Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.1.djvu/161

Cette page n’a pas encore été corrigée

307

    1. PECHE ORIGINEL##


PECHE ORIGINEL. SAINT PAUL

; ns

nité pécheresse, et Jésus, le nouvel Adam, source de vie et de sainteté, va se dégager pour lui une vue d’ensemble plus large, plus profonde, plus compréhensive, a la l’ois sur l’universalité du mal et sur l’universalité du remède. Cette vue est présentée surtout dans l’épître aux Romains, mais elle se retrouve, 1res précise, en d’autres textes pauliniens.

Adam source de péché et de mort (Rom., v. 12-21 1.

1. Le contexte.

Paul vient de rappeler le fait consolant de la justification, et de dire sa confiance illimitée dans la puissance du fleuve de vie qui émane du sanj ; de Jésus-Christ, Rom., v, 1-11. Pour mieux marquer cette puissance dans toute son efficacité, son extension et sa durée, il va la rapprocher de la puissance du péché d’Adam, avec toute sa virulence et son universalité. De là l’expression Sià toùto, ꝟ. 12, qui marque la liaison entre les Il premiers versets du chapitre et la péricope 12-21. Ainsi, l’intention de ce parallèle n’est pas tant d’expliquer la genèse du péché (lue d’expliquer l’œuvre de la grâce surabondante du Christ. Ce serait donc fausser les perspectives pauliniennes que d’envisager ce passage comme une démonstration de l’existence du péché originel, encore moins comme une thèse sur le mode de sa transmission, ou sur sa nature. On sera mieux dans ces perspectives, si l’on considère ce texte comme une illustration, par un fait déjà connu dans une certaine mesure, à savoir, l’universalité des conséquences de la chute d’Adam, d’un fait nouveau, la puissance universelle de la rédemption.

2. Analyse du texte

(cf. J.-M. Lagrange, Épître aux Romains, p. 104-113 ; F. Prat, La théologie de saint Paul, t. i, 7e éd., p. 253-264 ; J. Freundorfer, op. cit., p. 214-264). — Dans son parallélisme entre les deux chefs de l’humanité, l’Apôtre est amené à remonter jusqu’à la source des deux courants qui traversent l’histoire du genre humain : d’un côté, le péché et la mort ; de l’autre, la justification et la vie.

a) Il fixe d’abord les yeux sur le premier Adam, source de l’humanité déchue  :

(12) « C’est pourquoi, comme par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et qu’ainsi la mort a passé par tous les hommes, parce que tous ont péché,

(13) car, jusqu’à la Loi, le péché était dans le monde ; or le péché n’est pas imputé quand il n’y a pas de loi,

(14) et cependant la mort a régné depuis Adam jusqu’à Moïse, même sur ceux qui n’avaient pas péché par une transgression semblable à celle d’Adam, lequel est le type de celui qui devait venir… »

Ainsi, l’universalité du péché comme de la mort est ramenée à un seul homme comme à sa source. Il s’agit bien ici de l’Adam des premiers chapitres de la Genèse, qui a ouvert pour l’humanité une ère de déchéance et de mort. Saint Paul néglige Eve : ce n’est pas qu’il ignore < qu’elle fut séduite par l’astuce du serpent », II Cor., xi, 3, que, séduite, « elle est tombée dans la transgression », I Tim., ii, 14 ; c’est qu’il veut opposer l’unique source de déchéance, Adam pécheur, à l’unique source de salut, le Christ rédempteur.

Par cette phrase : « le péché est entré dans le monde », l’auteur n’entend pas le péché d’Adam ut sic. Pour désigner celui-ci, l’Apôtre a d’autres termes : napaxor}, « la désobéissance », 7rapdc6aatç (ꝟ. 14), « la transgression », -apâ77TM[i.oc (t. 15-20), « le faux-pas, la chute morale ».’H àjj.apTta désigne ici le péché personnifié qui, par le fait même de la transgression du premier homme, fait son entrée dans le monde, pour y régner en souverain tyrannique comme une puissance ennemie de Dieu.

