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PATRIARCATS. LES ORIGINES, NICÉE


auteurs s’en sont mêlés. Cf. Benoît XIV, De synodo diœcesana, t. II, c. n. On trouvera dans Hefele-Leclercq, t. i, p. 552, note 4, la liste des principaux auteurs qui ont participé à cette controverse. Pour donner une idée des problèmes qu’on agitait à cette époque autour du 6e canon de Nicée, nous ne pouvons mieux faire que de citer ces paroles de Beveridge : Quamuis aiiletn lotus canonis hujus contexius verbis diserlis salis ac conspicuis concipiatur, mirum lamen quanlis artificiis in dioersas partes distrahitur. Hi enim episcopi romani primalum hoc canonc adstrui, alii eumdem in eo deslrui conlendunt ; hi palriarchalem hic auctorilalem institut affirmant, alii negant ; hi denique episcopum romanum universæ Ecclesiæ hic præfeclum, illi auctorilatem ejus intra suburbicaria loca coarclant, alii nihil omnino hic de eo constitutum esse scribunt. Nimirum hic canon inter jervenlissimos disputalionis œstus tractari solel. Beveridge, Pandectse, t. ii, p. 49 ; Phillips, Kirchenrecht, Ratisbonne, t. H, p. 36, 37. Mais, de nos jours, plusieurs de ces controverses n’ont plus qu’un intérêt historique, et l’on est revenu généralement à une appréciation plus modérée du 6e canon.

1. Alexandrie.

Le canon a en vue tout d’abord de sauvegarder les privilèges de l’évêque d’Alexandrie ; cet évéque, dit-il, a autorité sur l’Egypte, la Libye et la Pentapole ; à ces provinces il faut ajouter la Thébaïde qui, au temps de Nicée, dépendait certainement d’Alexandrie. Hefele-Leclercq, t. i, p. 555.

Cet état de choses remonte à une époque antérieure au concile de Nicée. Denys d’Alexandrie exerçait déjà une primauté sur la Pentapole, province civile distincte de l’Egypte et qui semblait avoir dans l’évêque de Ptolémaïs une sorte de métropolitain. Harnack, Die Mission und Ausbreitung des Christentums in den ersten drei Jahrhunderten, t. ii, Leipzig, 1902, p. 150 ; Luebeck, Reichscinteilung und kirchliche Hiérarchie des Orients bis zum Ausgange des rr. Jahrh., Munster, 1901, p. 121, 123. Sur l’Egypte, l’autorité d’Alexandrie était encore plus directe. Dioclétien modifia la division des provinces. L’on comptera, d’après le Laterculus Veronensis, 5 provinces. Ces provinces, jusque dans le courant du ive siècle, étaient rattachées au diocèse d’Orient. Au iv siècle, elles en furent séparées et constituèrent un diocèse civil distinct, le diocèse d’Egypte, avec bientôt 6 provinces. Notitiæ dignitatum, édition Bôcking, Bonn, 1839-1853, pars orientalis, p. 6 et p. 136-138 ; Mommsen, Mémoires sur les provinces romaines, traduction Picot, Paris, 1867, p. 14.

Mais, comme le note P. Batiffol, « peu importe que l’Egypte ait été subdivisée par Dioclétien en plusieurs provinces, peu importe que la Libya superior et la Libga inferior forment deux provinces, l’évêque d’Alexandrie garde son autorité traditionnelle sur toutes ces provinces ». Batiffol, La paix constantinienne, p. 129. Y avait-il des métropolitains dans chacune de ces provinces ? La chose est discutée ; mais il ne semble pas que l’organisation métropolitaine décrite par les can. 4 et 5 de Nicée s’appliquât à l’Egypte. Batiffol, ibid., p. 124 ; Sohm, t. i, p. 403, contre Luebeck, p. 59, et Hefele, t. r, p. 558. L’évêque d’Alexandrie apparaît comme l’unique métropolitain de toutes ces provinces ; il en ordonne les évêques et il convoque le concile. Luebeck, p. 124. Il diffère des métropolitains ordinaires en ce que ces derniers ont leur juridiction restreinte à une seule province civile.

2. Rome.

Pour confirmer l’autorité d’Alexandrie, le concile la met en parallèle avec celle du pape.

