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PAUL (SAINT). LE CHRIST JÉSUS


son empire. Dès son incarnation, il a affirmé sa victoire en prenant cette « chair sans péché » ; mais il a triomphé du péché en faveur des hommes par son œuvre rédemptrice. Il a substitué, pour le chrétien, la

loi de l’Esprit de vie » à « la loi du péché et de la mort ».

Ainsi, le chrétien n’est plus dans la chair, mais dans l’Esprit ; il ne vit plus de la vie de la chair, mais de la vie de l’Esprit. Son esprit, ainsi renouvelé par l’action divine, est le siège d’une nouvelle vie qui rejaillit sur tout son être. Mais tout cela se réalise à une condition, c’est que l’Esprit de Dieu « habite » dans le fidèle. v. 9 ; que celui-ci possède l’Esprit du Christ, c’est-à-dire l’Esprit de Dieu, l’Esprit Saint, qui vient dans l’âme par l’union au Christ.

Le chrétien justifié risquerait encore de suivre la voie de la chair, décrite ꝟ. 5-8 ; cf. Gal., v, 18-21 ; mais, dans ce cas, il ne pourrait plaire à Dieu ; l’Esprit-Saint n’habiterait plus en lui ; il n’appartiendrait pas au Christ, ꝟ. 9. Sa seule voie est celle de l’Esprit avec ses merveilleux aboutissants ; cf. Gal., v, 22-26.

C’est d’abord la garantie de la résurrection : « Si l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus des morts habite en nous, celui qui a ressuscité Jésus des morts vivifiera également nos corps mortels par son Esprit qui habite en nous. » viii, 11. Puis c’est la qualité de /Us de Dieu, d’héritiers de Dieu et de cohéritiers du Christ, dans sa gloire ; à condition, toutefois, de participer à ses souffrances, vin, 14-17.

Telle est l’espérance qui doit soutenir constamment le chrétien, car « les souffrances du temps présent ne sont point en proportion avec la gloire qui doit être manifestée en nous » ; rien ne doit être jugé trop pénible de ce qui nous permet d’arriver à la gloire ; cf. II Cor., iv, 17.

Cette gloire, la création y aspire ; nous l’attendons en gémissant ; l’Esprit en est le gage, car il prie en nous et pour nous. D’ailleurs, ceux que Dieu a connus d’avance, il les a aussi prédestinés « à être conformes à l’image de son Fils ; or, ceux qu’il a prédestinés il les a aussi appelés ; et ceux qu’il a appelés, il les a aussi justifiés ; et ceux qu’il a justifiés il les a aussi glorifiés », ꝟ. 29-30. Le plan divin revêt ainsi un caractère de certitude qui est bien fait pour soutenir l’espérance. D’ailleurs, l’espérance est ferme car elle est fondée sur la rédemption : rien ne pourra arracher le chrétien a l’amour de Dieu, dans le ChristJésus, viii, 31-39.

Dans les c. vi-vm de l’épître aux Romains, on remarque une alternance constante d’exposé doctrinal et d’exhortation. Ce procédé, habituel dans saint Paul, est peut-être encore plus frappant ici. En elîet, le but de l’Apôtre est avant tout de promouvoir la vie chrétienne. Cette vie que l’homme ne pouvait réaliser en dehors du Christ, il la vit maintenant par l’Esprit, s’il est justifié, s’il est « dans le Christ ».

Ce que l’on appelle à juste titre la mystique de saint Paul, bien que le mot [xucruxôç et l’expression Ta ÎX’jaTtxà ne se rencontrent jamais dans les épîtres (on trouve seulement une fois le verbe p.ueïa00u, Phil., iv, 12, et 21 fois le mot (xuarr) piov, mais non dans le sens de rite d’initiation), n’est pas l’exposé abstrait d’une doctrine. C’est un programme de vie religieuse et morale sous l’influence de l’action surnaturelle de .Dieu ; mais dont l’exécution dépend aussi de la volonté de l’homme. Là rien de magique ni de mécanique ; l’élément moral est au premier plan. La « chair » est vaincue, mais non entièrement supprimée. Elle peut donc s’opposer encore à l’esprit ; mais, après la justification, l’homme est dans d’excellentes conditions pour soutenir la lutte : il n’a qu’à suivre l’impulsion de l’Esprit-Saint et se laisser conduire par lui.

Être uni au Christ ; suivre l’Esprit de Dieu éclairant et transformant l’esprit de l’homme ; vivre d’une vie

spirituelle et divine ; éviter les tendances de la chair, hostiles à Dieu », cf. Gal., v, 20-21 ; se soumettre à sa volonté pour lui plaire et s’assurer ainsi une vie future surnaturelle, analogue a celle du Christ ressuscite : l’on n’a rien pensé dans toute l’antiquité ayant une si haute portée morale. On chercherait vainement dans les « mystères » du paganisme, une pareille force capable de transformer l’homme, de l’élever au-dessus de lui-même, de l’établir dans une sphère de paix et de satisfaction morale, de lui communiquer enfin une énergie capable de diriger toute sa vie vers une fin supérieure à sa nature.

