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1987 PARALIPOMÈNES (LIVRES DES). VALEUR HISTORIQUE

1988

réponse dépend de la solution donnée au problème de l’origine de notre version dite des Septante, qu’un certain nombre de critiques, Grotius, Howorth, et surtout Torrey prétendent être en réalité la version de Théodotion ; celle-ci, comme pour le livre de Daniel, aurait supplanté l’ancienne traduction, dont subsisteraient seuls les deux derniers chapitres conservés au livre d’Esdras. Cf. Torrey, The apparatus for the textual criticism of Chronicles-Ezra-Nehemiah, dans Harper Mémorial, t. ii, 1908, p. 55-111.

I.a recension de Lucien, en désaccord souvent avec l’hébreu, ne saurait être utilisée qu’avec grande circonspection dans la restauration du texte primitif, étant donné le grand nombre de leçons harmonisantes qu’on y rencontre.

Latin.

L’antique version latine serait d’autant

plus précieuse pour la critique textuelle des Paralipomènes qu’elle aurait été faite sur la véritable version des Septante, dont il ne resterait plus, s’il faut en croire l’opinion citée plus haut, que les deux derniers chapitres. Aucun manuscrit, malheureusement, n’en renferme de portions quelque peu étendues. Des fragments, extraits des Pères latins, en ont été recueillis dans Sabatier, Bibliorum sacrorum Latinx versioncs antiquæ, 1. 1.

Si la Vulgate, du fait de son origine tardive, fin du IVe siècle, voit son autorité diminuée, son interprétation de l’hébreu n’en est pas moins à préférer souvent à celle de la tradition massorétique.

Syriaque.

Une version syriaque des Paralipomènes

qui, originairement, n’étaient pas reçus au canon syriaque, fait actuellement partie de la Peschitto ; elle n’est pas, comme pour les autres livres de l’Ancien Testament, une traduction fidèle et littérale de l’hébreu, mais bien la traduction d’un targum et, de ce fait, la critique textuelle n’en peut tirer grand profit. Cf. Frankel, Jahrbùcher fur protestantische Théologie, 1879, p. 508 sq. ; W.-E. Barnes, An apparatus criticus to Chronicles in the Peshitta version, 1897.

VIL Valeur historique. — 1° État de la question. La critique littéraire des Paralipomènes, dans la détermination du nombre et de la nature des sources utilisées par leur auteur, non moins que de la manière dont il les a reproduites, n’allait pas sans préjuger déjà de la véracité des informations ainsi recueillies sur l’histoire religieuse de Juda. A cet égard, l’ancienne critique, avec de Wette, Graf, Wellhausen surtout, s’est montrée fort sévère, refusant toute confiance au Chroniqueur et se plaisant à relever les omissions, les additions, les déformations imposées aux événements et aux institutions pour les faire rentrer dans le cadre du Code sacerdotal. Cf. Wellhausen, Prolegomena zur Geschichle Isræls, 2e édit., p. 177-239.

A la critique wellhausienne, trop longtemps prédominante, une autre s’est substituée, moins radicale, plus nuancée dans l’appréciation des éléments constitutifs des Para ipomènes. Sans doute elle reconnaît, elle aussi, la différence qui lui paraît irréductible entre l’histoire telle qu’elle se présente dans l’œuvre du Chroniqueur et telle qu’elle s’affirme dans les anciennes sources ; entre les deux il faut choisir et, puisque l’histoire des Faralipomènes n’est autre chose qu’une révision de l’histoire traditionnelle dans le but de montrer que les institutions du judaïsme d’après l’exil sont d’origine mosaïque ou davidique, elle ne saurait être tenue pour la représentation exacte de la période antérieure à la captivité, partout du moins où elle apporte quelque modification à la tradition. Mais cela ne veut pas dire qu’il faille lui refuser toute valeur historique, car certaines de ses informations, même inconnues de la tradition conservée dans les anciens livres canoniques, proviennent d’antiques sources que nous ne connaissons plus et

