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PARENTS (DEVOIRS DES). LÉGISLATION CIVILE


fants ? Nullement. Us ont à y penser dès avant le moment où la question du choix d’un état se pose ; ils ont à intervenir quand ce moment est venu ; ils ont ensuite à tenir compte de la décision prise.

Lorsque l’enfant est jeune, quand sa vocation est encore ignorée et qu’il n’y pense guère, les parents ont le devoir de maintenir ouvertes devant lui toutes les issues que raisonnablement ils jugent possibles, en évitant une spécialisation trop hâtive. Ils doivent s’inspirer en ceci, moins de leur idéal théorique que de leur situation sociale et matérielle d’une part, et des aptitudes ou des dispositions physiques, intellectuelles et morales manifestées d’autre part par l’enfant lui-même. Ce serait, par exemple, une maladresse et une faute d’orienter un jeune homme ou une jeune fille de faible constitution vers un métier qui exige une grande dépense de forces physiques ou vers une vie de bureau où il achèverait de s’anémier ; de pousser vers une carrière exigeant des examens ou des concours difficiles un enfant qui n’y pourrait réussir ; ou inversement d’interrompre prématurément, sans raison majeure, des études brillantes.

Quand le moment est venu de choisir, l’enfant est souvent indécis, parce qu’il ignore les avantages et les inconvénients des divers états auxquels il songe, ou ses propres aptitudes. Aux parents de l’éclairer sans parti pris. Même renseigné, il n’a pas toujours de goût bien prononcé ou assez exclusif. Aux parents de le mettre à même de tenter les expériences nécessaires, par exemple en faisant un stage ou une retraite. Quand l’enfant a des idées arrêtées, ses desseins n’ont pas toujours été formés en parfaite connaissance de cause ; quand il a des goûts manifestes, ils ne sont pas toujours judicieux. Aux parents d’éprouver sa vocation en lui ouvrant d’autres perspectives ou en attirant son attention sur certains aspects inaperçus de l’état qu’il préfère. Conseillers naturels et providence de l’enfant, les parents ont le devoir de veiller à ce qu’il ne prenne pas de décisions inconsidérées ou prématurées, de l’éclairer en mettant à son service leur expérience, de le guider par leurs suggestions et leurs conseils ; en un mot, ils peuvent intervenir dans la délibération et ils ont même le devoir de le faire quand ils le jugent utile ; mais leur rôle s’arrête là : la décision appartient, en définitive, à l’enfant.

Le choix fait, les parents doivent mettre l’enfant à même de réaliser son dessein. Ils doivent donc l’aider à se préparer, en lui donnant la possibilité d’acquérir les connaissances nécessaires et de réaliser les conditions requises pour le métier, la profession ou l’état de vie qu’il ambitionne. Ils doivent même, quand ils le peuvent, l’aider à s’installer en lui fournissant les moyens matériels de faire les acquisitions indispensables ou de reprendre une affaire. Tout cela est compris dans la prescription du Codex juris canonici : Parentes gravissima obligatione tenentur… etiarn temporali eorum bono providendi. Can. 1113.

2. Le mariage.

Ce que nous avons dit de l’état ou de la profession s’applique aussi au mariage. Non seulement les jeunes gens sont libres de contracter mariage ou de ne pas le faire, mais ils sont libres de choisir leur futur conjoint. Les parents n’ont pas à marier leurs enfants ; c’est à ceux-ci de se marier selon leurs goûts.

Mais les parents doivent préparer au mariage ceux de leurs enfants qui manifesteraient cette vocation ; ils doivent aussi au besoin orienter et guider leur choix en les faisant profiter de la connaissance qu’ils ont acquise des hommes et des choses ; ils doivent enfin, dans l’état actuel des mœurs, donner à leur fdle qui désire se marier le moyen de le faire, en lui fournissant une dot raisonnable. Ceci est vrai même de la fille illégitime. S. Alphonse, Theol. mor., t. III, n. 336.

