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PATRIARCATS MINEURS


saurait être plus clair sur la vraie nature des patriarcats orthodoxes modernes.

D’autres autocéphalies se sont constituées aux dépens de Constantinople. Mais elles ne sont point administrées actuellement par des patriarches. La Bulgarie a eu jadis son et même ses patriarches. Cf. art. Bulgarie. Mais, actuellement, elle est constituée en exarchat, non point en patriarcat ; cf. Janin, op. cit., p. 270-271. L’Église de Grèce n’est point non plus administrée par un patriarche. Nous pouvons donc passer sous silence ces autocéphalies qui se sont formées aux dépens de Constantinople, mais n’ont point adopté la forme patriarcale dans leur gouvernement. Si maintenant nous voulons faire la récapitulation des patriarcats orientaux séparés de l’Église romaine, nous arriverons à ce tableau impressionnant :

1. Patriarcat œcuménique de Constantinople.

2. Patriarcats melchites orthodoxes d’Antioche, de Jérusalem, d’Alexandrie.

3. Patriarcat russe (qui existe au moins encore de jure).

4. Patriarcat serbe d’Ipek.

5. Patriarcat roumain.

6. Patriarcat jacobite d’Antioche.

7. Patriarcat copte monophysite d’Alexandrie.

8. Le catholicat ou patriarcat de Géorgie, rétabli depuis que les Géorgiens ont reconstitué leur Église nationale aux dépens de Moscou.

Et nous ne parlons que des patriarches dont l’origine se rattache plus ou moins directement aux quatre grands sièges orientaux. Nous parlerons plus loin des patriarcats arménien et chaldéen. Où en est, même dans l’Église orthodoxe, l’institution réputée divine de la pentarchie ? Combien l’institution s’est compliquée depuis Balsamon ! Il ne pourrait plus parler des cinq têtes de l’Église ; il devrait en reconnaître un nombre plus considérable, rien que dans la communauté orthodoxe. D’ailleurs c’est justement en vertu du principe des autocéphalies, ainsi multipliées, que les théologiens orthodoxes modernes repoussent la conception pentarchique ancienne, Jugie, t. iv, p. 459-461 ; et le phylétisme orthodoxe, tout autant que la conception synodale du gouvernement ecclésiastique, a été fatale à la pentarchie réputée de droit divin.

IV. Patriarcats mineurs. — Nous rangeons sous cette dénomination tous les patriarcats qui ne sont point à proprement parler la continuation des cinq grands patriarcats anciens : Rome, Constantinople, Alexandrie, Antioche, Jérusalem.

Patriarcats latins.

1. Patriarcats latins d’Orient.

— Nous avons déjà dit un mot de leur fondation. On trouvera les indications historiques aux articles Constantinople (Église de), Jérusalem, Alexandrie, Antioche. De ces patriarcats d’origine relativement récente (les Croisades), et pour cela rangés sous la dénomination : patriarcats mineurs, trois, ceux d’Antioche, de Constantinople, d’Alexandrie, ne sont plus résidentiels. Ce ne sont que des titres, portés d’ordinaire par des prélats séjournant à Rome. Ces patriarches latins titulaires n’ont point le privilège du pallium. Benoît XIV, De synodo diœcesana, t. XIII, c. xv, n. 17. Sur leurs prérogatives honorifiques, on pourra consulter WernzVidal, Jus canonicum, t. ii, Rome, 1928, p. 544 et 561, où l’on trouvera signalés les textes du Corpus Juris, déterminant les privilèges des patriarches en question. Cf. aussi Thomassin, op. cit., part. I, t. I, c. XXVI.

