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1899
1900
PAPE. LE CHOIX DES ÉVÊQUES


tissement d’une lutte séculaire, au cours de laquelle les patriotes valaisans avaient peu à peu dépouillé leurs évêques des droits de souveraineté qu’ils prétendaient tenir de la fameuse Caroline, acte apocryphe d’une soi-disant donation faite par Charlemagne à l’évoque Théodule. Gareis et Zorn, op. cit., t. ii, p. 32. Le pape ne pouvait manquer de protester contre une pratique si manifestement irrcgulière : il cassait donc, l’élection, quitte à nommer, motu proprio, le même candidat. Le caractère anormal de ce procédé, et aussi quelques autres considérations d’ordre local, ont amené, en 1919, l’abandon du système électoral et l’évêque actuel a été nommé directement par le pape.

Le concordat signé entre le Saint-Siège et la république de Prusse, le 10 juin 1929, et ratifié le 13 août, a considérablement changé le mode de provision des sièges électifs en Allemagne. Acta apostolicæ Sedis, n. du 13 août 1929, t. xxi, p. 521. Avant cette date, la situation était réglée par trois documents : a) La constitution De salule animarum, du 16 juillet 1821, qui, à la suite de négociations entre Rome et le roi de Prusse Frédéric-Guillaume III, réorganisa les huit archevêchés ou évêchés de Cologne, Trêves, Munster, Paderborn, Breslau, Culm, Ermland et Gnesen-Posen. Pic VII y décida, comme « chose très agréable à l’Allemagne et très souhaitée par le roi de Prusse », que chacune de ces Églises serait pourvue par le suffrage de ses chapitres respectifs, et le bref Quod de fidelium, daté du même jour et adressé à tous les corps capitulaires intéressés, précisa la procédure de l’élection. A. Mercati, Raccolta di eoncordaii, p. 648, 665 ; b) La bulle Ad dominici gregis, du 1 1 avril 1827, suivie de près par le bref Re sacra, du 28 mai, par laquelle Léon XII appliqua le régime électoral aux diocèses de Fribourgen-Brisgau, Rottenbourg, Mayence. Lhnbourg et Fulda, réorganisés six ans plus tôt, à la demande des États rhénans, par la bulle Provida solersque de Pie VII, du 16 août 1821. A. Mercati, op. cit., p. 700, 703, 667 ; c) La constitution Impensa romanorum pontificum, du 26 mars 1824, par laquelle Léon XII accorda la même faveur au roi Georges IV d’Angleterre pour les deux évêchés du royaume de Hanovre, Ilildesheim et Osnabrûck. A. Mercati, op. cit., p. 689. Comme Gnesen-Posen et Culm étaient redevenus polonais, sous leurs anciens noms de Gniesno-Poznan et l’elplin, depuis les derniers traités de paix, la nomination à ces sièges cessait d’être régie par le concordat de 1821. Il restait donc, en Allemagne, treize évêchés électifs. Le concordat de 1929 en a créé deux autres. ceux d’Aix-la-Chapelle et de Berlin (art. 2, § 2 et 6).

Les documents du xrx c siècle que nous venons de citer contenaient des dispositions communes : élection par le seul chapitre cathédral, nécessité de ne choisir qu’un prêtre indigène (du diocèse, dans les pays rhénans ; du royaume, pour le Hanovre ; prussien, en règle générale, pour la Prusse, et tout au moins allemand, si le roi consent à ce qu’on le prenne dans un autre État), exclusion des candidats mal vus du gouvernement. Sur ce dernier point, les textes de Pie VII ne contenaient aucune précision. Dans ceux de Léon XII, au contraire, concernant le Hanovre et les pays rhénans, la façon de pressentir le gouvernement était minutieusement réglée. Cf. U. Stutz, Der neustc Stand des deutschen Bischofswahlrechtes, dans les Kirchenrechtliche Abhandlungen, n° 58, 1909.

