Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 11.2.djvu/131

Cette page n’a pas encore été corrigée
1395
1396
ORDRE. LA THÉOLOGIE ORIENTALE


guée à nouveau par le concile in Trullo, can. 6 et 13. Les fonctions du sous-diacre grec ne ressemblent pas d’ailleurs aux fonctions du sous-diacre latin ; voir Jugie, op. cit., p. 407. Le lecteur grec a des fonctions assez chargées : il remplit une partie des fonctions de l’acolyte, une partie des fonctions du sous-diacre latin ; voir Sirnéon de Thessalonique, op. cit., c. clx, col. 365-368.

3° Matière et (orme du sacrement de l’ordre. — 1. Matière. — Peu de choses sont à ajouter à ce qui a été dit plus haut ; voir col. 1257. Quelques remarques empruntées à J. Morin font ressortir opportunément les divergences de l'Église latine et des Églises orientales.

Dans l'Église latine, ne sauraient jouer le rôle de matière du sacrement : pour l'épiscopat et la prêtrise, que l’imposition des mains, la porrection des instruments, l’onction ; pour le diaconat, que l’imposition des mains et la porrection des instruments ; pour le sous-diaconat et les ordres mineurs que la porrection des instruments. Dans l’eucologe byzantin, seule l’imposition des mains, yeipOTOvîa ou /eipcOsaîa, peut jouer le rôle de matière du sacrement, non seulement pour les trois degrés supérieurs, mais encore pour le sous-diaconat et le lectorat. Il y a bien, chez les Grecs, une certaine tradition des instruments, mais cette tradition ne se fait qu’une fois l’ordination déjà terminée, et, exception faite pour l’imposition de l'évangéliaire sur le cou du candidat à l'épiscopat, qui est une cérémonie très ancienne commune aux Grecs et aux Latins, elle n’est pas primitive. Il faut encore ici remarquer que l’imposition de l'évangéliaire au futur évêque ne se fait pas dans toutes les Églises orientales : l'Église d’Alexandrie, par exemple, l’omet. J. Morin, op. cit., part. II, exercit. xi, c. vii, p. 171.

Avec Morin, il faut noter une triple différence dans la tradition des instruments chez les Grecs et chez les Latins : 1° Chez les Latins, cette tradition a lieu au début du rite de l’ordination ; chez les Grecs, elle ne se fait qu’une fois l’ordination achevée. — 2° Chez les Latins, la tradition des instruments, tout au moins pour le sous-diacre et les ordinands inférieurs, est le rite même de l’ordination ; chez les Grecs, ce n’est qu’un symbole qui marque les prérogatives déjà concédées dans l’ordination. — 3° Chez les Latins, la tradition est accompagnée de formules expressives, qui sont comme la forme du rite ; chez les Orientaux, il n’y a aucune formule accompagnant la tradition des instruments. Id., exercit. xi, c. vii, p. 170.

D’où vient cette divergence dans le choix de la matière des ordres inférieurs ? C’est, pense Morin. qu’en Orient, les formules employées pour l’ordination de l'évêque, du prêtre et du diacre ont été étendues à l’ordination des clercs inférieurs ; en Occident, l'Église a fait emprunt des formules et gestes par lesquels on créait les titulaires des emplois civils. Id., exercit. xi, c. v, p. 165.

L’onction faite avec l’huile n’a jamais été pratiquée dans l'Église orientale : la seule onction dont parlent les Pères est l’onction spirituelle et mystique, qui signifie la collation des grâces de l’Esprit-Saint. Seul, Job le Pécheur fait allusion à l’onction matérielle employée pour le sacre des empereurs, ou, dans certaines églises, pour le sacre des évêques. Bibl. nat., Sapplém. grec. n. 64, fol. 246. Mais cette allusion ne peut concerner que le rite latin ou le rite arménien. Id., exercit., vi, c. i, p. 97-98. Cf. Arcudius, De concordia Ecclesiæ orienlalis et occidentalis…, Paris, 1619, t. VI, ci, p. 476-479.

