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    1. OXFORD MOUVEMENT D)##


OXFORD MOUVEMENT D). LES PREMIERS TRACTS

1682

mon et des fidèles, ce qui permit de faire aboutir un second projet : deux adresses furent envoyées à l’archevêque de Cantorbéry, le D r Howley ; la première, couverte de 7 000 signatures de membres du clergé (plus de la moitié), présentée en février 1834, et la seconde, rédigée par Jos. Watson, signée de 230 000 chefs de famille, remise en mai 1834. Cette agitation eut pour effet de relever le courage des clergymen et de leur montrer qu’ils étaient plus forts que leurs ennemis ne le croyaient. Cf. A. Perceval, Collection of papers, p. 12.

Plusieurs des amis de Hadleigh s’en seraient volontiers arrêtés à ce succès d’estime et se seraient tenus pour satisfaits d’avoir réveillé les sympathies du clergé et des fidèles pour l’Église établie. Mais déjà d’autres avaient employé une méthode plus directe et plus efficace : ils s’étaient adressés au grand public par les Tracts for the times, publiés, non pas au nom d’une commission, mais sous la responsabilité personnelle de leurs auteurs et sans visa de comité.

III. Les premiers tracts (1833-1835). — 1° Le chef du mouvement. — Il fallait dissiper l’ignorance, cause d’une grande partie du mal dont soufflait l’Église, il fallait instruire, non seulement les fidèles, mais les clergymen eux-mêmes, sans excepter les évêques. C’est pourquoi on choisit la ville universitaire d’Oxford, pour être le centre de l’agitation, à rencontre du désir de Palmer, qui aurait préféré Londres. Partant d’un milieu intellectuel réputé et considéré comme le représentant officiel des idées High Church, les publications feraient une plus forte impression que si elles sortaient de l’agitation polilique de Londres.

L’instigateur de ces publications fut J.-H. Newman. Il avait subi, à l’âge de quinze ans, une première crise intérieure. Il en sortit, à la suite de lectures dans les théologiens de l’école évangéliste, fortement imprégné des idées de ce parti, imbu de convictions antipapistes. A Oxford, où il entre, en 1810, au collège de la Trinité, et où il est reçu fellow d’Oriel en 1822, il se laisse gagner par Wathely au libéralisme, qu’il jugera plus tard un rationalisme antidogmatique. Ce caractère même du libéralisme devait lui déplaire ; ses études sur les Pères, ses relations avec Hawkins, qui proclamait la nécessité de la tradition, avec W. James, qui enseignait la doctrine de la succession apostolique, les conceptions mêmes de Wathely sur l’indépendance de l’Église, les conférences du D r Lloyd (évêque d’Oxford en 1827), highehurchman, qui s’efforçait d’insinuerdans l’esprit de ses auditeurs des vues plus catholiques, ses relations avec Ed. Pusey, le détachèrent du libéralisme. Nommé tutor à Oriel, en 1826, il prend au sérieux ses fonctions, exerçant une influence considérable sur les undergraduates ; et lorsque, en 1828, il ajouta à ses fonctions de tutor celles de curé de Sainte-Marie, il commença à réunir autour de lui plusieurs amis, deux de ses pupilles, Fr. Rogers et H. Wilberforce, puis Gladstone, dirigeant leurs études et leur vie morale. R.-H. Froude, pour qui Xewman eut d’abord de la méfiance, finit par le dégager de toute attache à l’évangélisme et par le gagner aux idées orthodoxes, en l’engageant à étudier les théologiens du xviie siècle et à reprendre sérieusement la lecture des Pères ; il lui inspira son dégoût du formalisme superficiel et routinier, son besoin d’une vie religieuse profonde, son amour des âmes. L’évolution était terminée en 1829. Xewman n’hésite pas à reconnaître qu’il tenait de Keble et de Froude ce qu’il y avait de meilleur en lui. « Je me sens quelque chose comme la gêne d’un coupable, quand on me loue de mes découvertes… Vous et Keble êtes les philosophes, et moi le rhétoricien. » A. Mozley, Lelters and correspondence of J.-H. Newman, during his life in the English Church, t. ri, p. 174.