Or, si le concordat de 1929 maintient les élections, il en bouleverse complètement l’ancienne pratique. Aux termes de l’art. 6, quand une vacance se produit, le chapitre présente au Saint-Siège une liste de candidats, canoniquement aptes à l’épiscopat ; de leur côté, les archevêques et évêques de Prusse en dressent une autre, qu’ils acheminent à Rome. Tenant compte de ces deux listes, le Saint-Siège choisit trois candidats.

parmi lesquels le chapitre, au scrutin secret, élit l’évêque ; avant de le nommer officiellement, le Saint-Siège s’engage à consulter le gouvernement, pour savoir s’il n’élève contre l’élu du chapitre aucune objection de caractère politique. Une note, à laquelle cet article renvoie, qui ne fait point corps avec le texte concordataire, mais qui, selon toute vraisemblance, n’a point été ajoutée sans le consentement du gouvernement prussien, est ainsi libellée : Aposlolica hsec Sedes hujusmodi elenchis non adeo lenetur ut nequeat, postquam eos mature perpenderit, si necessarium aut conveniens duxerit, alium etiam eligere qui sit extra elenchos.

2. La nomination par les chefs d’État.

Le privilège de nommer les évêques était un de ceux que les anciens concordats ne manquaient presque jamais d’accorder aux souverains catholiques, et nous avons dit que le Code n’a pas modifié les situations concordataires. En fait, cependant, ce mode de pourvoir les sièges épiscopaux devient de plus en plus rare, et la papauté semble vouloir profiter de toutes les occasions pour le faire totalement disparaître. Les derniers traités de paix ont bouleversé profondément la carte de l’Europe en matière de concordats. Après 1918, plusieurs puissances héritières d’un empire démembré crurent pouvoir revendiquer le bénéfice des conventions jadis conclues par le Saint-Siège avec les pouvoirs dépossédés. Théoriquement, si le Saint-Siège l’avait voulu, ces accords pouvaient garder leur valeur en vertu d’une tacite reconduction, puisque le nouvel État se substituait à l’empire défaillant. Mais le Saint-Siège ne le voulut pas. Benoît XV exposa très clairement le point de vue papal dans une allocution consistoriale du 21 novembre 1921. Acta ap. Sed., t. xiii, p. 521, n. du 23 novembre 1921. Les concordats en question, déclara-t-il, sont res inter alios acta ; ils ne peuvent procurera des tiers ni avantages ni préjudices ; or, les nations issues de la guerre, ou agrandies par elle de nouvelles provinces, ou encore tellement modifiées qu’elles ne peuvent plus être considérées comme la même personne morale qu’avant la guerre, sont des » tiers » : ce n’est pas avec elles que le Saint-Siège a contracté. Si, ajoutait le pape, elles désirent elles-mêmes conclure des conventions, rien de mieux ; mais il laissait entendre que ce serait sur des bases différentes. En fait, aucun des concordats signés depuis la guerre n’a accordé à un chef d’État le droit de nommer aux évêchés. Bien plus, le roi de Bavière possédait ce privilège depuis 1817, A. Mercati, op. cit., p. 591, et il paraît bien que ce pays n’ayant pas changé de situation territoriale, mais seulement de régime politique, le président de la république héritait de plein droit de la prérogative royale. Or, un nouveau concordat ayant été conclu en 1924, le droit de nomination y a été remplacé par autre chose, dont nous parlons un peu plus loin, et vers quoi s’orientent les préférences pontificales. Acta ap. Sed., t. xvii, p. 4L n. du 24 janvier 1925.

A notre connaissance, le choix des évêques n’appartient plus régulièrement, aujourd’hui, au chef de l’État, qu’en France, pour les deux sièges de Metz et de Strasbourg, en vertu du concordat de 1801, maintenu en vigueur en Alsace et Lorraine ; en Espagne, à Haïti (concordat de 1860, A. Mercati, op. cit., p. 930) et au Pérou. L’Espagne est le pays où le droit de nomination remonte le plus haut ; déjà le concile de Tolède de 681 y fait allusion, Décret de Gratien, dist. LXIII, c. 25 ; la convention du Il janvier 1753 le donne comme un état de choses existant, que personne ne songe à modifier, et qui s’appuie sur de nombreux documents anciens, A. Mercati, op. cit., p. 425, n. 5 ; il ne se limite pas à la péninsule, mais s’étend aux possessions d’outremer, ibidem (c’est à une situation identique qu’a mis lin la séparation de l’Église et de l’État au Portugal,