Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 11.2.djvu/52

Cette page n’a pas encore été corrigée
1237
1238
ORDRE. RITE DANS LE N. T.


2* Dans le Nouveau Testament. — 1. A l'égard des apôtres. — Nous avons dit que Notre-Seigneur a pu communiquer les pouvoirs apostoliques, et vraisemblablement les a communiqués, sans user d’aucun rite sensible. Inutile donc de nous arrêter à certains récits plus ou moins légendaires, qui représentent les apôtres comme ayant été ordonnés par JésusCkrist ; cf. Actus Pétri cum Simone, c. x, édit Lipsius, 1891, p. 58 ; Doctrine d’Addaï et Actes de Barsamyà, voir W. Cureton, Ancient syriac documents, Londres, 1864, p. 50, 71-72. Ces récits n’ont de valeur que pour attester la croyance de l'Église quant à l’antiquité et à l’efficacité du rite. On retrouve néanmoins un écho de ces suppositions chez les Pères ; cf. S. Jean Chrysostome, In I Cor., homil. xxxviii, 4, P. G., t. lxi, col. 326, et chez les théologiens, cf. Suarez, De fide theologica, disp. X, sect. i, n. 5-8, Opéra omnia, Paris, 1868, t.xii, p. 282-284.

La nécessité d’un rite sacré ne se pose que pour la transmission des pouvoirs depuis les apôtres. Toutefois, l’apostolat primitif présente deux cas spéciaux qui demandent quelque discussion.

a) Le cas de saint Jacques, évêque de Jérusalem. — On sait que certains auteurs refusent d’identifier saint Jacques, premier évêque de Jérusalem, frère du Seigneur, Matth., xiii, 56. Marc, vi, 3, avec l’apôtre Jacques le Mineur, fils d’Alphée, Matth., x, 3 ; Marc, ni, 18 ; Luc, vi, 15 ; Act., i, 13. Sur les raisons qu’on apporte contre l’identification, voir Dictionnaire de la Bible, art. Jacques, t. iii, col. 1084, et J. Chaine, L'épître de saint Jacques, Paris, 1927, introduction, p. xxx sq.

Si Jacques, évêque de Jérusalem, était en même temps l’un des Douze et l’un des < frères » de Jésus, son choix, par le collège apostolique, comme premier évêque de l'Église-Mère de Jérusalem, s’expliquerait sans difficulté, et son pouvoir épiscopal aurait la même source que celui des autres apôtres, le choix de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Par là s’expliquerait aussi facilement la place éminente que le Nouveau Testament lui reconnaît, non seulement comme chef de la communauté hiérosolymitaine, Gal., i, 18, 19 ; Act., xii, 17 ; xv, mais encore comme colonne de l'Église entière avec Pierre et Jean, Gal., ii, 9.

La difficulté n’existerait que si Jacques, évêque, était un personnage distinct de Jacques le Mineur apôtre, et s’il devait son épiscopat uniquement à sa parenté avec le Sauveur sans aucune délégation divine ou ecclésiastique. Telle est la thèse soutenue par nombre de critiques modernes non catholiques, désireux de saper par la base l’origine divine de l'épiscopat. Cette thèse prétend trouver quelque fondement dans plusieurs traditions du iiie et du iv c siècles, recueillies par Eusèbe. Voir Évêques, t. v, col. 1678. Quoi qu’il en soit, les anciens auteurs qui ont manifesté sur ce point quelque hésitation, corrigeaient l’insuffisance de leur thèse par l’affirmation que Jacques aurait été ordonné évêque de Jérusalem soit par le Sauveur lui-même, soit par les apôtres. De cette ordination, il n’y a pas trace historique, mais il n’y a aucune raison qui milite contre elle. D’ailleurs l’identification des deux Jacques, qui paraît s’imposer à nombre de critiques, supprimerait cette difficulté même.

b) Le cas de Paul et de Barnabe. — L’adjonction de Matthias au collège des Onze, Act., i, 26, ne présente aucune difficulté touchant la communication du pouvoir apostolique, Dieu étant intervenu directement dans ce choix au sort : « Il n’est pas fait mention d’une imposition des mains sur la tête du nouvel apôtre ; il était établi dans la charge par le fait même du sort qui était tombé sur lui. » E. Jacquier, Les Actes des apôtres, Paris, 1926, p. <12.

