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trop confiant dans les promesses d’intervention de Charles-Quint, avait jeté définitivement l’Angleterre dans le schisme. Il résistera à la pression parfois violente des deux partis et cherchera à jouer le rôle d’arbitre.

Malheureusement, la réalisation de ses plans politiques sera entravée par son népotisme. Comme le nouveau pape était âgé, sa parenté se hâta d’accourir à la cour pontificale. Le 18 décembre 1534, Paul III nomma cardinaux ses deux petits-fils Alessandro Farnèse, fils de Pierluigi, et Guido Ascanio Sforza di Santa Fiora, fils de Constanza, âgés de 15 et de 16 ans.

11 leur donna, aussitôt qu’il put, les deux grandes charges de l’Église romaine : Alessandro reçut la Chancellerie, le 13 août 1535, et Ascanio, la Chambre apostolique, le 22 octobre 1537. Cet acte de népotisme eut un avantage : il permit à Paul III de dominer la curie et de travailler efficacement à la réforme. Cf. P. Richard, op. cit., t. ix, p. 54-55. Son fils aîné, Pierluigi, nommé gonfalonier de l’Église, le 31 janvier 1537, reçoit, le 31 octobre, à titre héréditaire, le duché nouvellement formé de Castro. Le 5 novembre 1540, Ottavio Farnèse, fils de Pierluigi, âgé de 15 ans, obtient, pour lui et ses descendants, le duché de Camerino, dont Giulia, héritière légitime du dernier duc, avait été dépouillée, à la suite du mariage qu’elle avait contracté, contre la volonté de la cour romaine, avec le duc d’Urbin. Ottavio avait dû épouser, le

12 octobre 1538, la fille de Charles-Quint, Marguerite, veuve d’Alexandre de Médicis. Enfin, en 1545, Pierluigi, malgré la vive opposition du Sacré-Collège, qui invoquait les anciennes bulles interdisant toute aliénation du patrimoine de l’Église, malgré la résistance de l’empereur, qui revendiquait la suzeraineté sur ces principautés, obtenait Parme et Plaisance, en fief héréditaire ; Camerino et Nepi revenaient aux États de l’Église ; mais Ottavio. avait en compensation le duché de Castro, tandis que la préfecture de Rome était donnée à son frère Orazio.

II. Gouvernement des États de l’Église ; mécén it de Paul III. — La situation des États de l’Église, de la ville de Rome surtout, était lamentable, à l’avènement de Paul III ; les ruines accumulées par le sac de Rome, en 1527, l’épuisement des provinces, par suite de nombreuses guerres, demandaient une gestion prudente et économe. Jules III se plaindra, en 1551, que son prédécesseur ait hypothéqué tous les revenus du Saint-Siège et laissé une dette de 500 000 écus, alors qu’il en avait trouvé en caisse, à son avènement, 266 000. Et cependant il avait, en dehors des revenus normaux, établi à diverses reprises des taxes extraordinaires : dîmes sur le clergé italien, augmentation du prix du sel, impôt spécial, établi par la bulle du 2 septembre 1543, Cherubini, Bullarium romanum, t. i, p. 771-773, le sussidio, qui rendit odieux le nom de son auteur.

Les impôts amenèrent des troubles, notamment à Pérouse, où la révolte fut durement réprimée par Pierluigi (1 er juillet 1540) ; dans le fief d’Ascanio Colonna, dont les forteresses Rocca di Papa et Paliano furent rasées et les possessions confisquées (26 mai 1541).

Il est certain que ces impôts étaient en partie justifiés par les dépenses qu’entraînaient les guerres contre les Turcs et contre la ligue de Smalkalde ; mais la famille des Farnèses engloutit une bonne partie des revenus du Saint-Siège ; le rétablissement des réjouissances publiques, du carnaval, les fêtes luxueuses données au Vatican, comme au plus beau temps de la Renaissance, allégèrent le trésor pontifical.