Ce qui passe ainsi dans la race humaine par le fait du premier homme, ce n’est pas la faute personnelle d’Adam comme telle, mais le péché, sorte de puissance malfaisante qui exerce sa domination dans l’homme à la suite de la désobéissance d’Adam. L’Apôtre ne décrit point encore l’évolution de cette puissance mauvaise dans le monde : il se contente ici d’affirmer son entrée dans les consciences humaines, seules capables d’être envahies par elle, du fait d’un seul homme.

Autre conséquence malheureuse de la faute d’un seul, le péché induit par Adam dans l’humanité y a produit la mort, 81à ttjç à(jL7pTt.7.ç ô Ôâvaxoç. La mort, en effet, est le salaire du péché. Rom., m. 23 : celui-ci est l’aiguillon de la mort ». I Cor., xv, 56. Il s’agit évidemment ici de la mort physique comme dans la Genèse ; Là, en elTet, la défense de Dieu était sous peine de mort. C’est donc par le péché que la mort, elle aussi, a fait son entrée dans le monde. Elle s’explique et par une loi positive, et par sa transgression ; la mort se répand, SûjXOsv, comme l’héritage d’un père passe à ses enfants. » Lagrange, op. cit., p. lut, . Or celle mort a envahi tous les hommes, parce que tous ont péché, è<p’& 7tàvT£ç ^p.apTOv. Ici, l’Apôtre conclut de l’universalité de la mort comme châtiment du péché à l’universalité de la culpabilité humaine. C’est une conséquence naturelle de la relation causale qu’il reconnaît entre la mort et le péché ; puisque tous meurent, c’est donc que tous ont péché. Nous avons là une argumentation d’effet à cause qu’indique d’ailleurs et la particule consécutive xocl o’jtojç et la conjonction ècp' o>.

Il est vrai que le traducteur d’Origène et les commentateurs latins anciens, spécialement saint Ambroise et saint Augustin, ont fait de £9’u un relatif qui se rapporterait à Adam, in quo omnes peccaverunt. Mais les exégètes catholiques les plus autorisés pensent aujourd’hui que ècp’co ne peut signifier ^ dans lequel », mais seulement « parce que ». Lagrange, p. 106. — « Nous ne faisons pas dire à Paul que tous les hommes ont péché en Adam. La formule peut être très théologique, et il en fournit quelque part le modèle en disant que « tous meurent en Adam » ; mais enfin elle n’est pas de lui et il ne faut pas songer à traduire le texte grec… ni même le latin par < en qui tous ont péché ». Prat., op. cit., t. 1, p. 258.

D’ailleurs, l’idée d’un péché originel commun à Adam et à toute l’humanité est bien contenue sous la forme « parce que tous ont péché ». C’est bien le sens du raisonnement par lequel l’Apôtre prouve l’universalité du péché dans les ꝟ. 13 et 14. A s’arrêter aux mots ttcxvt£ç ^aapTOv, on serait tenté de penser que saint Paul explique ici l’universalité de la mort par l’universalité des fautes personnelles, d’autant plus que, dans iii, 23, la même expression désigne des fautes individuelles. Mais, à cette exégèse s’oppose la suite du raisonnement : l’Apôtre va prouver que tous les hommes ne meurent pas à cause des fautes actuelles, mais à cause de la faute d’Adam dont ils partagent assez la culpabilité pour en subir la peine. Du fait d’Adam, non seulement tous sont morts, mais tous ont péché.

En voici la preuve : il choisit pour la faire une époque où les péchés actuels ne sont pas imputés comme cause de mort, parce qu’il n’y avait pas de loi qui disait : « si tu pèches, tu mourras. » C’était l’époque d’avant Moïse : il y avait certes alors des péchés actuels dans le monde, mais le péché n’était pas imputé, puisqu’il n’y avait pas de Loi. v. 13. On ne pouvait donc mourir pour un péché actuel : or, qu’arrivait-il alors ? Tous moururent et la mort a régné depuis Adam jusqu’à Moïse. Cette mort ne pouvait s’expliquer alors pour personne par des péchés actuels, qui ne pouvaient, dans l’hypothèse, être cause de mort. Elle s’expliquait encore bien moins « pour ceux qui n’avaient pas péché, à l’imitation de la transgression d’Adam » par une faute actuelle. S’ils moururent tous. c’était pour une autre cause, pour un autre péché, en dehors du péché actuel. Ce ne pouvait être que pour le