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ORDRE. RITE PRIMITIF, TEXTES LITURGIQUES


nous avons rapportées. La prière de l’ordination épiscopale se caractérise surtout par un exorde développé dans lequel on rappelle la mission du Christ et des apôtres, et le ministère des évêques prédécesseurs de l'évêque ordonné. Dans l'épiclèse finale, on implore le Saint-Esprit et l’on demande que l'évoque soit pour son peuple un grand saint et un pasteur accompli. Voir l'édition de G. Wobbermin, Allchristliche liturgisclie Sliicke, dans Texte und Untersuchungen, t. xvii, fasc. 3 b, Leipzig, 1898, ou Funk, Didasc. et Const. ap., t. ii, p. 188-190.

Ainsi se trouve mise en relief l’importance de l’imposition des mains dans la collation des ordres sacrés. Elle est d’ailleurs consaciée par les conciles datant de cette époque, et dont les décrets, par leurs allusions bièves, semblent supposer l’universelle diffusion du rite. Concile d’Ancyre (314), can. 10, 13 ; HefeleLeclercq, Histoire des conciles, t. i, p. 312, 315 ; cf. ici, 1. 1, col. 1174 ; concile de Nicée (325), can. 4, 9, 10 ; Hefele-Leclercq, t. i, p. 539, 587, 588, et ici, t. xi, col. 410, 412 ; concile d’Antioche (341), can. 10, 17, 18, 19 ; Hefele-Leclercq, t. i, p. 717, 719, 720 ; texte grec dans Lauchert, Die Kanonen des altkirchlichen Concilier !, p. 32, 34 ; concile de Chalcédoine (451), can. 2, 6, 25 ; Hefele-Leclercq, t. ii, p. 772, 787, 810. En Occident, il suffira de citer les Statuta Ecclesiæ antiqua, qu’on donne comme les canons d’un quatrième concile de Carthage (398) et qui, en réalité, sont une collection arlésienne du début du vie siècle. Nous y reviendrons plus loin.

En finissant de jeter ce coup d’ceil sur l’ancienne discipline de l'Église, il sera bon de remarquer, avec J. Tixeront, « l’ordre dans lequel nos plus anciens documents, Tradition apostolique (versions éthiopienne et arabe) traitent des membres de la hiérarchie inférieure aux diacres… Cet ordre est le suivant : confesseurs, veuves, lecteurs, vierges, sous-diacres, guérisseurs et prophètes. Ce détail seul suffit à montrer la haute antiquité de notre Tradition. Dès le rve siècle, les confesseurs disparaîtront ; plus tôt encore les sous-diacies prendront le pas sur les lecteurs. Les exorcistes, que VEpitome et les Constitutions apostoliques appellent de ce nom (èrropxicrr/jç) ne sont encore que des chrétiens qui ont reçu le don de guérir, donum sanalionis. On ne parle pas des acolytes. La hiérarchie, telle que la manifeste la lettre du pape Corneille à Fabius d’Antioche (251) (voir ci-dessus, col. 1232) n’est pas encore en Occident entièrement ni partout reconnue. » L’ordre et les ordinations, p. 125-126.

c) Enseignement palristique. — Ces prescriptions de la liturgie nous font comprendre l’enseignement que, sous une forme parfois très brève, nous livrent les Pères des ive et Ve siècles touchant le rite de l’ordination.

Ainsi Aphraate mentionne l’imposition des mains de l’ordre, Démonstrations, xiv, 25 ; les trois ordres hiérarchiques sont l'épiscopat, le presbytérat et le diaconat, xiv, 1 ; Patrol. syr., 1. 1, col. 573, 633. — Saint Éjihrem admire la puissance sacerdotale, qui daigne habiter en nous par l’imposition des mains des saints pontifes. Serin, de sacerdotio. Il enseigne que dans l'Église existe une hiérarchie composée d'évêques, de piètres et de diacres, Carmina Nisibena, xxi, 5 ; ils ont reçu le Saint-Esprit, Œuvres, éd. Lamy, t. ii, p. 366. — Saint Basile parle fréquemment dans ses épîtres de l’ordination et affirme toujours qu’elle est conférée par l’imposition des mains. Il reprend avec force ses chorévêques qui pensent n'être point simoniaques pour accepter de l’argent [xezà tyjv "/ s '-P°~ tovîocv : accepter, c’est toujours accepter, Episl., lui (al. lxxyi), P. G., t. xxxii, col. 397. Dans la première lettre canonique à Amphiloque, quelles que soient