Une partie des revenus fut consacrée à la protection des lettres et des arts. Paul III avait reçu une éducation d’humaniste ; cardinal, il s’était déjà montré l’ami des lettrés et des artistes. Devenu pape, il leur continua ses faveurs.

Il restaura l’université romaine, y attirant les écrivains les plus célèbres, favorisant surtout les canonistes, les théologiens, les astrologues, en qui il avait grande confiance, les mathématiciens. Pour lui plaire, les poètes traitaient en vers des sujets de théologie. La bibliothèque vaticane lui doit de nouveaux catalogues de manuscrits grecs et latins, établis par Cervini et Sadolct, l’acquisition de nouveaux manuscrits et la restauration de ceux qui étaient endommagés, l’impression, à partir de 1542, des plus précieux codices grecs.

Artiste, il résussit à s’attacher Michel-Ange, qu’il nomma architecte en chef, sculpteur et peintre du palais du Vatican. Michel-Ange réalisa, de 1536 à 1541, sa fresque du Jugement dernier à la chapelle Sixtine, d’autres fresques dans la chapelle Pauline, 1542-1549 ; il termina le tombeau de Jules II, dont il simplifia considérablement le dessein primitif. Il fut chargé, en 1547, de la continuation de l’église Saint-Pierre. Abandonnant le plan de Sangallo.à qui Paul III avait confié, en 1539, la reprise des travaux, il revint au plan de Bramante pour la croix grecque et les points essentiels de l’ensemble intérieur de la composition ; pour le reste, il suivit ses propres conceptions. « détruisant la miraculeuse harmonie qui distinguait le plan de Bramante ». Pastor, op. cit., t. xii, p. 432.

Dès 1537, Paul III avait fait commencer à Rome un grandiose système de fortifications, auxquelles travaillèrent Sangallo, puis Michel-Ange ; à l’intérieur de la ville, il fit réaliser des embellissements au Vatican, agrandir et décorer le château Saint-Ange, dresser les plans d’une transformation de la place du Capitule, etc.

Dans ces efforts pour maintenir la suprématie du Saint-Siège dans les arts, Paul III se montra, comme dans tout son pontificat, un homme de transition : « il est exactement sur la limite de la perfection et de la décadence ». Pastor, op. cit., t. xii, p. 352. L’âge d’or de la Renaissance était passé : il n’y a plus même spontanéité et même originalité dans la création, malgré la réunion autour du pape Farnèse des artistes des papes Médicis.

III. La réforme ecclésiastique.

Paul III voulait la réforme par le concile général : il mettra à réaliser ce dessein une obstination indomptable. Dès la première réunion des cardinaux, 17 octobre 1534, il parle de la nécessité de le convoquer ; et de la première bulle de convocation du concile à Mantoue, datée du 2 juin 1536, jusqu’à l’ouverture du concile à Trente, 13 décembre 1545, il luttera de toutes ses forces contre les obstacles qui s’opposaient à son projet et qui venaient des cardinaux, des protestants d’Allemagne, du duc de Mantoue, Federigo Gonzaga, de Charles-Quint, de François I er. Pour le détail voir l’art. Trente (Concile de).

Plusieurs commissions de réforme furent instituées qui, dans la pensée du pape, devaient préparer les travaux du concile, mais qui, par suite des prorogations successives, donnèrent lieu à des réalisations partielles. La situation avait été dépeinte sous de sombres couleurs dans le rapport de J.-B. Caccia, écrit sous Clément VII et dédié à Paul III, De fuie inlegranda ac de Ecclesia reformanda ad Paulum III. Bibl. vat.. cod. 3659. Il n’y a plus dans l’Église, selon l’auteur. « trace de l’humilité, de l’économie, de la continence et de l’énergie apostoliques ». Pastor, op. cit., t. xi. p. 112.

En novembre 1534, deux commissions étaient instituées, l’une composée des cardinaux Piccolomini, Sansevcrino et Cesi, pour la réforme des mœurs, l’autre, comprenant les cardinaux Campeglo, Grimani et Cesarini, chargée d’enquêter sur l’administration des États pontificaux. Une bulle de réforme devait