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PAUL (SAINT). LA HIÉRARCHIE


turels très variés, des « charismes ». Voir plus haut, col. 2414 sq. Parmi ces charismes, les uns sont extraordinaires, miraculeux et passagers ; d’autres sont stables et constituent des capacités ou aptitudes surnaturelles pour remplir tel ministère en vue du bien général de l’Église. Les charismes extraordinaires étaient appelés à disparaître de l’Église, ou tout au moins à ne plus jouer aucun rôle dans son organisation ou sa vie sociale ; tandis que d’autres demeurent dans les sacrements du baptême, de la confirmât ion et de l’ordre.

Le charisme de l’ordre est le principe de la hiérarchie. En effet, dans les épîtres à Timothée, le « charisme » de gouvernement apparaît comme une capacité permanente, qui demeure dans le sujet ; comme un don surnaturel accordé par l’Esprit-Saint, au moyen de l’ordination. Il n’y a donc pas une opposition formelle, comme certains l’ont affirmé, entre l’organisation charismatique et l’organisation hiérarchique de l’Église : la première contient le principe de la seconde.

D’après I Tim., iv, 14, l’assemblée des anciens ou presbylérium avait imposé les mains à Timothée ; tandis que, dans II Tim., i, 6-7, l’Apôtre dit : « Par l’imposition de mes mains. » On doit en conclure que saint Paul a imposé lui-même les mains à Timothée en même temps que le presbylérium. Il a procédé lui-même, non seulement à la désignation, mais à la consécration religieuse par laquelle Timothée a reçu du Saint-Esprit un don ou capacité spirituelle en vue de sa charge. Où s’est faite cette imposition des mains ? Peut-être à Lystres, cf. Act., xvi, 1-3, ou encore au moment où l’Apôtre envoya Timothée à Éphèse ; cf. I Tim., i, 18-20.

Nous voyons un cas analogue dans Act., xiii, 1-3, où Paul et Barnabe reçoivent l’imposition des mains sur l’ordre de l’Esprit-Saint, et sont envoyés par lui en mission. Mais Paul et Barnabe furent-ils consacrés évêques en cette circonstance par les « prophètes et les docteurs » ? C’est l’opinion de beaucoup d’auteurs catholiques. Cf. Knabenbauer. p. 221. Cependant, d’autres le nient pour les raisons suivantes : Saint Paul, ayant été fait apôtre directement par Jésus-Christ, avait les mêmes privilèges et les mêmes pouvoirs que les autres apôtres ; il n’avait donc pas à être consacré évêque ; il tenait de Jésus-Christ « la grâce et l’apostolat ». Rom., i, 4-5. De plus, Barnabe avait déjà les mêmes pouvoirs que les « prophètes et les docteurs » qui lui imposèrent les mains ; cf. ꝟ. 1, où il est nommé le premier de la liste. L’imposition des mains n’aurait donc été qu’une bénédiction pour appeler la grâce de Dieu sur la mission des deux apôtres ; cf. Act., xiv, 26 ; voir Jacquier, Les Actes des apôtres, p. 381.

Le passage I Tim., iv, 14, porte : « par une prophétie, avec l’imposition des mains » ; tandis que, dans II Tim., i, 6-7, il n’est pas fait mention de cette prophétie ; il n’est parlé que de l’imposition des mains. C’est peut-être une indication que la prophétie en question n’avait point fait partie du rite consécrateur. D’après

I Tim., i, 18-20, Timothée fut désigné par l’esprit prophétique, par « des prophéties ». Mais où et par qui ? On conjecture avec vraisemblance que ce fut à Lystres, Act., xiv, 2, lorsqu’il fut choisi par l’Apôtre.

II dut être présenté par les prophètes chrétiens appartenant au presbylérium. Ce fait justifierait le choix d’un compagnon si jeune ; cf. I Tim., iv, 12. On peut entendre également cette prophétie, d’une manifestation spéciale et extraordinaire de l’Esprit-Saint, accompagnant le rite de l’imposition des mains, rite qui s’accomplissait avec une certaine solennité. Dans ce cas, la manifestation spirituelle serait elle-même un charisme, cf. Act., xiii, 1-3. Mais faisait-elle

partie du rite consécrateur ? On ne peut l’affirmer, car dans II Tim., i. 0-7, elle n’est pas mentionnée.