A la bibliographie de l’article Justification (La doctrine de saint Paul), t. viii, col. 2076, ajouter les ouvrages suivants :

l u Catholiques. —.1. Wieser, Pauli apostoli doctrina de justificatione ex flde sine operibus et ex fide opérante, Trente, 1874 ; Al. Schâfer, Erkliirung des Brief es an die Ramer, Munster-en-V., 189t ; R. Cornely, Coinmentarius in S. Pauli apost. epistolum ad Bomanos, Paris, 1896 ; B. Dartmann, .S’( Paulus und St Jucobus iiber die Bechtfertigung, dans BiblischeSludien, t. ii, fasc. 1, Fribourg-en-B., 1897 ; A. Rademacher. Di’e iibernuturtiche Lebensordnung nach der paulinischen und der johanneischen Théologie, Fribourg-en-B., 1903 ; E. Tobac, Le problème de la justification dans saint Paul, Louvain, 1908, abondante bibliographie ; article Romains (Êpltre aux), dans le Dictionnaire de la Bible, t. v, col. 1162-1176, Paris, 1912 ; M.-J. Lagrange, Épttre aux Romains, Paris, 1916, 1922 ; J. Sickenberger, An die Borner, dans Die heilige Schri/t des N. T., Bonn, 1921 ; J. Freundorfer, Erbsiinde und Erbtod beim Apostel Paulus, dsMsNeutl.Abhandlungen, t. xiii, fasc. 1-2, Munster-en-W., 1920 ; A.-W. Wickenhauser, Die Christusmgstik des heiligen Paulus, Munster-en-W., 1928 ; A. d’Alès et J. Coppens, article Baptême, dans le Supplément du Dictionnaire de lu Bible, Paris, 1928, abondante bibliographie.

2°.Von catholiques. — B. Weiss, Der Brief an die Borner, dans Kritisch-exegelischer Kommentar iiber das N. T., 9e éd., Gœttingue, 1899 ; Lipsius, An die Rômer, dans H andKommentar zum N. T. de H.-.J. Holtzmann, Fribourgen-Brisgau, 1892 ; A. Deissmann, Die neutestamentlkhe Formel « in Christo Jesu », Marbourg, 1892 ; H.-F. Nôsgen, Der Schriflbeweis fur die evangelische Recht/ertigungslehre, Halle, 1901 ; E. von Dobschiitz, Sakrament und Symbol im Urchristentum, dans Theologische Siudien und Kritiken, t. lxxviii, 1905, p. 1 sq. ; H. Lietzinann, An die Borner, dans Handbuch zum N. T., Tubingue, 1906, 1928 ; W. Sanday et A.-C. Headlam, .4 eritical and exegelical eommentary on the epistle (o the Romans, dans International critieal eommentary, 5e éd., Edimbourg, 1908 ; A. Julieher, Der Brief an die Borner, dans Schriften des N. T. de J. Weiss, Gœttingue, 1908 ; Th. Zahn, Der Brief des Paulus an die Borner, Leipzig, 1910, 1923 ; Heitmùller, Taufe und Abendmahl im Urchristentum, Tubingue, 1911 ; E. Kuhl, Der Brief des Paulus an die Romer, Leipzig, 1913.

VIII. Les épîtres de la captivité : i.a personne

ET LA DIGNITÉ DU CHRIST. SON RÔLE DANS LA CRÉA-TION et dans l’Église. — 1° Le Christ Jésus » en la forme de Dieu ». 2° Le Christ « image de Dieu », « premier-né de toute créature », agent de création, lien des êtres. 3° La « connaissance » de Dieu et la conception du salut. 4° Le Christ « tête de l’Église » ; le « plérôme ». 5° Le « mystère » du Christ.

Les épîtres de la captivité n’ont point le même caractère que les grandes épîtres. Elles s’adressent à des milieux différents et répondent à des besoins nouveaux. Avec elle », la révélation chrétienne reçoit sur plus d’un point des précisions, ou s’enrichit de notions nouvelles principalement sur la christologie et la notion de l’Église, corps mystique du Christ.

Dans l’épître aux Philippiens, saint Paul présente le Christ avec les prérogatives de la nature divine. Appartenant à cette nature divine, il a fait un abandon momentané de sa dignité, par son incarnation et sa mort. Mais, en retour, il a été élevé au plus haut des cieux ; il domine les « êtres supraterrestres, terrestres et infernaux » et il a reçu un nom incommunicable