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PAUL (SAINT). LE CONCILE DE JÉRUSALEM


Paul trois ans plus tôt, c’est-à-dire en 32-34. Mais, si l’on compte les quatorze ans depuis la conversion, celle-ci se placera en l’an 35, 36, ou 37 au plus tard.

La date 35-37 pour la conversion de saint Paul est plus facile à concilier avec l’histoire générale ; car le roi Arétas ne fut maître de Damas que sous Caligula (37-41). Saint Paul n’a donc pu s’enfuir de Damas, « sous le roi Arétas », II Cor., xi, 33, qu’à partir de l’an 37, ou même 38. En comptant « trois » ans de la conversion à l’évasion.- — durant ces trois ans se place le séjour en Arabie, — on peut dater la conversion de l’an 35.

On le voit, le système qui compte les « quatorze ans » à partir de la conversion est le plus facile à accorder avec l’histoire générale.

Voici, d’après ce système, les dates essentielles plus ou moins approchées, des événements racontés dans l’épître.

Année 35. — Conversion, Act., ix, 1-22. Saint Paul pouvait avoir une trentaine d’années ; cf. Act., vu, 58 ; viii, 3 ; ix, 1-2.

Années 35-38. — Prédication à Damas ; — séjour en Arabie, Gal., i, 17 ; — retour à Damas. En tout, trois ans.

Année 38. — Évasion par le rempart, dans la corbeille, sous le roi Arétas, II Cor., xi, 33 ; — premier voyage à Jérusalem, Gal., i, 18 sq. ; — départ pour la Syrie et la Cilicie, Gal., i, 21.

Année 44. — Voyage à Jérusalem, avec Barnabe, pour porter un secours à l’occasion de la famine, Act., xi, 30 ; — retour à Antioche avec Marc, Act., xii, 25. Ce voyage n’est pas mentionné dans l’épître. Années 45-49. — Première mission, Act., xm-xiv ;

— saint Paul à Antioche, Act., xiv, 27 ; xv, 1 sq. Années 49-51. — Concile de Jérusalem, Act., xv, 1-29 ; Gal., ii, 1 sq.

Ce système suppose l’identité des voyages, Gal., ii, 1, avec Act., xv. Cette identité n’est pas acceptée par tous les exégètes ; mais elle paraît la solution la plus satisfaisante. En effet, il y a accord foncier entre les deux récits : Mêmes acteurs principaux, Paul et Barnabe venant d’Antioche, Pierre et Jacques représentant l’apostolat auprès des Juifs. Même question traitée, les judaïsants veulent imposer la circoncision aux païens convertis. Ont-ils raison, ou faut-il laisser aux païens convertis leur liberté en face de la Loi ? Mêmes discussions, quoique rapportées beaucoup plus longuement par les Actes. Même solution de principe, ne pas imposer aux « gentils » l’essentiel de la Loi. Les Actes mentionnent des réserves : on maintient certaines prescriptions pour éviter le scandale des faibles. Saint Paul n’en parle pas, car cela aurait pu affaiblir sa thèse aux yeux des Galates. Mais ces réserves visaient la communauté d’Antioche, où des judéo-chrétiens vivaient côte à côte avec les païens convertis. C’était la solution d’un cas particulier. Même récit de la mission de saint Paul chez les « gentils » et même approbation de son apostolat par les dirigeants de l’Église de Jérusalem ; par conséquent, même défaite des judaïsants.

Mais, lorsqu’on compare les deux récits, on y remarque une foule de divergences de détail, qui seraient de nature à faire impression, si l’on exigeait d’eux une concordance matérielle. Aussi plusieurs exégètes se refusent à voir dans ces deux documents le récit d’un même événement. La question reste libre et peut être librement discutée. Mais il convient d’apporter ici les remarques suivantes :

Les deux récits du premier voyage de saint Paul à Jérusalem, Gal., i, 18 sq., Act., ix, 26-30, diffèrent aussi sensiblement. Or, on explique ces divergences par le but et le caractère de chaque récit, sans essayer d’en faire deux événements différents. Il peut donc en

être de même pour les récits, Gal., ii, 1-10 ; Act, xv 1 sq., puisque les divergences entre les Actes et l’épître ne constituent point ici un cas particulier.