les réserves à faire sur certaines assertions, il apparaît clairement que Basile tient l’imposition des mains comme le rite transmetteur du pouvoir sacerdotal et épiscopal : roxpà tcôv TraTÉpwv ecryov xàç XS ! poTOv[aç, xat Stà ttjç È7u8éerscùç tov -/eipôiv aùrcôv elyjjv tô }(âpia[i.a tô 7tvsu ;.LaTi.xôv. Epist., clxxxviii, ibid., col. 668. — Chez Timothée d' Alexandrie, l’expression ys !.poTov7)6svTeç ou }(sipoTovoûjjievoi est purement synonyme d’ordonnés ou de conférant les ordres, Responsa canonica, q. xxi, cf. xxiii, dans Pitra, Juris eccles. Grxcorum hist. et monum., t. i, Rome, 1864, p. 643. — Saint Épiphane, rappelant la distinction essentielle entre l'évêque et le simple prêtre, déclare que celui-là ne peut établir un prêtre, qui n’a pas le droit de le créer par l’imposition des mains, (ii} s^ovxa p(etpo6sa£av xoù /sipoT&vsTv. Hser., lxxv, 4, P. G., t. xlii, col. 508. — Théophile d’Alexandrie signale aussi que l’ordination se fait, dans l'église, en présence et du consentement de tous les prêtres, par la ^eipoxovîa de l'évêque. Commonitorium, can. 6, Pitra, op. cit., p. 647 ; P. G., t. lxv, col. 39. — Pareillement saint Jean Chri/sostome parle de l’imposition des mains comme du rite de l’ordination ; mais il fait mention expresse de la prière qui l’accompagne, se référant à- Act., vi, 6 ; In Act. apost., hom. xiv, 3, P. G., t. lx, col. 116 ; cf. In epist. ad Phil., hom. i, 1, t. xlii, col. 183.

Dans l'Église latine, même doctrine. — Saint Innocent I" écrit aux évêques de Macédoine pour réprouver les ordinations faites par des hérétiques. Sans en nier la validité, il déclare qu’ils n’ont pu communiquer que la damnation par une coupable imposition des mains, Epist. xvii (al. xxii), c. 3, P. L., t. xx, col. 530. — Dans son commentaire sur Isaïe, saint Jérôme identifie pleinement l’ordination et l’imposition des mains, mais il fait mention expresse de la prière qui accompagne le rite : ordinatio clericorum quæ non solum ad imprecationem vocts, sed ad impositionem impletur manus. C. lviii, P. L., t. xxiv, col. 569. — De même saint Augustin unit l’imposition des mains et la prière sacramentelle. Cf. Epist., isKxviii, (al. cxxxvii), P. L., t. xxxiii, col. 268 ; De baptismo, t. V, c. xx, t. xliii, col. 190 ; De Trinitate, t. XV, c. xxvi, t. xlii, col. 1906. Mais déjà des spéculations dogmatiques et théologiques se mêlent à l’assertion traditionnelle du rite.

Une double conclusion s’impose.

La première conclusion concerne l’universalité du rite de l’imposition des mains comme rite d’ordination. Nous avons vu que les abus qui parfois s'étaient introduits (par exemple, les confesseurs admis comme prêtres sans ordination ; l’imposition des mains conférée aux diaconesses) ont été promptement réprimées. Le silence de certains documents ne prouve rien non plus ; il s’explique simplement par le fait de l’existence incontestée du rite. Nous l’avons déjà constaté à propos des Constitutions apostoliques, col. 1248 ; il faut en dire autant de saint Cyprien, rappelant les cérémonies de l’ordination du pape saint Corneille, sans faire mémoire de l’imposition des mains, Epist., lv, 8, édit. Hartel, t. ii, p. 629.

Une deuxième conclusion est celle-là même qu’a formulée le cardinal van Rossum, à savoir qu’au ive siècle soit des enseignements des Pères, soit des documents liturgiques, soit des faits historiques, il résulte que le rite de l’ordination est uniquement l’imposition des mains et la prière qui y est jointe. On ne rencontre aucune mention des rites plus récents qui se sont introduits postérieurement dans es sacramentaires. S’il se rencontre déjà quelque rite accessoire (v. g. dans les Const. apost., l’imposition du livre des évangiles à l'évêque), c’est uniquement