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    1. PAUL (SAINT)##


PAUL (SAINT). LE CONCILE DE JERUSALEM

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la révélation du Fils de Dieu, comprit que Jésus, le Christ ressuscité, donnait ce que les Juifs attendaient de la Loi. Il était source de justice, de grâce, de vie spirituelle et de sainteté ; en lui était la garantie de la résurrection. Rom., v, 20-21 ; vi, 1-14 ; viii, 3 sq. Son action salvifique s’étendait non seulement aux Juifs, dont il était le Messie, mais à tout homme sans distinction de race ou de nationalité, le plan divin de salut englobant tous les hommes. Dans une telle conception des choses, que devenait la Loi ? Elle n’avait plus de raison d’être, puisqu’on avait trouvé le remède aux maux dont elle n’avait pu guérir. Son rôle est donc terminé. Dans l’exécution du plan divin elle n’est plus, aux yeux de l’Apôtre, qu’un épisode ayant son commencement et sa fin. Avant k Loi, on était sauvé par « la foi » ; l’Écriture le prouve par l’histoire d’Abraham. Or, la Loi devait conduire au Christ. Ce rôle est maintenant achevé, puisque le Christ est venu. D’ailleurs, l’expérience a démontré qu’elle n’est principe d’aucune force morale ; elle se borne à imposer des commandements. Elle est donc source de péché. A l’égard du salut elle est devenue un obstacle qu’il faut surmonter, un fardeau dont il faut se débarrasser, un ennemi qu’il faut vaincre. Bonne en elle-même, puisqu’elle a rempli le rôle que la Providence lui avait assigné, elle appartient désormais au passé. L’universalisme, la conception morale et spirituelle de la religion avec Jésus-Christ comme centre, principe de vie nouvelle et garantie de salut, remplace maintenant la religion légale et le particularisme juif. 2° Le conflit ; solution de la question de principe au concile de Jérusalem. — 1. Le conflit. — Jésus était le Messie des Juifs. Or, comment un Messie juif pouvait-il être principe de salut autrement qu’en Israël ? Comment pouvait-il l’être en dehors de la Loi, à la pratique de laquelle avaient été liées les promesses ? Comment pouvait-on être juste sans observer le code de la justice ? Comment les païens pouvaient-ils bénéficier de cette grâce sans passer par Israël, c’est-à-dire sans se soumettre à la circoncision et à la pratique de la Loi ?

Telles étaient les questions que ne pouvait manquer de faire naître dans un esprit juif la doctrine prêchée par saint Paul dans ses missions chez les païens. Dès le commencement de son apostolat, peu de temps après sa conversion, les Juifs non convertis lui avaient fait une violente opposition, à Damas et à Jérusalem, Act., ix, 23, 29, comme plus tard à Thessalonique, Act., xvii, 5 sq. Ils le poursuivaient pour attenter à ses jours.

D’un autre côté, la fraction des nouveaux chrétiens restés pharisiens par tempérament, le combattait également, d’une façon moins violente, mais plus sournoise, en exerçant une sorte de contre-apostolat pour modifier sa doctrine et maintenir ce qu’elle regardait comme les droits imprescriptibles de la Loi. Un conflit existait déjà à l’état latent entre ces judaïsants et l’Apôtre. Il éclata à Antioche, vers l’an 50, et donna lieu au concile de Jérusalem, où fut traitée la question de principe : rapports entre la Loi et le salut des païens. Puis, les menées des judaïsants provoquèrent, dans les Églises de Galatie, une crise qui obligea saint Paul à exposer, dans l’épître aux Galates, l’origine divine et la légitimité de sa doctrine, c’est-à-dire : le « salut par l’évangile de Jésus-Christ sans la Loi ».

2. Le concile de Jérusalem.

« Quatorze ans plus tard », Gal., ii, 1, saint Paul monta de nouveau à Jérusalem avec Barnabe et Tite. — Le point de départ de cette note chronologique reste incertain. Faut-il entendre « quatorze ans » après sa conversion ou après son premier voyage à Jérusalem ? A ne considérer que le texte, les deux manières peuvent se soutenir avec

à peu près autant de vraisemblance. Dans les deux cas, saint Paul fait observer qu’il prêchait l’Évangile depuis de longues années, lorsqu’il résolut d’aller à Jérusalem, traiter la question de principe relative à l’admission des « gentils » à la foi chrétienne.

