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PATRIARCATS. SITUATION ACTUELLE


rit. Autrement dit, la juridiction se complique d’un élément national. « Elle est nationale en ce sens que, dans les limites dont il vient d’être parlé, le patriarche ne l’exerce régulièrement que sur les personnes appartenant à sa propre nation, au sens particulier que l’usage oriental donne à ce mot. » Karalevskij, op. cit., p. 431. La juridiction territoriale du patriarche est limitée quant aux personnes, par son caractère national ; de plus, cette juridiction nationale, sur les personnes de leurs rits, est subordonnée à la juridiction territoriale ; car elle ne peut s’exercer en dehors des limites de celle-ci.

On trouvera des renseignements très détaillés sur les limites des différents patriarcats catholiques, dans Karalevskij, op. cit., p. 431-442. Cette restriction de la juridiction quant aux personnes est une des causes pour lesquelles certains canonistes latins assimilent les patriarches orientaux des temps modernes aux patriarches mineurs dont nous parlerons plus loin. Wernz-Vidal, Jus canonicum, t. n. De personis, 2e édit., Borne, 1928, p. 552.

Cette assimilation pourrait encore s’expliquer par le fait que l’exercice de la primauté s’est développé dans le cours des âges, et qu’en conséquence on n’a pas cru devoir donner aux patriarches modernes tous les pouvoirs dont jouissaient les anciens. Cela est vrai ; mais l’assimilation des patriarches orientaux modernes aux patriarches mineurs semble fausse : car les patriarches orientaux sont vraiment les chefs de leurs Églises particulières et exercent sur elles une très réelle juridiction, comme nous allons le voir à l’instant. En outre, au point de vue de la dignité antique des sièges, les patriarches que nous avons énumérés l’emportent sur les patriarches arménien et chaldéen qui, bien qu’ayant juridiction effective sur leurs Églises, sont cependant d’origine relativement récente et surtout ne correspondent pas à des patriarcats anciens, dont ils continueraient la tradition.

2. Droit patriarcal moderne.

En attendant que le nouveau code pour l’Église orientale édicté des normes communes aux divers patriarcats catholiques, il nous faut tirer des sources canoniques des différentes Églises les principales règles portées sur l’organisation patriarcale.

Voici les sources principales où l’on peut trouver cette législation : Pour le patriarcat maronite : le concile du MontLiban (1 736), Actes dans Collectio Lacensis, t. n. Les principales dispositions concernant le patriarche sont aux col. 286, 326 a, 333 et 346. — L’Église melkite a plusieurs fois légiféré sur le patriarche : Le IVe concile de Saint-Sauveur (1790), dans sa xxve session énumère douze privilèges patriarcaux : Ut penitus tollantur querelarum causa 1 inter dominum patriarcham et dominos episcopos. Mansi-Petit, t.oncil., t. xi.vi, col. 647-649. Le concile de Qarqafé (1806) en compte dix-huit. Mansi, ibid., col. 777-785. Celui de Jérusalem (1849) en énumère vingt-cinq. Mansi, ibid., col. 10751083. Aucun des conciles melkites n’a été approuvé, sauf celui de Aïn-Traz (1835) qui ne touche pas à la question. Mansi, ibid., col. 981, 1006. Nous avons donc affaire, non à des sources canoniques proprement dites, mais plutôt à des témoignages historiques sur la discipline de cette Eglise. Cf. Karalevskij, op. cit., t. iii, p. 451 à 188. — Les Syriens traitent du droit patriarcal dans leur svnode de Charfé (1888) Synodus Schiar/ensis Syrorum, Rome, 1896, p. 209-215, et 127-222. — Le synode copte de 1898 s’en est également occupe. Synodus Alexandrina coptorum, Rome, 1899, p. 180-191.

Si l’on ajoute à ces sources particulières, les documents pontificaux sur le droit patriarcal, qui se trouvent dans les Colleclanea S. Congregationis de Propaqanda fide, Rome, 1907, cf. Index, au mol Patriarcha. et dans le Jus pontifîcium de propag. fide, édition de

Martinis, Rome, 1888 sq.. on aura à peu près l’essentiel sur le droit patriarcal oriental moderne.