Certains en ont conclu que, assimilant les deux pouvoirs, le canon niait la primauté papale, mais, de cette primauté, le canon ne parle pas ; il établit sans doute une assimilation entre Rome et Alexandrie, mais elle porte sur cette juridiction particulière que chacun d’eux possède sur plusieurs provinces civiles. Phillips,

Kirchenrecht, p. 36 ; Hefele-Leclercq, t. i, p. 562. Le canon n’est un argument ni pour, ni contre la primauté papale. Il est vrai que certaines versions du canon commencent par ces mots : Ecclesia romana semper habuil primalum ; il est vrai encore que Paschasinus a invoqué cette variante au concile de Chalcédoine, mais il n’est pas prouvé que le texte original contenait ces mots, ni que le concile de Chalcédoine ait approuvé l’interprétation de Paschasinus. Maassen, Der Primat des Bischojs von Rom und die allen Palriarchalkirchen, Bonn, 1853, p. 90-95 ; Hefele-Leclercq, 1. 1, p. 566-568. Le 6e canon, avons-nous dit, assimile Rome et Alexandrie, en ce qu’il reconnaît aux deux évêques une autorité sur plusieurs provinces civiles. Sur quelles provinces s’étendait la juridiction du pape mentionnée dans ce 6e canon et de quel pouvoir s’agit-il ? La partie occidentale de l’empire romain, telle que la décrivent les Notitiæ dignitatum, était divisée en deux préfectures : celle d’Italie et celle des Gaules. La préfecture des Gaules comprenait trois diocèses : Espagne (7 provinces), Gaule (17), Bretagne (5). Édit. Bôcking, p. 13-14. Celle d’Italie en comptait également trois : Afrique (7 provinces), l’Illyricum qu’il ne faut pas confondre avec l’Illyricum oriental (7) et l’Italie (17). Dans le diocèse d’Italie, les 7 provinces du Nord dépendaient du Vicarius Italiæ, Notitiæ, p. 65 ; les autres du Vicarius urbis Romæ, p. 63. De l’administration du Vicarius Urbis, il fallait distinguer celle du Præjectus Urbis qui s’étendait à la ville de Rome et à un rayon suburbicaire restreint ; cf. à ce sujet, Notitiæ, p. 168180 ; Hefele-Leclercq, t. i, p. 563. Notons également qu’avant Dioclétien il n’y avait point de provinces en Italie ; c’était la parfaite unité politique. Les Notitiæ décrivent ce qui existait vers 400. Nous pouvons maintenant suivre les discussion* sur les limites et la nature de la juridiction de l’évêque de Rome définie par le 6e canon.

a) Gothfried et Saumaise restreignaient cette autorité au territoire du præjectus Urbis. Mais cette opinion est inadmissible ; la juridiction d’Alexandrie s’étendait sur plusieurs provinces, le concile l’assimile à celle de Rome, donc cette dernière embrassait, elle aussi, plus qu’une province civile. Maassen, op. cit., p. 100-110 ; Hefele-Leclercq, t. i, p. 563, et les références.

b) Hefele croit trouver dans le 6° canon l’affirmation d’un pouvoir patriarcal de l’évêque de Rome sur tout l’Occident, 1. 1, p. 564-566. De même Phillips, Kirchenrecht, p. 40 ; Benoît XIV, loc. cit. ; Pierre de Marca, De concordia sacerdolii et imperii, 1763, I. I, c iii, iv ; Thomassin, Vêtus et nova Ecclesiæ disciplina, part. I, t. I, c. vin. Ces auteurs ont le tort de vouloir transposer à l’époque de Nicée ce qui existera plus tard, et leurs arguments valent pour une date postérieure à 325. Ainsi Hefele recourt au témoignage des canonistes grecs du Moyen Age, t. i, p. 564. Il est vrai que Balsamon ctZonaras disent en interprétant le 6e canon : Quoniam… et romanus episcopus præsil occidenlalibus Ecclesiis, P. G., t. cxxxvii, col. 243, 254 ; mais ils ne font que répéter ce qui se trouve dans la législation justinienne, où, à côté des autres patriarches d’Orient, il n’est fait mention pour l’Occident que du patriarche de Rome. Novelle 109, pnefatio. Mais.lustinien dans ses constitutions ne témoigne que pour son temps et il ne nous renseigne nullement sur ce qui existait au temps de Nicée. Et l’on rencontre quelquefois chez les auteurs qui soutiennent l’opinion que nous exposons, certaines contradictions assez apparentes ; Thomassin, par exemple, affirme que le pouvoir patriarcal du pape, dès avant Nicée, totum compleclebatur Occidentem, loc. cit., n. 14, et que, si les évêques d’Afrique n’étaient pas ordonnés par le pape, c’était uniquement en raison de la distance. Et, quelques pages plus loin, il prétend