méritent créance ; il y aura lieu de la leur accorder en particulier quand elles n’offriront rien d’invraisemblable et ne pourront s’expliquer par quelqu’une des tendances du Chroniqueur. Dans ce cas pourraient rentrer, par exemple, les données sur l’arbre généalogique de la famille de David après l’exil, I Par., iii, 17, et sur les constructions énumérées II Par., xi, 5sq., xxvi, 9-10. Pour le détail voir Steuernagel, op. cit.. p. 385. « Il faut reconnaître, dit Gautier — après avoir fait les plus graves restrictions sur la crédibilité des Paralipomènes — que ce livre a conservé un certain nombre de renseignements généalogiques et statistiques surtout, qui paraissent provenir de sources plus anciennes, et qui ne sont point dépourvus de valeur. Il faut en user, cela va sans dire, avec prudence et avec méthode… Les généalogies des premiers chapitres renferment à cet égard des données qui ont un véritable prix. » Introduction…, 2e édit., p. 302. Cf. Commentaires de Kittel, Curtis, Rothstein-Hanel ; Kittel, Geschichte des Volkes Israël, 3e édit., t. ii, p. 333334.

Si la critique moderne, malgré ces quelques réserves, demeure peu favorable à l’historicité des Paralipomènes pour ce qui est de la période antérieure à l’exil, elle lui reconnaît, en revanche, une très grande valeur pour la connaissance de la période qui suit l’exil. Le Chroniqueur, en effet, nous révèle « l’état d’âme de son époque, les conceptions et les croyances dont se nourrissait la petite nation groupée à Jérusalem autour de son temple et de son sacerdoce. Nous apprenons ainsi à connaître les résultats obtenus au bout de quelques générations par la mise en vigueur du Document sacerdotal, les fruits accomplis par l’œuvre d’Esdras. » L. Gautier, op. cit., p. 302.

De leur côté, les défenseurs de l’autorité historique du livre n’ont pas manqué de faire valoir en sa faveur que la fidélité du Chroniqueur à reproduire les sources canoniques est une garantie de sa fidélité dans la reproduction des autres sources. Tout en reconnaissant le but didactique et parénétique de son œuvre, ils se refusent à admettre que, pour l’atteindre, il ait altéré la vérité, une histoire édifiante n’étant pas nécessairement une histoire fausse. Quant aux difficultés que soulève l’origine récente et non mosaïque ni davidique des lois concernant le culte et le service du Temple, ils font remarquer qu’elles procèdent d’une hypothèse non vérifiée et que, par conséquent, elles ne sauraient être retenues. Bien des difficultés de détails enfin, ajoutent-ils, trouvent leur solution dans la correction d’erreurs manifestes de copistes, tels que chiffres exagérés, par exemple, ou noms altérés. Protestants et catholiques ont défendu cette façon de voir. Cf. Dahler, De librorum Paralipomenon auctoritate ac fide historica, Strasbourg, 1819 ; Keil, Apologetischer Versuch ûber die Bûcher der Chronik, Berlin, 1833 ; Movers, Kritische Untersuchungen ùber die biblische Chronik, Bonn, 1834 ; Dillmann, art. Chronik, dans Herzog, Real-Encyklopâdie fur Théologie, 1854, t. ii, p. 693 ; Cornely, Introductio specialis in hisloricos Veleris Testamenti libros, part. I, Paris, 1881, p. 335347 ; E. Nagl, Die nachdavidische Konigsgeschichte Isræls, ethnographisch und geographisch bcleuchtet, Vienne, 1905 ; F.-X. Kugler, Von Aloses bis Paulus, 1922, p. 234-300 : Zur Glaubwûrdigkeit der Chronik.

A ces principes de solution, quelques critiques catholiques ajoutent certaines règles d’interprétation dont l’application leur paraît nécessaire pour résoudre telles et telles difficultés rencontrées dans l’explication du texte des Paralipomènes. Ainsi, note le P. de Hummelauer, le Chroniqueur, visant à l’édification des lecteurs plutôt qu’à la stricte exactitude historique et décrivant les événements tels qu’ils se présentaient dans ses sources sans rechercher dans quel