Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 11.2.djvu/230

Cette page n’a pas encore été corrigée
1593
1594
ORNEMENTS SACRES. ORIGINE


secretarium, où le pontife s’est habillé, pour appeler la schola, il tient sur le bras gauche la mappula du pontife en signe d’autorité. A cause de cette variété d’usages, le manipule a porté différents noms : manipulas au viiie siècle, mappula jusqu’au xe, manuale, brachiale, setace, sudarium ; au ixe siècle, il était porté par les prêtres, les diacres, les sous-diacres, les clercs ; au xiie par tous les moines avec l’aube ; au xme, il fut regardé comme l’insigne du sous-diaconat. Le symbolisme que l'église a conservé est suggéré par le premier usage : la sueur, les larmes appellent l’idée du travail, de la récompense ; le pontifical lui fait signifier le fruit des bonnes œuvres ; avant la messe, le prêtre l’appelle, à peu près dans le même sens, manipule des larmes et de la douleur.

L’aube dérive de la tunique, vêtement habituel de dessous au ive siècle. Le premier usage qu’on en fait dans l'Église semble avoir été d’en revêtir les néophytes au moment de leur baptême ; dès le vie siècle, à Rome et en Afrique, les clercs avaient pour la messe des tuniques spéciales ; mais, jusqu’au xe siècle, les canons sont obligés de rappeler qu’on ne devait pas t sacrifier avec la tunique dans laquelle on dormait ». Le surplis, le rochet et la cotta sont des aubes, raccourcies pour la commodité, que l’on substitua à l’aube, à partir du xiie siècle, dans l’administration des sacrements. Par sa blancheur, elle appelle le symbole de la pureté. Le terme « blanchi dans le sang de l’Agneau » dont se sert le prêtre en la prenant est sans doute une réminiscence de l’Apocalypse : l'Église, épouse du Christ, arrive aux noces de l’Agneau parée d’un fin éclatant et pur. Le fin représente les vertus des saints, parure de l'Église. Or, les saints ont lavé leur robe dans le sang de l’Agneau, c’est-à-dire ont trouvé leur courage, conservé l’innocence dans la grâce de Jésus. Apoc, viii, 14 ; xix, 7-8.

Le cordon aide à serrer l’aube autour des reins et à la relever s’il le faut. Le cingulum était à l'époque classique une pièce indispensable du costume des hommes et des femmes, au point que l'épithète diseinclus impliquait un relâchement des mœurs. Au ive siècle, il n'était plus employé que par les travailleurs : le clergé ne l’adopta point d’abord et le pape Célestin reproche aux évêques de Gaule de porter une ceinture autant que de se revêtir du pallium. Par commodité, par humilité aussi, saint Benoît le donna à ses moines, et les clercs l’adoptèrent par imitation ; il apparaît dans le costume liturgique au viiie siècle avec VOrdo romanus / «  « . Amalaire profite de l’idée morale qui s’attachait au port de la ceinture pour faire du cordon le symbole de la continence ; l’idée n’a point changé et le prêtre dit encore en se ceignant pour la messe : « Ceignez-moi de la ceinture de la pureté, éteignez en moi les flammes de la concupiscence, afin que je garde la vertu de continence et de chasteté. »

L’amict, que l’on met sur le cou en le croisant sur la poitrine et en le fixant avec des cordons, n’est point, comme on l’a dit, une imitation de l'éphod du grandprêtre juif ; ni, sans doute, un dérivé des brassières avec lesquelles les moines serraient leur tunique pour travailler. Voir Batiffol, Études de liturgie, p. 52. Il vient plutôt du linge porté par les anciens, appelé amiclus, focale, palliolum, une sorte de cravate que l’on se mettait au cou et sur les épaules, sous la pœnula ou la dalmatique, pour se garantir du froid. Dernier venu des ornements du prêtre à la messe, il n’apparaît qu’au viiie siècle dans VOrdo romanus lus sous le nom d’anagolaium, transcription du grec àva66Xoaov ; il est appelé aussi anagologium, anabolagium ; le terme amiclus est plus tardif et n’existe qu’au ixe siècle dans la liste des dons faits par Angilbert à l’abbaye de Saint-Riquier. Amalaire a profité de l’usage qu’on en faisait pour protéger la gorge, par conséquent la voix :