Il monta à Jérusalem à la suite d’une révélation, Gal., ii, 2, ce qui exclut toute idée de contrainte ou d’invitation officielle. Il n’éprouvait lui-même nullement le besoin de faire cette démarche, car il n’avait aucun doute sur la légitimité de ses positions. Mais il agissait pour couper court aux récriminations des prédicateurs judaïsants ; cf. Act., xv, ’1 sq. Ces opposants étaient venus de Judée, et ils avaient peut-être plus d’un partisan parmi les judéo-chrétiens d’Antioche. Ils enseignaient « aux frères » cette doctrine : « Si vous n’êtes circoncis selon la loi de Moïse, vous ne pouvez pas être sauvés. » Act., xv, 1. Cette thèse donna lieu à une vive discussion, à la suite de laquelle il fut décidé que Paul et Barnabe iraient à Jérusalem traiter la question avec les apôtres et les « anciens ». Saint Paul voulait exposer son œuvre et faire constater son accord de principe avec les apôtres. Il enlèverait ainsi leurs armes à ses adversaires et leur montrerait qu’il ne court, ni n’a couru en vain ». Gal., ii, 12. Encore fallut-il une inspiration divine pour le décider à faire cette démarche.

A Jérusalem il exposa, sans doute d’abord aux fidèles, puis, en particulier, aux « notables », c’est-à-dire aux apôtres, l’évangile prêché par lui aux païens. Mais survinrent de « faux frères », pour « attenter à sa liberté ». Il fut donc l’objet de vives attaques, non de la part des « notables », les apôtres, mais de la part d’un groupe de judaïsants restés pharisiens fanatiques. S’il ne s’agit pas des mêmes personnages que nous avons vus à Antioche et qui avaient provoqué la conférence, il s’agit du moins de judaïsants professant les mêmes doctrines et appartenant au même parti d’opposition. L’Apôtre leur tint tête et ne leur céda en rien. Gal., ii, 3-5. Voir les variantes du texte dans Von Soden, Die Schriften des Neuen Testaments, IIe, pari. h. t., et les discussions dans J.-M. Lagrange, Épître auxGalates, 1918, p. 28-31. Il leur résista, afin de sauvegarder la « vérité de l’Évangile », pour le bien des Galates. La preuve qu’il n’a cédé en rien aux judaïsants, c’est que Tite, qui était grec, c’est-à-dire païen d’origine, et en outre compagnon et collaborateur de l’Apôtre, ne fut pas même contraint à la circoncision. Dans la situation présente, son cas devenait une affaire de principe : la question de l’obligation fondamentale de la Loi, celle de la circoncision, se trouvait résolue dans le sens de saint Paul. Quant aux « notables », ils « n’ajoutèrent rien » à l’exposé de l’Apôtre, dans la ligne de la question traitée, par conséquent n’imposèrent aucune obligation au sujet des observances légales. Ils reconnurent sa mission d’apôtre des « gentils » au même titre que celle de Pierre, apôtre « des circoncis » : l’une et l’autre venant de Dieu. Jacques, Céphas (Pierre) et Jean lui « donnèrent la main, ainsi qu’à Barnabe, en signe de communion ».

La divergence entre le récit de l’épître aux Galates, c. ii, et celui des Actes, c. xv, est assez sensible. Elle constitue une difficulté classique dans l’exégèse du Nouveau Testament. Un autre voyage de saint Paul à Jérusalem est mentionné, Act., xi, 29-30. Auquel des deux voyages mentionnés, Act., xi, 29-30, et xv, 1 sq., correspond celui indiqué dans l’épître ii, 1 « quatorze ans après… » ? La majorité des exégètes modernes l’identifient avec le voyage raconté, Act., xv, à l’occasion du concile de Jérusalem, et le datent de l’an 49, 50, ou 51 au plus tard.

Si l’on compte les quatorze ans en partant du premier voyage mentionné dans l’épître, ce premier voyage devrait se placer en l’an 35-37, et la conversion de saint