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PAUL (SAINT). LA RESURRECTION


tion du Christ au-dessus de toutes choses, cf. Eph., i, 21, et son triomphe sur la mort. Or, la mort est le fruit du péché, Rom., v, 12 ; vi, 23, cꝟ. 12 sq. Pour triompher de la mort, le Christ devait donc abattre le péché avec tous ses auxiliaires, toutes les puissances du mal : êtres réels appartenant au monde des esprits, êtres moraux ou causes psychologiques personnifiées ; en un mot toutes les causes du mal, responsables de la déchéance et de la mort de l’humanité. C’est pourquoi l’Apôtre ajoute, ꝟ. 26 : « L’ennemi qui sera détruit le dernier, c’est la mort. » Cf. Col., ii, 13-15.

Ainsi nous voyons le Christ jouer son rôle. Il est présenté comme chef militant chargé d’établir le règne de Dieu. Toutes choses lui sont soumises, excepté celui qui lui a tout soumis, c’est-à-dire Dieu. Une fois ce rôle de chef militant terminé, « le Fils lui-même sera soumis à celui qui lui atout assujetti, afin que Dieu soit tout en tous ». C’est-à-dire ayant accompli son rôle de Messie, il est, comme Verbe incarné, soumis à Dieu à cause de sa nature humaine. Il est « prémices des ressuscites » ; comme homme, il fait partie des élus dont il est le chef, et de l’Église qui est soumise à Dieu. Mais cela ne constitue nullement une infériorité, car il est, lui aussi, chef du nouveau royaume céleste ainsi constitué, Eph., i, 8-11. Ce royaume est à la fois le « royaume de Dieu » et le « royaume de son Fils », Col., i, 13, le « royaume du Christ et de Dieu ». Eph., v, 5. Le développement, xv, 24-28, mentionnant la lutte et le triomphe du Christ sur ses ennemis est tout différent des tableaux d’apocalypses décrivant les luttes du Messie. Tout se passe dans le domaine moral et religieux, non dans le domaine politique ou historique. Là, comme dans le tableau de l’antéchrist, nous retrouvons la marque du génie paulinien.

2. Possibilité et mode de la résurrection expliqués par des analogies naturelles. — Saint Paul connaissait les objections courantes que l’on faisait, dans les milieux hellénistes, à la’doctrine de la résurrection. Comment le corps, mis en terre et corrompu, pouvait-il revivre ? Devait-on concevoir le corps ressuscité soumis aux mêmes lois et aux mêmes infirmités que le corps actuel ? Ces objections, que les sadducéens avaient déjà opposées à la doctrine du Christ, Matth., xxii, 30, l’Apôtre les avait sans doute maintes fois entendues chez les Grecs, pendant ses missions, et peut-être à Corinthe même. En tout cas, il avait appris qu’elles avaient cours chez les Corinthiens et constituaient un danger sérieux pour la foi. Il y répond dans I Cor., xv, 35-58, en exposant la possibilité et le mode de la résurrection. « Comment les morts ressuscitent-ils ? Et avec quel corps viennent-ils ? », t. 35, voilà les deux points qu’il s’agit d’éclairer. D’abord, fait observer l’Apôtre, la semence que l’on jette dans la terre et qui se décompose ne sort-elle pas de terre avec un corps nouveau 1 « Dieu lui donne un corps à son gré », c’est-à-dire comme il l’a voulu ou déterminé selon la loi des espèces ; « et à chaque semence il donne le corps qui lui est propre » ; et, ainsi, le nouveau corps produit par chaque sorte de semence a sa nature propre.

Cette variété de « corps » que l’on observe chez les plantes et qui est le résultat de l’action divine, on la retrouve chez l’homme et les animaux. « Toute chair n’est pas la même chair : autre est la chair des hommes, autre celle des quadrupèdes, autre celle des oiseaux, autre celle des poissons. » ꝟ. 39. Ainsi le règne animal fournit les mêmes enseignements que le règne végétal. Si on s’élève encore plus haut, on constate que « l’éclat des corps célestes », c’est-à-dire appartenant au monde céleste, « est d’une autre, éfspa, nature que celui des corps terrestres ». On doit en conclure que la constitution de ces corps n’est pas la même. Bien plus, il y a des différences même entre les corps célestes : « Autre,

DICT. DE THÉOL. CATHOL.

