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PASCAL II. RAPPORTS AVEC LES ÉTATS


l’excommunication ceux qui avaient reçu l’investiture du roi et leurs consécratcurs. L’archevêque pourrait ordonner ceux qui, sans avoir reçu proprement l’investiture, auraient fait au roi l’hommage féodal. Si qui deinceps præter per inveslituras ecclesiarum prælationes assumpserint, etiamsi régi hominia fecerint, nequaquam ob hoc a benedictionis munere arceantur, donec ad hoc omittendum cor regium molliatur. Jafîé, n. 6073. C’étaient en somme les bases de l’accord, qui, ébauché au Bec, à l’été de 1106, fut définitivement conclu à Londres en août 1107. « Aux termes de cet accord, désormais personne en Angleterre ne peut recevoir l’investiture par l’anneau et la crosse, ni du roi, ni de tout autre laïque ; par contre, aucun élu à un siège ecclésiastique ne peut être sacré, s’il n’a d’abord prêté au roi le serment de vassalité. » Hefele-Leclercq, Histoire des conciles, t. v a, p. 487.

Par la suite, les relations furent bonnes entre Pascal et l’Angleterre. Voir certaines concessions faites à Anselme, Jafîé, n. 6152, et au roi, n. 6210 sq. Mais Pascal entendait maintenir sur les nominations ecclésiastiques, à commencer par celle du primat de Cantorbéry, un droit de regard que la couronne avait bien de la peine à supporter. Voir Jafîé, n. 6449, 6450. La question du denier de Saint-Pierre put causer également quelques frictions. Mais la situation, dans l’ensemble, était bien clarifiée à la mort de Pascal II.

Signalons au moins une lettre importante adressée par Pascal en 1117 au roi de Danemark, souverain de toutes les régions Scandinaves. Elle exhorte celui-ci à travailler de concert avec le métropolitain de Lund et les évêques du pays à la réforme de l’Église. D’après cette lettre, il paraîtrait que le roi avait demandé quelque adoucissement à la règle du célibat ecclésiastique. Le pape répond qu’il lui est impossible de faire fléchir la discipline pour ce qui concerne les prêtres et les diacres. De presbylerorum et diaconorum castitale et illi (les évêques) et nos verbum mutare non possumus. Jafîé, n. 6557.

3° L’Espagne, où, depuis une trentaine d’années, la conquête sur les Maures se faisait avec rapidité, donna à maintes reprises au pape Pascal des occasions d’intervenir. Il était, d’ailleurs, bien au courant de la situation, ayant rempli, en ce pays, les fonctions de légat (ITrbain II à la fin de 1089 ! La primatie de Tolède, devenue depuis 1085 la capitale du royaume de Léon el Castille, fut affermie ; Bernard, titulaire de ce siège, fut déclaré légat du pape. Voir en particulier Jafîé, n. 5858. De nombreuses contestations ecclésiastiques, pour le rétablissement des anciens sièges et la délimita lion de leurs ressorts furent soumises au jugement pontifical. Dans toutes ces affaires, c’est surtout l’évêque de Compostelle, Didace, que l’on voit au premier plan ; il semble avoir eu, plus que Bernard, la pleine confiance de Pascal. C’est à lui, en particulier, que le pape confia la mission de protester contre le mariage entre Alphonse d’Aragon et Uraque, fille du roi Alphonse de Castille, sa parente à un degré prohibé. La question avait été discutée à un concile de Bénévent, en février 1113, où Pascal avait convoqué les évêques espagnols, Jaffé, n. 6331. C’est sans doute après ce concile qu’il faut placer la lettre où le pape donne ses instructions à Didace : Au cas où le mariage aurait lieu, Didace devrait excommunier les coupables et même les priver de leur autorité temporelle. Ecclesiæ consortio et sœculari potestate privetur, Jaffé, n. 6279 ; le texte est malheureusement fragmentaire. Quoi qu’il en soit de cet incident et des suites qu’il put avoir, il est incontestable que le règne de Pascal II vit s’affermir le prestige pontifical dans la péninsule.

La question d’Orient.