Lorsque Keble donna son sermon sur l’apostasie nationale, Newman rentrait d’un voyage en Italie et en Sicile, à la fin duquel, au cours d’une grave maladie, il avait eu la conscience très nette qu’il avait une œuvre à accomplir dans son Église. Elle allait commencer. Il sera le chef et l’âme du mouvement tractarien ; même lorsque Pusey entrera dans la lutte, en 1836, et que l’opinion publique donnera le nom de puseyisme au mouvement, Newman en restera le directeur spirituel et le véritable chef.

Les Tracts for the times.

Le 9 septembre 1833,

d’accord avec Froude et Keble, mais sans consulter ses autres amis, Rose, Palmer et Perceval, il publie le premier Tract d’une série qui en devait compter quatrevingt-dix, sous le titre : Tracts put forlh to meet the exigencies of the times. Ce premier Tract était intitulé : Thoughts on the ministerial commission, respectfullu addrcssed to the elergy. Il était publié sans signature, et il en devait être ainsi des autres : il suffisait que l’on sût qu’ils venaient d’Oxford. De fait on le saura aussi tôt, et ils seront bientôt désignés sous le nom û’Oxforu Tracts. Cf. Lett. and cor., t. i, p. 440, 483 ; t. ri, p. 8. Les premiers seront de courts traités de quelques pages, le n° 1 n’en a que trois, contenant des affirmations très nettes sur la question posée, sans discussion, sans argumentation : on voulait faire pénétrer la doctrine. La difficulté, au début, était de pourvoir à leur diffusion : Newman et ses amis s’en chargèrent, colportant eux-mêmes ces publications dans les presbytères.

Ce premier appel au mouvement est adresse : « A mes frères dans le ministère sacré, les prêtres et les diacres de l’Église du Christ en Angleterre, ordonnés à ces fonctions par le Saint-Esprit et l’imposition des mains. » L’auteur se justifie de garder l’anonymat : il ne veut pas se donner trop d’importance, en parlant en son nom propre. Mais devant le silence de tous, il ne peut se taire. Laissera-t-on les évêques porter tout le poids de la lutte sans les aider ? Sans entreprendre sur leurs droits de successeurs des apôtres, on peut leur servir d’écuyers. Newman montre le danger d’être abandonné par l’État, de tomber sous la dépendance et la servitude des fidèles, comme cela se passe chez les dissidents. L’Église a des titres de créance, qu’il faut revendiquer. Ces titres ne se trouvent pas dans la popularité, le succès, les distinctions temporelles ; ils ne sont pas des affirmations gratuites. « Le fondement réel de notre autorité repose sur notre origine apostolique. Noire-Seigneur a donné le Saint-Esprit aux apôtres ; ceux-ci l’ont donné à leur tour, et le don sacré est arrivé jusqu’à nos évêques. En sommes-nous suffisamment persuadés ? » Cette doctrine de la succession apostolique est affirmée par le rite de l’ordination. C’est l’idée essentielle du Tract : elle sera l’idée maîtresse de cette première partie du mouvement. Elle conduira Newman et les tractariens à remonter à l’Église apostolique. L’auteur du Tract touche à un autre point de doctrine qui se développera également dans la suite et donnera avec le premier les traits caractéristiques du mouvement : « De même, nous devons considérer les sacrements comme nécessaires au salut, parce que Dieu en a fait les moyens pour obtenir la grâce. »

D’autres Tracts suivent rapidement le premier : ils traitent toutes sortes de questions : le bill irlandais, les altérations dans la liturgie et le service des funérailles, la succession apostolique, la constitution de l’Église du Christ, sa notion et son essence, son autorité, les rapports de l’Église actuelle avec l’Église primitive, les objections historiques contre les privilèges, les dogmes et le culte de l’Église anglicane, la prière, la discipline ecclésiastique, les défauts des Églises chrétiennes, le jeûne, la communion fréquente… Ils