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PÉCHÉ. CAUSES EXTÉRIEURES, DIEU ?


dans le cas où l’on pèche sur un objet bon, il vaut mieux parler non d’erreur, mais d’inconsidération de la règle, comme on fait pour le premier péché. A titre d’information : Cathrein, Ulrum in omni peccato occurrat error vel ignoranlia, dans Gregorianum, 1930, p. 553-567.

Les causes extérieures du péché.

On recherchera

ici tout ce qui, du dehors, agit sur l’âme par quelque endroit, en sorte qu’elle en vienne à pécher. On aura soin de définir le rapport exact de telles causes avec le péché commis en vue de mesurer quelle responsabilité demeure au pécheur. La question préalable se pose ici de savoir si le sujet peut ou non ne pas entrer en rapport avec les causes extérieures du péché : car la gravité du péché doit se ressentir du volontaire relatif à I’Occasion du péché (voir ce mot). Parmi les agents signalés ci-dessus, nous pouvons écarter les objets sensibles qui n’ont pas d’autre action que d’éveiller la passion, cause intérieure du péché. Retenons les personnes, dont l’action pose des problèmes propres : Dieu, le diable, l’homme.

1. La question de Dieu comme cause du péché. — Cette question procède pour une part de ces enseignements métaphysiques que la cause première agit en toute cause seconde et concourt à la production de tout effet ; singulièrement que Dieu est la seule cause pénétrant jusqu’à l’intérieur de la volonté d’où procède l’acte volontaire ; que le mal cependant ne peut être, sans discernement, attribué à Dieu. D’autre part, la même question procède de certains enseignements de la révélation où Dieu et le péché sont de quelque façon, et en des sens divers, mis en rapport.

a) Dieu n’est pas cause du péché.- — Un premier point, en cette matière passablement complexe, est établi par le théologien avec sécurité. Et c’est que Dieu n’est pas cause du péché. La sainte Écriture en promulgue nettement l’affirmation ; si, par ailleurs, elle revendique énergiquement que le péché même n’échappe point aux desseins de Dieu, on n’en rendra compte qu’après avoir agréé cette première vérité. L’apôtre saint Jacques, dans son épître, eut notamment l’occasion de réagir contre l’opinion de certains fidèles qui, sans doute, faisaient retomber sur Dieu la responsabilité de leurs propres fautes, i, 13 ; voir sur ce verset le commentaire et les aperçus historiques de J. Chaîne, éd. citée. Le IIe concile d’Orange, confirmé par Boniface II, a promulgué, en 529, deux canons qui sont là-dessus la règle de la foi chrétienne :

Can. 23. Suam voluntatem homines faciunt, non Dei, quando id agunt quod Deo displicet ; quando autem id faciunt quod volr.nt ut divins serviant voluntati, quamvis volentes agant quod agunt, illius tamen voluntas est aquo et pneparatur et jubetur quod volunt. Denz., n. 196.

Can. 25. …Aliquos vero ad nialum divin a potestate praîdestinatos esse non solum non credimus, sed etiam, si sunt qui tantum malum credere velint, cum omni detestatione illis anathema dicimus. Denz., n. 200.

Il appartient au théologien d’expliquer ces données. Saint Thomas le fait en disani premièrement que Dieu ne cause pas le péché directement. Celui-là cause le péché directement qui incline ou induit la volonté à pécher. Or, Dieu ne fait ; iinsi ni a l’égard de sa propre Volonté, ni à l’égard de la nôtre. Car il y a opposition entre Dieu inclinant et convertissant toute chose à soi comme à sa fin, et la nature du péché soustrait à cet ordre de finalité dont Dieu est le principe. Dieu se renierait en vérité s il péchait ou faisait pécher. II répugne qu’on attribue à Dieu le mal de faute