  1. XXy), est l’éclat du soleil, autre l’éclat de la lune, et

autre l’éclat des étoiles ; même une étoile diffère en clarté d’une autre étoile », ꝟ. 40-41.

Ainsi, dans l’univers, du bas jusqu’au sommet de l’échelle des êtres, la puissance de Dieu a établi une variété indéfinie de natures corporelles, adaptées à leur fin et à leur milieu. Comment douter qu’elle ne puisse, au moment de la résurrection, reconstituer le corps de l’homme pour l’adapter aux conditions d’une vie immortelle ? Dieu qui a créé des êtres adaptés les uns au monde terrestre, les autres au monde céleste, saura former aussi un corps qui convienne à la vie glorieuse de l’homme ressuscité.

Ainsi est écartée l’objection de l’impossibilité de la résurrection. Mais « avec quel corps les morts ressuscitent-ils ? » L’Apôtre répond à cette question en exposant le mode de la résurrection et les qualités des corps ressuscites. « Semé dans la corruption, le corps ressuscite incorruptible, èv àcpOapala », ꝟ. 42. Ainsi, le corps est affranchi de ce que l’Apôtre appelle, Rom., viii, 21, « la servitude de la corruption » ; il est délivré des passions mauvaises ; il acquiert l’impassibilité. Cf. Apoc, vu, 16. « Semé dans l’ignominie, le corps ressuscite glorieux, èv S0Ç7) », ꝟ. 43 : sujet aux infirmités en cette vie et à la corruption après la mort, le corps inspire le dégoût ou l’horreur ; mais à la résurrection, il devient « glorieux », c’est-à-dire brillant ou lumineux : erunt enim corpora sanctorum clara et fulgida, juxta illud : « Fulgebunt justi sicut sol in regno Patris eorum » (Matth., xiii, 43), S. Thomas, h. L ; cf. Dan., xii, 3 ; Sap., iii, 7. La seconde qualité des corps ressuscites est donc la clarté.

Puis, « semé dans la faiblesse, il ressuscite plein de force, èv Suvàuei. ». Pendant cette vie, le corps se fatigue, ses forces sont limitées et variables ; il est un instrument imparfait au service de l’esprit dont il entrave souvent la force de penser. A la résurrection, il sera doué de force et d’agilité, il ne connaîtra plus la faiblesse et sera un instrument docile au service de l’esprit.

Enfin, le corps « semé corps animal, <jw(J.a (jm^ucov, ressuscitera corps spirituel, c&ia. 7rveuii.aTi.x6v t, ꝟ. 4-t. Ici, tyvx’h est le principe de vie végétative et animale, tandis que 7rve0[xa est le principe de vie spirituelle. A la résurrection, l’homme sera dégagé de la vie_ animale, vie naturelle terrestre, et aura comme principe de vie « l’esprit ». L’Apôtre ne prétend nullement qu’il y a en l’homme un principe de vie physique, qui meurt avec le corps et un principe de vie intellectuelle qui lui survit. Pour lui, il n’y a qu’un seul principe qui remplit cette double fonction. Mais, à la résurrection, la vie animale cessant, la vie du ressucité est tout entière sous l’influence de l’âme en tant que principe spirituel. Ce principe n’est autre que l’esprit de l’homme, sous l’action de l’Esprit de Dieu.

L’alliance de ces deux mots, aô(i « <J’u X tx ô v > devait produire sur des lecteurs grecs l’impression d’une contradiction dans les termes ; c’est pourquoi l’Apôtre explique comment il existe un « corps spirituel ». ꝟ. 45-50. « Le premier homme, Adam, a été fait âme vivante », c’est-à-dire être vivant ou psychique ; tandis que « le dernier Adam devient un esprit vivifiant ». « Le premier homme est de la terre (tiré de la terre, donc corruptible, terrestre) ; le second homme est du ciel. Tel est l’homme terrestre, tels sont aussi les hommes terrestres ; tel est l’homme céleste, tels sont aussi les hommes célestes. Et de même que nou>avons porté la ressemblance de l’homme terrestre, nous porterons aussi la ressemblance de l’homme céleste », ꝟ. 47-50.

Adam, tiré de la terre, était psychique en vertu de

T.

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