, tel l’homme, temple de Dieu, enlacé et disloqué par les racines du péché, ne peut être restauré par l’immortalité, s’il n’est renversé par la mort et débarrassé à fond des racines du péché. Car, aussi longtemps que le corps vit, le péché vit avec lui et y pousse ses racines. Même après le baptême, nous sommes enlacés par le péché. Personne ne peut se glorifier d’être à l’abri de tout péché de pensée : l’Apôtre, Rom., vii, 18-20, 22-25, affirme lui-même que la racine du péché n’est point enlevée de l’humanité, qu’elle n’est point totalement détruite, mais qu’elle vit encore. C’est pourquoi Dieu, notre médecin, nous a apporté la mort comme remède, afin d’extirper le péché, qui sans cela s’éterniserait dans une chair immortelle. Dieu, c’est encore l’artiste qui, voyant son chef-d’œuvre souillé ou défiguré par une main étrangère, le détruit, en refond le riche métal, pour refaire une plus belle œuvre.

A l’homme le pouvoir, non pas d’arracher jusqu’au fond les dernières racines du mal, mais de les rendre stériles ; à Dieu la puissance de détruire absolument le péché jusqu’aux dernières racines par la mort. I, xliixi. m, p. 289-294.

On devine comment la doctrine de la résurrection vient couronner cette interprétation de la mort comme remède du péché. Le Christ, en descendant parmi nous, ne vient point changer la nature de l’homme, mais ramener cette nature à l’état d’immortalité incorruptible (du composé), dans lequel elle avait été créée au début. I, xlviii, 4, p. 303. Cela se fera par la résurrection des corps.

En résumé, la doctrine de Méthode sur le péché originel mérite l’attention du théologien, non seulement comme réfutation solide de l’hypothèse origéniste, mais encore comme écho fidèle de renseignement courant à la fin du m c siècle, dans le milieu de l’auteur.

Esprit traditionnel, l’évêque d’Olympe s’attache surtout à interpréter correctement les passages classiques de l’Ancien Testament et de saint Paul sur le péché d’origine. Il le fait dans l’esprit d’Irénée (idée du souille divin et de la récapitulation).

Esprit grec, il partage avec ses prédécesseurs grecs une tendance à l’optimisme : celle-ci s’affirme chez lui et dans la façon dont il déduit l’immortalité native du composé humain, du fait de la nature incorruptible du Dieu créateur, et dans la manière dont il adoucit l’opposition rigoureuse établie par saint Paul, Rom., ii, 9-25, entre la chair concupiscente et l’esprit ; clic se dégage aussi de son insistance à mettre en relief la puissante de la liberté en laie des tendances mauaises, et de sa conception de la mort comme remède au péché.

Méthode marque un progrès sur ses prédécesseurs grecs en ce qu’il donne plus d’attention qu’eux à la concupiscence comme suite du péché. Mais il voit surloul en elle une puissance de péché en action, sans distinguer entre son aspect pcceaniineuv et son aspect pénal Sa (loi Iriiie s’imposait encore avec lanl de force a la fin du w siècle, a saint Kpiphanc, comme défense heUreUM de la vérité traditionnelle, contre les théories

d’Origène, que l’évêque de Salamine se contentait de

transcrire, pour réfuter ces théories, les principaux passages de {’Agtaophon. Il.rrcs., i xiv, 12 62. Par l pi phane, elle a pu conliniier a Influence ! la tradition

postérieure.