Tous ces devoirs, dans la mesure où ils entraînent des dépenses pécuniaires, impliquent pour les parents un autre devoir : celui du travail, de la prévoyance et de l’épargne. Il y aurait donc faute grave de leur part, non seulement s’ils dilapidaient leurs biens, mais encore s’ils ne cherchaient pas à acquérir de quoi élever selon leur rang et doter honnêtement leurs enfants. Saint Alphonse, op. cit., n. 336 ; Noldin, t. ii, n. 295.

Il va sans dire qu’en parlant exclusivement des devoirs des parents, nous n’avons pas entendu nier leurs droits. Ils ont droit au respect et à la déférence de la part de l’enfant, même quand ils lui font des remarques ou lui donnent des conseils qui lui déplaisent. Ils peuvent, pour de graves et justes raisons, refuser d’approuver un projet d’établissement ou de mariage, et même s’y opposer formellement. Alors, si l’enfant passe outre, ils ne restent obligés de l’aider matériellement, en cas de besoin, qu’en lui procurant les aliments nécessaires pour vivre. S. Alphonse, op. cit., n. 337.

3. Après l’établissement des enfants.

a) Les parents ont le devoir de s’effacer en laissant les enfants conduire eux-mêmes leurs affaires et leur ménage, et en acceptant de tenir désormais moins de place dans leur cœur.

Les intrusions du père dans la conduite des affaires, et de la mère dans celle du ménage sont une usurpation de droits ; elles ont pour effet de rendre les parents odieux et souvent de jeter le trouble et la discorde dans les foyers. Il est normal d’autre part que, dans leurs entreprises personnelles, les enfants tiennent à leur indépendance ; et il est conforme au plan providentiel qu’ils quittent leur père et leur mère pour s’attacher à leur conjoint. Gen., ii, 4. Les époux ont le devoir de s’aimer, de vivre l’un pour l’autre et tous deux pour leurs enfants. Aux parents donc de bannir la jalousie qui leur ferait considérer comme intrus leur gendre ou leur bru, qui les porterait à diminuer à leur profit l’amour réciproque des époux, qui leur ferait souhaiter même parfois que ces derniers n’aient pas d’enfants.

b) Par contre, cependant, les parents ont le devoir, sans s’imposer, d’aider les enfants des conseils de leur sagesse. Ces conseils, discrètement donnés, viseront toujours au plus grand bien des enfants, à la prospérité de leurs affaires, à l’union de leur foyer, à l’accomplissement généreux de tous leurs devoirs familiaux.

Prévoyance et discrétion, prudence et désintéressement, telles sont donc les vertus que les parents ont à cultiver et à pratiquer à propos de l’établissement de leurs enfants.

IV. Législation civile.

Les données du droit naturel, en ce qui concerne les devoirs des parents, sont généralement admises dans leur ensemble, chez tous les peuples civilisés, encore qu’elles soient parfois plus ou moinscontreditesdansledétail de l’application.

Au chapitre des obligations qui naissent du mariage, le Code civil français déclare que « les époux contractent ensemble, par le seul fait du mariage, l’obligation de nourrir, entretenir et élever leurs enfants. Art. 203. La jurisprudence précise que cette obligation, pour ce qui concerne leurs enfants communs, pèse pour le tout sur chacun des époux, mais n’est point solidaire. Elle ajoute que les frais d’entretien et d’éducation sont à la charge des enfants quand ceux-ci possèdent des biens personnels, et que les père et mère ne doivent les supporter seuls que s’ils ont l’usufruit légal des biens personnels de leurs enfants. Code civil, édition H. Bourdeaux, 31e édit., Paris, 1931, p. 91.

Le père, et dans certains cas la mère, sont administrateurs légaux des biens de leurs enfants mineurs non émancipés. Art. 389 sq. Ils ont le devoir de s’acquitter