Saint Thomas se donne la peine d’écarter un texte de la Sagesse qui semblait gêner cette conclusion : Sap.. xiv, 2 ; mais la Vulgate esi seule responsable de cette apparence. Il interprète aussi un texte de saint Augustin, où l’action < ! < Dieu sur les volontés humaines, dans le bien et dans le mal, est exprimée

par le mot à’inclinare (De gratia et libero arbitrio, xxi, P. L., t. xliv, col. 907-909) ; l’ensemble du passage original, comme la doctrine générale de saint Augustin sur ces matières, garantit de surcroît l’interprétation de saint Thomas (voir l’art. Augustin, spécialement col. 2398-2408). — Mais que Dieu ne cause pas directement le péché, cette proposition seule laisserait place à la pensée que Dieu, néanmoins, n’empêche pas le péché tandis qu’il peut le faire. Pour l’écarter, et découvrir dans son universalité cette vérité que Dieu ne cause pas le péché, saint Thomas ajoute deuxièmement que, du péché, Dieu n’est pas même la cause indirecte. Sans doute, Dieu n’offre pas à tous les secours, grâce auxquels ils eussent évité de pécher. Mais il agit ainsi selon l’ordre de sa sagesse et de sa justice. Pour cette raison, on ne peut, d’aucune façon, lui imputer le péché commis : non plus qu’un pilote, resté légitimement à terre, n’est cause du naufrage en ce qu’il ne gouvernait pas le navire. Cette raison est profonde. Elle va jusqu’à nous faire entendre que le péché sort comme de sa cause propre et suffisante de la créature, laquelle est naturellement capable de défaillance ; il n’y a point lieu, pour rendre compte de cet effet, d’engager ici quelque autre causalité. Si, néanmoins, insistant sur la nécessité du secours divin, on mettait le péché en liaison avec ce secours non accordé, nous devrions dire que, selon l’ordre de nature, le défaut du secours est postérieur à la défaillance de la créature et dû à celle-ci. Mais nous ne ferions qu’affirmer de nouveau par là et reconnaître cette fragilité de la nature créée, d’où le péché sort, pour ainsi dire, comme un fruit de son germe. Qu’elle ne pèche pas, elle le doit à la bonté de Dieu ; mais elle ne doit qu’à soi-même de pécher. Mais pourquoi Dieu, tantôt prévient-il cet effet, et tantôt ne le prévient-il pas ? Il n’y faut point chercher d’autre raison que la sagesse et la justice de Dieu, qu’il n’appartient pas à l’homme de sonder. Ia-IIæ, q. lxxtx, a. 1.

b) Péché et concours divin. — Cette proposition, que Dieu n’est pas la cause du péché, a une valeur absolue, car on y entend cet acte humain en ce qu’il a de formel, à savoir le mal, comme l’auteur de la statue est celui qui a donné à l’airain cette forme, non celui qui a coulé l’airain. La précision que nous devons maintenant introduire n’ôtera donc rien à la valeur de cette première proposition. Car l’acte du péché est de Dieu. Tandis que nous avons d’abord satisfait à l’enseignement exprès de la foi. nous devons accorder à présent quelque chose à la métaphysique. D’anciens 1 héologiens, dont Pierre Lombard rapporte longuement l’opinion, // Sent., dist. XXXVII, avaient pensé que les actes des péchés ne peuvent d’aucune façon être causés par Dieu. Saint Thomas témoigne à deux reprises que l’opinion en est vieillie et passée de mode. In Il nm Sent., dist. XXXVII. q. ii, a. 2 ; De malo, q. iii, a. 2. Elle est en effet insoutenable, quelque diflî-Clllté que doive engendrer l’opinion contraire L’acte du péché est de Dieu, en tant qu’il est de l’être, en tant qu’il est un acte. Tout être, de quelque manière qu’il réalise l’être, dérive nécessairement de l’être premier : on en trouvera la démonstration Sur », theol., I". q. xliv, a. 1. Toute action, à son tour, est causée par quelque chose en acte, puisque rien n’agit que ce qui est eu acte ; or, tout être en acte se réduit, comme à sa (anse, au premier acte, à savoir Dieu, lequel est acte par son essence même ; sur quoi l’on peut voir l q. CV, a. 5. Ces arguments, on le voit, sont mélapln siques. Il a lieu d’entendre la causalité de Mou BUT

i acte du péché avec cette plénitude et cette étendue que saint Thomas revendique universellement en

i.i eur (le la cause première.

Reste sans doute a concilier a ce la |>re"edeiile celle

conclusion : comrænl Dieu ne cause i il pas le i