Ce droit nous ne pouvons l’étudier ici dans le détail. Nous donnerons simplement les points communs aux diverses Églises, en suivant le plan adopté dans le synode copte de 1898 :

a) Le patriarche a le droit de faire porter la croix devant lui injra limites sui palriarclialus. Cf. cependant Syn. syrorum, p. 212, ad 3um.

b) Il peut revêtir un habit de couleur pourpre et se servir dans certaines solennités du pallium que lui a envoyé le souverain pontife. Ce pallium, généralement, le patriarche le sollicite en demandant à Rome la confirmation de son élection. Les coptes procèdent un peu différemment, Synodus coptorum, p. 190. Sur le pallium des patriarches, son origine, sa signification, cf. Thomassin, Velus et nova… Eccles. discipl., part.I, t. II, c. liii-lviii ; Benoît XIV, Opéra inedila, édit. Heiner, I-ribourg-en-B., 1901, part. I, De ritibus, p. 8-9 ; Wernz-Vidal, op. cit., p. 557-565. Benoît XIV mentionne des exemples de concession du pallium latin à des patriarches orientaux du vu* au xine siècle. Puis, pendant quelques siècles, on a cessé de suivre cet usage et en 1649 on a discuté en congrégation, s’il fallait reprendre l’ancienne coutume. Benoît XIV distingue le pallium latin du pallium ou omophorium grec, et donne les règles concernant l’usage du pallium latin par les Orientaux. Cf. aussi sur cet usage le synode du Mont-Liban, part. III, c. vi, n. 23, Collectio Lacensis, t. ii, p. 343, 344 ; et aussi Benoît XIV, De synodo dicece.sana, t. XIII, c. xv, n. 17 sq. Les patriarches latins titulaires n’ont pas droit au pallium. Benoît XIV remarque que la concession aux maronites du pallium par Léon X (1515) ne prouve pas en faveur du droit général, car les Maronites ont adopté tous les ornements liturgiques latins. La concession par le pape du pallium aux patriarches orientaux est le signe de leur confirmation, de sorte qu’avant de l’avoir reçu les patriarches ne peuvent exercer leurs fonctions. Colleclanea, 1. 1, p. 496, n. 863 ; cf. Karalevskij, op. cit., p. 405 sq.

c) Tous les évêques et prêtres du patriarcat doivent, soit à la messe, soit aux autres fonctions liturgiques, immédiatement après la commémoraison du souverain pontife, faire celle du patriarche selon la forme prescrite.

d) Le patriarche consacre les métropolitains et les évêques. C’est le droit commun actuel. Synodus Monlis Libani, dans Coll. lac, t. ii, col. 300-302 ; Synode melkite de.Jérusalem (1849), Mansi, t. xlvi, col. 1079 ; Synodus Schar/ensis syrorum, p. 213, ad 7um. Cette discipline n’est pas conforme à ce qui se faisait jadis. Bcgulièrement, les évêquesé taient consacrés par le métropolitain ; cf. Plefele-Leclercq, Hist. des conc, t. i, p. 540 sq. Mais la dignité de métropolite, peu à peu, est devenue purement honorifique dans la plupart des Églises orientales et leurs pouvoirs sont passés en partie aux patriarches. De vrais métropolites, dès le Moyen Age, il n’en existait plus dans beaucoup d’Églises et par contre le titre était concédé à presque tous les évêques. Dès lors, pratiquement, la dignité métropolitaine cessa d’être un véritable degré de la hiérarchie de juridiction. Voir une explication de cette évolution dans le synode maronite. Coll. Lac, t. ii, col. 300 ; cf. aussi Synod. syr., p. 216. Le synode maronite, qui concède lui-même au patriarche le pouvoir de consacrer les évêques, ajoute que ce n’est que provisoire : donec, restituât Orienti pace, sedes primatiales et metropolilica > Deo favente restituantur. Coll. Lac, t. ii, col. 300 ; Karalevskij, op. cit., p. 459.

e) Le patriarche nomme pour les sièges épiscopaux vacants un vicaire qui prendra l’administration du diocèse jusqu’à l’institution canonique du nouvel