il lui attribue le symbole de modération, de discrétion dans le langage. De ecc. off., II, 17 ; P. L., t. cv, col. 1094. L’idée est conservée par le pontifical qui fait dire à l'évêque ordonnant le sous-diacre : « Recevez l’amict qui désigne la modération que vous devez avoir dans vos paroles. » On l’a porté longtemps sur l’aube ; on avait même pris l’habitude de s’en couvrir la tête comme d’un capuchon, les moines le font encore, le sous-diacre le reçoit ainsi à l’ordination et le prêtre le pose encore sur sa tête avant de le mettre sur les épaules. Il est assez difficile d’expliquer l’origine de ces pratiques surtout de la dernière sur laquelle est basée le symbolisme du casque : « Placez sur ma tête, dit le prêtre en le prenant, le casque du salut pour repousser les tentations du démon. »

La chape paraît avoir été primitivement un manteau avec capuchon pour garantir de la pluie, pluviale ; les jeunes gens qui demandaient à entrer dans l’ordre de saint Benoît l’apportaient souvent avec eux. Au Xe siècle, le mot pluviale devient liturgique, niais il a perdu le sens de manteau pour la pluie et, dès le début du ixe siècle, les grands monastères possédaient pour les offices des jours de fête des manteaux précieux appelés pluviale ou cappa ; au xe siècle, il y en a déjà beaucoup, Rome n’admettra la chape, comme vêtement strictement religieux, qu’au xiie siècle. Le mantum du pape, la cappa magna de l'évêque, l’aumusse, la mozette sont des dérivés de la chape dont le capuchon s’est diminué, dont la partie qui forme manteau s’est allongée ou rétrécie.

L’huméral était d’abord un sac de toile que les acolytes suspendaient à leur cou pour recevoir le pain destiné à être consacré ; ils pouvaient s’en servir aussi pour porter la sainte eucharistie dans les tituli qui devaient la recevoir de la messe papale, aux détenus pendant la persécution, aux malades. Les sousdiacres en usaient quelquefois comme d’une écharpe pour présenter à l’autel les lourds calices ministériels. L’huméral était donc d’abord un objet de première nécessité ; quand on a cessé de recueillir le pain, quand la communion ne fut plus donnée aux fidèles que sous une espèce, ce sac servant au besoin d'écharpe devint inutile. Il se transforma en voile, prit les couleurs des ornements, fut orné comme eux et on en fit usage pour couvrir le calice, le ciboire en signe d’honneur. Le voile du calice, venu beaucoup plus tard, n’est en somme qu’un humerai plus petit : aux messes privées, aux messes des morts, les ministres n’avaient rien à porter et l’on pouvait se contenter de couvrir le calice d’une étoffe moins grande.

Vers le xie siècle les évêques adoptent dans les cérémonies pontificales les bas et les sandales, les gants et le succinctorium, enfin la mitre, le pallium, parties de vêlements portés autrefois par les sénateurs, en assemblée ou autrement. Le pape commença souvent de s’en servir le premier, puis les évêques : c’est une marque de l’accroissement de puissance de ceux-ci à partir du xe siècle et de la place d’honneur qu’ils occupent dans la hiérarchie féodale.

Ornements de l’autel.

D’autres ornements ne

sont point portés par les ministres, mais entourent l’autel.

C’est d’abord Vantipendium, voile qui tombe devant l’autel, ante pendere. Pour expliquer son origine, il faut se le représenter comme une partie détachée de la nappe qui recouvrait l’autel et descendait jusqu'à terre par devant et sur les côtés ; peu à peu, pour plus de commodité, on a échancré ce voile dans les coins, ensuite on a séparé ce qui tombait par devant et cette partie est devenue un parement indépendant de la nappe. Dès la plus haute antiquité, l’autel est considéré comme la figure du Christ, il est le Christ lui-même ; au ive siècle, on disait déjà que,