Le cas de Paul et de Barnabe n’est pas tout à fait le même, puisque ces deux personnages ne furent admis au nombre des apôtres que plus tard, Act., xiii, 1-5.

Tout d’abord, il ne saurait être question de faire de l’imposition des mains donnée par Ananie à Saul, Act., ix, 17, un rite analogue à celui qui est rapporté, Act., xiii, 3. Certains protestants font cette assimilation afin d’exclure de Act., xiii, 3, toute idée d’ordination à l'épiscopat ; cf. IUilïet, art. Consécration, dans l’Encyclopédie… de Lichtenberger, t. iii, p. 369. L’imposition des mains est un rite dont la signification doit être déterminée par les circonstances qui l’entourent.

En ce qui concerne Act. xiii, 1-5, on pense résoudre toute difficulté en affirmant que le rite de l’imposition des mains dont il est question au ꝟ. 3 était la consécration épiscopale. C’est cette cérémonie de l’imposition des mains, faite par Simon, Lucius, et Manahen, ou du moins par l’un d’entre eux, qui aurait conféré à Paul et à Barnabe le plein pouvoir de fonder des Églises et d’ordonner des rcpeaèûTepoi. Cette interprétation a l’avantage d’indiquer nettement le rite sacramentel de la consécration des deux nouveaux apôtres. Aussi a-t-elle été adoptée par nombre d’auteurs catholiques. Hsec manuum impositio, dit Knabenbauer, cui præmiserunt jejunium et orationem, non est nuda cœremonia censenda neque vacuus quasi ritus ; quare merilo ibi agnoscunt sacram ordinationem ad munus épiscopale. Nusquam enim, si mittamus paruulos quibus Salvator imposilis manibus benedixit, in novo testamento deprecaloriæ cujusdam impositionis manuum exstat exemplum : sed ubique imponuntur manus aut ad sanandum vel ad revocandum ad vitam (Matth., ix, 18 ; Marc, v, 23, xvi, 16 ; Luc, iv, 40 ; Act., ix, 12, 17 ; xxviii, 8) ; aut ad sacrandum (Act., vi, 6 ; viii, 17 ; xix, 6 ; I Tim., iv, 14 ; v, 22 ; II Tim., i, 6). Commentarius in Actus apostolorum, Paris, 1899, p. 222. Knabenbauer cite en faveur de cette interprétation saint Jean Chrysostome, Ammonius, Salmeron, Cornélius a Lapide, Patrizzi, Felten. On peut citer encore Beelen, Reischl, Bisping, Hake, Dôllinger, Kaulen, F. Prat, Saint Paul, p. 37 et Théologie de saint Paul, t. i, 17e élit., p. 49, note 4 ; Michiels, Origine de l'épiscopat, p. 94 ; Fouard, Saint Paul, ses missions, p. 5 ; J. Coppens, L’imposition des mains et les rites connexes, p. 133.

Cette opinion « n’est pas l’opinion générale, même des catholiques. Suarez et Estius déclarent que cette imposition des mains indique simplement une intercession en faveur de Barnabe et de Saul. Le texte de saint Chrysostome ne dit pas nettement qu’il s’agit là de la consécration épiscopale : XsipOTOveÏTai

XoiTTÔV ZIC, à7TO<3TOXY]V, WCTTS (XST' èÇoUataÇ X7)pîlTTSlV.

In Actus apost., homil. xxvii, 1. Barnabe et Saul ont reçu l’imposition des mains pour l’apostolat. Théophylacte confirme cette interprétation : 'Açopîaotxé (xot eîç tô epyov, tout' ècmv sic dtTcooToXTQv. P. G., t. cxxv, col. 689. Cet apostolat, auquel font allusion Chrysostome et Théophylacte, est celui des apôtres dont il est parlé dans les Actes, xiv, 14, dans Rom., xvi, 7 et dans la Didaché, xi, 3 sq., dont la mission était d’enseigner la foi de communauté en communauté. » Jacquier, op. cit., p. 387 ; cf. C. Gore et C. H. Turner, The Church and the minislrꝟ. 2e édit., Londres, 1919, p. 232, 234, n. 2. Les arguments invoqués en faveur de cette interprétation sont : d’abord le sens obvie du texte, complété et confirmé par xiv, 26 ; l’imposition des mains n’avait pas d’autre but que de confier Barnabe et Saul à la grâce de Dieu pour l’accomplissement de leur mission ; en second lieu les affirmations de