Le but et la tendance des deux récits ne sont évidemment pas les mêmes. Saint Luc, en faisant œuvre d’historien, s’applique à montrer l’accord fondamental des deux formes d’apostolat, celui de saint Paul et celui des autres apôtres. Tandis que saint Paul rétablit l’exactitude de certains faits travestis par les judaïsants à son préjudice. Jl veut montrer que l’on n’a rien changé à son évangile, après qu’il l’eut exposé aux dirigeants de l’Église-mère. Il s’attache donc surtout à exposer les faits en question, mais il ne raconte pas intégralement les événements. Il fait un plaidoyer en sa faveur, sans trahir la vérité, mais en présentant les choses de manière à faire impression sur les Galates. Ainsi, la différence des « genres littéraires » explique les divergences entre les deux récits, La plupart des objections tirées des détails du récit tombent d’elles-mêmes.

Mais on objecte, entre autres : Pourquoi saint Paul ne fait-il pas mention du décret des apôtres, Act., xv, 23 sq. ? Certains critiques radicaux en ont conclu que Paul ne l’avait pas connu, et que, par suite, ce décret n’était pas authentique, mais avait été ajouté plus tard pour faciliter les rapports entre païens convertis et judéo-chrétiens. C’est là une conjecture injustifiée. Saint Paul connaissait bien le décret. Au cours de son deuxième voyage, il en donne connaissance aux fidèles, les Actes l’indiquent clairement : « En passant par les villes, ils enseignaient aux fidèles à observer les décisions des apôtres et des anciens (cf. Act., xv, 23 : Les apôtres, les anciens et les frères, etc.) de Jérusalem. Et les Églises se fortifiaient dans la foi et croissaient de jour en jour. » Act., xvi, 4. Mais, dans sa lettre aux Galates, l’Apôtre ne juge pas utile de parler explicitement de ces décisions, à cause des prescriptions négatives qu’elles contenaient : s’abstenir des viandes offertes aux idoles, du sang, de la chair étouffée et de l’impureté. La mention de ces prescriptions, destinées à faciliter les rapports entre les judéo-chrétiens et les païens convertis dans les Églises où le premier élément était important, aurait paru, aux yeux de certains, affaiblir l’argumentation de l’Apôtre. Ce qui lui importait avant tout, c’était de justifier son apostolat et sa doctrine, en en montrant l’origine et en établissant que cet apostolat avait été approuvé par le concile même de Jérusalem.

Dans cette hypothèse, — celle de l’identité de Act., xv, 1 sq., et Gal., ii, 1-10, — l’épître n’aurait pu être écrite qu’après l’an 49-51, date du concile. Si l’on admettait, avec Weber, que l’épître a été composée avant le concile et que le voyage Gal., ii, 1, correspond à celui d’Act., xi, 29-30, on se heurterait à une difficulté chronologique presque insurmontable. La date de ce voyage serait, en effet, l’an 44, ou au plus tard 45. Si l’on date la conversion de « quatorze ans » plus tôt, on a l’an 30. Si on la date de dix-sept ans plus tôt, on a l’an 27. Or, ces deux dates paraissent inacceptables pour les raisons exposées plus haut.

3° Les preuves de V <. évangile paulinien ». — Après la conversion des Galates, des docteurs judaïsants leur avaient prêché la nécessité de la circoncision et de la Loi pour être sauvé. Ils présentaient saint Paul comme un nouveau converti qui n’avait point été le disciple immédiat de Jésus, qui n’enseignait point une doctrine authentique, mais qui laissait les païens dans l’ignorance du judaïsme pour les gagner plus facilement au Christ. A leurs yeux, sa doctrine par la foi au Christ sans les œuvres de la Loi, était imparfaite. Il fallait la corriger et la compléter. Gal., i, 6.

Les Galates étaient sur le point de se laisser entrai-