Au moment même où

Pascal montait sur le siège de Pierre, l’armée chrétienne, qui venait de s’emparer de Jérusalem (13 juillet

1099), s’occupait d’organiser sa conquête. Ce fut Pascal qui reçut les premières nouvelles du magnifique succès qu’avait eu l’initiative d’Urbain II. Mais la nouvelle organisation ecclésiastique donnée à la Palestine et aux régions adjacentes, où la hiérarchie latine se substitua à la hiérarchie grecque, ne s’établit pas sans un certain nombre de difficultés. Il y eut d’abord des compétitions relatives au patriarcat de Jérusalem. Voir Jaffé. n. 5857, 0009, 0175. Plus tard, des discussions pénibles éclatèrent entre le patriarcat de Jérusalem et celui d’Antioche, au sujet des conquêtes nouvelles faites par Beaudoin I er. Ibid., n. 6297, 6298 ; voir aussi les résolutions prises sur ce sujet au synode de Bénévent (1113), p. 749, et n. 6343, 6344. Il fallait également penser à soutenir militairement les États latins et, dès ce moment, la croisade permanente s’organise. Voir les lettres 5812, à tous les évêques de France, et 5824, à Hugues de Lyon. On remarquera néanmoins que le pape insiste à plusieurs reprises pour que les chrétiens d’Espagne ne se lancent pas dans l’aventure d’outre-mer. Leur croisade, c’est sur place même qu’ils doivent la mener et d’une façon continue.

On sait que la première expédition des Latins en Orient n’avait pas laissé d’inspirer des inquiétudes à l’empereur grec, Alexis Comnène. Les entreprises de Bohémond, prince de Tarente, devenu souverain d’Antioche, avaient largement justifié ces appréhensions. L’hostilité des Grecs contre les Latins s’en était accrue. Or, Pascal avait certainement favorisé les entreprises de Bohémond. Au concile de Poitiers (26 mai 1106), son légat, Brunon de Segni, avait essayé de lui susciter des auxiliaires, et ce n’était pas seulement aux infidèles que le nouveau prince d’Antioche songeait à s’attaquer. La disparition de ce redoutable adversaire, en avril 1111, permit au basileus de respirer. D’autre part, les difficultés que créait au pape l’empereur allemand donnèrent à Comnène l’idée de tenter un rapprochement avec Pascal. Qu’espérait-il ? Pensait-il arracher à l’influence germanique tout ou partie de l’Italie ? Imaginait-il pouvoir rentrer à Rome ? Toujours est-il qu’en 1112 d’étroites négociations se nouèrent entre le Saint-Siège et le basileus. L’idée affichée était de rétablir l’union des deux Églises, grecque et latine, union rompue depuis Michel Cérulaire. Mais, à coup sûr, Alexis avait aussi d’autres vues. Sur ces négociations, voir la lettre de l’abbé de Farfa à Henri V, Cod. Udalr., n. 162 ; la Chronique du Mont Cassin, t. IV, c. xliii, P. L., t. clxxiii, col. 873 ; la réponse de Pascal aux premières ouvertures, dans Jaffé, n. 6334. Cette réponse du pape laisse entièrement la question sur le domaine religieux : « L’union est facile, dit Pascal, si notre frère de Constant inople veut bien reconnaître la primauté du Siège apostolique, comme cela a été institué par les décisions de l’empereur Constantin (allusion à la pseudo-Donation) et confirmé par le consentement des saints conciles, s’il veut bien corriger son obstination passée, de la manière que vous verrez par les communications de nos légats. » La restitution à la juridiction du Saint-Siège des provinces qui lui avaient été jadis enlevées contribuerait également à la reprise des bons rapports entre l’ancienne et la nouvelle Rome. Les autres différends relatifs au dogme et aux coutumes seraient vite aplanis, si Constantinople commençait par donner au Saint-Siège un témoignage de respect. Ensuite de quoi il conviendrait de réunir une assemblée des représentants de l’un et de l’autre rite, où s’étudieraient en commun les points litigieux. Le pape prévoyait que cela ne pourrait être avant le mois d’octobre de l’année suivante, 1113, et il chargeait ses envoyés de régler à Constantinople tout le détail. Nous n’avons plus d’autre renseignement sur cette affaire. Mais il est certain que l’entente ne put s’établir : « des préoccupations plus immédiates vinrent