Tous les théologiens orientaux admettent donc unanimement que la seule matière du sacrement de l’ordre est l’imposition de la main de l'évêque. Gabriel

Sévéros, op. cit., p. 93, et Pierre Moghila, Confession orthodoxe, part. I, q. cix, Kimmel, t. i, p. 186 ; q. exi, p. 189, parlent de la porrection des instruments comme matière de l’ordination ; mais, déclare le P. Jugie, c’est pour « latiniser ». L’interprétation des PP. Malvy et Viller de la pensée de Pierre Moghila ne paraît pas exacte. La confession orthodoxe de Pierre Moghila, Paris, 1928, p. 66, n. 2 (texte grec).

2. La forme.

En ce qui concerne le sous-diaconat et le lectorat, il ne saurait y avoir de difficulté. Les eucologes indiquent l’oraison, qui doit être récitée sur l’ordinand pendant l’imposition de la main : et telle est la forme.

Mais pour les ordres supérieurs, la discussion que nous avons déjà rencontrée, voir ci-dessus, se retrouve chez les théologiens orthodoxes. Ou plutôt, la plupart d’entre eux acceptent purement et simplement que la formule efficace soit la prière Divina gratia, suivant en cela le sentiment d’Arcadius, de Goar et des autres signalés plus haut. Tels sont N. Bulgaris, op. cit., p. 18 ; Mésoloras, op. cit., p. 328 ; Dyobuniotis, op. cit., p. 154 ; Koidakis, KaTr^rjOiç, Athènes, 1906, p. 164, parmi les théologiens grecs modernes ; et, parmi les russes, Lebedinsky, op. cit., p. 523 ; Antoine Amphitheatrow, op. cit., § 315 ; Ph. Gumilevsky, op. cit., p. 206-207 ; Macaire, op. cit., p. 494495. On retrouve la même opinion professée par le synode ruthène de Zamosz, 1720, Synodus provincialis Ruthenorum habita in civitate Zamosiee, 2e édit., Rome, 1838, p. 100 ; par un autre synode ruthène de Lwow, 1891 ; cf. Acta et décréta synodi Leopoliensis, Rome, 1895. Il semble bien que le fondement de cette opinion soit l’interprétation donnée par Siméon de Thessalonique sur le sens de la prière Divina gratia, op. cit., c. clxix, col. 377 A B.

Un seul auteur contemporain, Malinovsky, se rallie à la solution préconisée par le P. Hanssens, op. cit., p. 418. Le P. Jugie préconise la solution de J. Morin, op. cit., p. 418.

Des effets du sacrement de l’ordre et principalement du caractère.

1. La grâce. — La formules de l’ordination dans les différents rites orientaux sont assez

expressives pour qu’aucun théologien ne puisse révoquer leur efficacité quant à la grâce conférée par le sacrement. Mais un certain nombre de théologiens orthodoxes contemporains ne parlent pas de grâce sanctifiante, mais plutôt de pouvoir spirituel conféré par le sacerdoce. Aussi affirment-ils l’inamissibilité de cette grâce, tandis que par une inconséquence étonnante, ils nient l’existence du caractère. S. Lebedinsky, op. cit., dont la théorie de la justification est d’ailleurs empruntée aux luthériens ; Dyobuniotis, op. cit., p. 159. Par contre, certains canonistes et théologiens byzantins exagèrent tellement l’efficacité de l'épiscopat, qu’ils assimilent cet ordre au baptême, déclarant que to yçiay.'x -rrjç àpyteptoaûv/jç efface totalement les péchés commis avant sa réception. Voir, sur ce point, Théodore Balsamon, In can. 12 concilii Ancyrani, P. G., t. cxxxvii, col. 1156-1157 ; Démétrius Chomaténos, Kesponsum XV ad C. Cabasilam, dans Pitra, Analecla sacra, t. vii, col. 645-646. Sur les raisons qui sont invoquées par ces auteurs, voir Jugie. op. cit., p. 420-421.

2. Le caractère indélébile.

Le caractère indélébile a été attaqué, en Russie, par Philarète Drozdov, pour complaire au procureur du Saint-Synode, désireux de promulguer une loi réduisant les clercs à l'état laïque. Sobranie mnenii i otzyvov Philareta (Collection des mémoires et réponses de Philarète), t. iv, Moscou, 1886, n. 539, p. 478-482 ; n. 561, p. 579-582. Pour cet auteur, il n’est question du caractère de l’ordre ni dans l'Écriture, ni chez les Pères, ni dans les canons conciliaires. Il n’est question que du caractère du