Le patriarcat latin de Jérusalem est redevenu effectif depuis 1847. Bulle Nulla celebrior, dans Jus pontificum de propaganda fide, édit. de Martinis, t. vi a, p. 40-44. Pie IX trouvant que les obstacles qui avaient interrompu la résidence du patriarche latin de Jérusa ; lem n’existent plus, la rend de nouveau obligatoire :

Auctoritaie omnipotent is Dei et SS. apostolorum Pétri et Pauli ac nostra, restiluimus Hierosolymis exercilium jurisdictionis latini patriarchæ eumque poslhac rcsi dendi obliqationi ut olim obnoxium /ore declaramus. Loc. cit. Les limites du patriarcat sont, d’après la bulle, celles de la Custodie. Actuellement, le patriarcat comprend la Palestine (avec la Transjordanie) et l’île de Chypre. Le patriarche n’a pas encore de sulïragants et la bulle note que la constitution d’évèchés sulïragants est réservée à Rome. Le patriarche porte le pallium. A ce patriarche s’appliquent les paroles de WernzVidal, op. cit., p. 537 : alii sunt vera lurisdictione instructi quæ lamen haud raro potestatem quamdam metropolitanam vel diœcesanain non excedit. En effet, le patriarche latin de Jérusalem n’a aucune juridiction sur d’autres évêques.

2. Patriarcats latins d’Occident.

a) Patriarcat de Venise. — Ses origines se rattachent à la controverse sur les Trois-Chapitres. Après la condamnation portée contre les Trois-Chapitres par le Ve concile œcuménique (553) et l’approbation par le pape Vigile de ce concile, le diacre Pelage s’était levé contre les concessions du pontife versatile. Peut-être cette opposition n’était-elle pas très sincère. En tous cas, Vigile mort (555), Pelage devenu pape par la volonté de Justinien, changea d’attitude et condamna ce que Vigile avait condamné (16 avril 556). Mais des évêques occidentaux protestèrent contre la condamnation des Trois-Chapitres et l’attitude du nouveau pape. Dans la Haute Italie, les métropolitains d’Aquilée et de Milan avec leurs sulïragants rompirent toute relation avec l’Église romaine. En 557, le titulaire d’Aquilée, Macédonius, mourut ; son successeur Paulin persévéra dans lopposition à Pelage et commença dès lors à s’attribuer le titre de patriarche ; en effet, dans une lettre datant de cette époque, écrite par le pape Pelage au patrice Jean, nous lisons ces lignes : Pela utrum aliquando in ipsis generalibus quas veneramur synodis, vel inlerjueril quispiam Venetiarum ut ipsi pulant atque Hislriæ patriarcha, vel legatos aliquando direxerit. Jaffé, Regestu pont, rom., n. 983. Lors de l’invasion lombarde, le patriarche d’Aquilée, Paulin, se réfugia dans l’île de Grado, où séjournèrent également ses successeurs, Probinus, Hélie, Sévère, tous en rupture avec Rome. Sévère mou rut à Grado en 607 ; Candidien, qui le remplaça, était personnellement en communion avec Rome ; mais il restait toujours un parti opposé à l’union et, après l’élection de Candidien à Grado, « les plus obstinés repassèrent sur le continent et sous la protection du duc de Frioul, Gisulf, acclamèrent dans les ruines d’Aquilée un moine appelé Jean. A partir de ce moment, il y eut deux patriarches d’Aquilée, celui de terre ferme, qui, Aquilée étant devenue inhabitable, résida successivement à Cornions, Cividale, Udine et celui de Grado, qui depuis le vine siècle réside à Venise. » L. Duchesne, L’Église au VIe siècle, Paris, 1925, p. 247. Lorsque la division du siège métropolitain d’Aquilée se fut produite à l’élection de Candidien, comme le métropolitain schismatique Jean continuait de s’arroger le titre de patriarche qu’avaient porté ses prédécesseurs, « les papes accordèrent aux évêques de Grado le titre de patriarche, pour que ceux qui avaient fait leur paix avec Rome ne parussent pas inférieurs à leurs collègues schismatiques. Il y eut donc deux patriarcats dans la HauteItalie : Aquilée-Grado, souvent appelé Grado, patriarcat des catholiques unis, c-t Aquilée, patriarcat des schismatiquts. » hefele-Leclercq, Hist. des conciles, t. iii, p. 155, où l’on trouvera aussi en note quelques indications bibliographiques. L’union avec Rome du patriarcat schismatu ue ne fut accomplie qu’au concile d’Aquilée en l’an 700. Dès lors, l’on eut deux patriarches catholù uts cui n’avaient’d’autres pouvoirs que ceux de métropolitains : ils eurent sou-