Les épîtres pastorales ne font aucune allusion à l’ordination de Tite ; mais sa charge et, par suite, ses pouvoirs étaient analogues à ceux de Timothée. Nous le voyons délégué par saint Paul à Corinthe et organisant la collecte pour « les saints ». II Cor., vin. 16. Il y est envoyé une seconde fois pour maintenir l’Église sous l’autorité de l’Apôtre. Il était probablement porteur de la "lettre sévère », cf. II Cor., ii, 12. et vii, 6-15. II semble d’ailleurs avoir réussi au delà de toute espérance dans cette difficile mission. Il retourne encore une fois à Corinthe pour terminer la collecte : cf. II Cor., viii, 16. D’après II Tim., iv, 10, il accomplit aussi une mission en Dalmatie.

Timothée et Tite consacrent et établissent, pour gouverner l’Église, des episcopi et des presbyteri. L’Apôtre écrit à Timothée : « Que les « presbytres » qui gouvernent bien soient jugés dignes d’un double honneur (ou : d’une double rémunération ; cf. ꝟ. 18 ; Constit. apost., II, 28, P. G., t. i, col. 673), surtout ceux qui travaillent à la prédication et à l’enseignement »… « Ne reçois point d’accusation contre un i presbytre », si ce n’est sur la foi de deux ou trois témoins. »… « N’impose trop vite les mains à personne et ne participe point aux péchés d’autrui. » I Tim., v, 17-25.

Les « presbytres » ou anciens reçoivent donc leurs pouvoirs et leur charge par l’imposition des mains, c’est-à-dire une consécration religieuse. Cette imposition ne peut se faire qu’après un mûr examen, ꝟ. 22. Quelques interprètes entendent cette imposition des mains de la réconciliation après la pénitence ; mais cette opinion n’est guère probable car, dans l’ensemble du passage, il est question des « presbytres ». Cf. Tit. i, 5-7.

Dans Tit., i, 5-7. Tite a été laissé en Crète pour achever d’organiser l’Église et pour établir dans chaque ville des presbytres, selon les instructions de l’Apôtre. Au t. 7, celui-ci dit en parlant des mêmes personnages : « Car il faut (lue l’évêque soit irréprochable en qualité d’administrateur de la maison de Dieu… » Dans I Tim., iii, 1 sq., l’Apôtre expose les qualités exigées de « l’évêque », en des termes qui donnent une très haute idée de sa charge : l’épiscopat est une importante fonction, xaXov ëpyov ; l’évêque doit être « irréprochable », « capable d’enseigner », il doit « prendre soin » de l’Église de Dieu. Les qualités des « presbytres », Tit., i, 5-7, sont les mêmes que celles de 1’ « évêque « d’après I Tim., iii, 1 sq. Les « presbytres », comme 1’ « évêque », doivent travailler à la prédication et à l’enseignement. Toutefois, dans les pastorales, il est toujours question de < l’évêque » au singulier ; et, de lui seul, et non des « presbytres » il est dit qu’il est l’administrateur de l’Église de Dieu. Les « presbytres » sont toujours désignés collectivement ; ils forment le 71pea6uTspt.ov ou « collège des anciens » ; cf. Act., xiv, 22 ; I Tim., iv, 14. Dès son premier voyage, saint Paul en avait établi « dans chaque Église ». Ait., xiv, 22. A la fin de son troisième voyage, ceux d’Éphèse viennent le rejoindre à Milet, Act., xx, 17, et il’eur dit : « Prenez garde à vous-mêmes et à tout le troupeau sur lequel le Saint-Esprit vous a établis évêques pour paître l’Église de Dieu (var. : du Seigneur), qu’il s’est acquise par son propre sang », ꝟ. 28. Les « presbytres « d’Éphèse sont donc établis « évêques » pour gouverner l’Église de Dieu. Enfin, dans Phil., i, 1 les « évêques » sont énumérés immédiatement avant les diacres et il n’est pas question des « presbytres ». En rapprochant ces divers passages, on se pose une double question : 1. Quel rapport y a-t-il entre les « presbytres » et les « évêques » dans les Églises de saint Paul ? 2. Y trouvons-nous l’institution de l’épiscopat monarchique ?