Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 11.1.djvu/89

Cette page n’a pas encore été corrigée

163

NESTORIENNE (L'ÉGLISE) SOUS LES SASSANIDES

164

diffusion de la religion chrétienne ; en outre, dans celle région montagneuse, il devait être assez facile de se cacher, et il se peut que la province soit devenue de bonne heure un lieu de refuge pour beaucoup de fidèles, venus des provinces orientales de l’empire romain, où la persécution sévissait à l'état endémique. Il est certain d’autre part que l’Adiabène comptait au ive siècle une forte proportion de chrétiens, mais on aura peine à croire, sur le seul témoignage de la Chronique, p. 30, trad., p. 106, Sachau, p. 61 sq., qu’il y ait eu en Perse, dès l’an 224, « plus de vingt sièges épiscopaux ». Voici les dix-sept qui sont nommés Beit-Zabdaï, Karkâ d’Beit-Slok, Kaskar, Beit-Lapat, Hormizdardasir, Përat-d’Maysân, Henaytâ, Harbagelâl, Arzon, Beit-Niqator, Sahrqart, Beit-Meskenê, Hulvvân, Beit-Qatarâyë, Beit-Hazzàyë, Beit-Daylomâyë, Siggâr. Nisibe et Séleucie-Ctésiphon sont expressément mentionnées comme n’ayant pas encore d'évêques, « par crainte des païens ».

Sur les Actis de Thomas, voir É.Amarin, art. Apocryphes du Nouveau Testament, dans Supplément au Dictionnaire de la Bible, Paris, 1928, t. i, col. 501-504, avec une abondante bibliographie, à laquelle on pourra ajouter : J. N. Farquhar, The aposile Thomas in norlh India, dans Bulletin of the John Rylands Librarꝟ. 1920, t. x, p. 80-111.

Sur l’ensemble du paragraphe, Mari, p. 1-8, trad., p. 16 ; Amr et Sliba, p. 1-13, trad., p. 1-8 ; J. Labourt, Le christianisme dans l’empire perse sous la dynastie sassanide, Paris, 1904, p. 9-17 ; W. A. Wigram, An introduction to the history o/ the assyrian Church or the Church of the Sassanid persian empire (100-640 A. D.), Londres, 1910, p. 19-39, qui donne pleine confiance à Msiha-zka et aux Acta S. Maris.

Sur la Chronique d’Arbèles : Baumstark, Geschichle…, p. 135. Les observations du P. Pecters ne semblent pas avoir ébranlé la confiance du P. Zorell, son confrère, à qui l’on doit une traduction latine, plus accessible que la traduction française de Mingana, Chronica Ecclesiæ Arbelensis, dans Orienlalia christiana, t. viii, fasc. 4, n. 31, Rome, 1927, p. 141-204. On y trouvera, p. 148, l’indication de plusieurs travaux faits d’après la Chronique sur la diffusion et l’organisation du christianisme en Orient.


III. L'Église de Perse sous la dynastie sassanide (224-632). —

L’avènement d’Ardasir I er marque pour la Perse le début d’une nouvelle ère de puissance. Bêvant de rétablir l’ancien empire des Achéménides, le Boi des rois prend immédiatement comme pivot de sa politique extérieure la guerre contre les Bomains : dès 237, il réussit à s’emparer des deux boulevards de l’Occident à la limite du désert, Nisibe et Harràn. Quelques années plus tard, son successeur, Sapor I er, pousse ses armées jusqu'à Anlioche, assiège Édesse et réduit Valérien à une humiliante captivité, Après bien des alternatives de guerre et de paix, les dernières années de la dynastie sont remplies par le formidable raid de Chosroès II en 614 sur les territoires de l’empire byzantin, suivi de la foudroyante réplique d’Héraclius en 624. L'état de guerre presque continu entre Constanlinople et Ctésiphon a eu sur le développement du christianisme en Perse une influence considérable,

Il est pour la même époque un autre fait à peine moins important : 1a forte organisation du sacerdoce païen. Sasân, l'éponyme de la dynastie, élait prêtre du feu à Istakhr-Persépolis. Son petit-fils, Ardasir, magnifia autant qu’il le put sa religion, qui devint pour lui-même et ses successeurs une religion d'État. C. Huart, La Perse antique et la civilisation iranienne, Paris, 1925, p. 147-149. Conviction religieuse ou raison d'État, peu importe : les princes sassanides ont vu dans les mages les meilleurs auxiliaires de leur politique ; en conséquence, ils ont donné dans leurs conseils une part prépondérante aux chefs du magisme, c’est le plus souvent à leur instigation qu’ils ont persécuté les chrétiens.

Organisation des chrétientés.

Quoi qu’il en soit

de cette situation doublement défavorable, c’est sous la domination des Sassanides que l'Église chrétienne s’est développée et organisée en Perse. Les témoignages indiscutables manquent pour marquer les étapes de l'évangélisation : on devra tenir en tout cas, comme un minimum incontestable, les conclusions que M. von Harnack avait enregistrées avant la publication de la Chronique d’Arbèles, dans Die Mission, ele, 3e édit., Leipzig, 1915, p. 149-151. Les premières communautés furent fondées probablement en 260 par des captifs transportés de Cœlésyrie, qui avaient des prêtres et des évêques avec eux. Le fait est acquis pour Gondê-sabûr ou Beit-Lapat. La Chronique de Séert dit en outre que l’arrivée des captifs syriens fut l’occasion d’une rapide diffusion du christianisme en Perse, et signale que deux églises furent édifiées alors à Bewardasir, une pour les Grecs et une pour les Syriens. Palrologia orientalis, t. IV, p. 222 [12], (texte corrigé par Seybold, Zeitschrift der deulschen morgent ândischen Gesellschaft, L lxvi, 1912, p. 745 sq.). On doit conclure en outre des actes des martyrs qu’il y avait des chrétientés avant 325 à Nisibe, Karkâ d’Beit-Slok, Arbèles, Sahrqart, Darâ, Bët-Lasom, Kaskar.

Il y avait aussi une Église constituée à SéleucieCtésiphon avant la fin du iiie siècle : la. Chronique d’Arbèles lui donne comme premier évêque Pâpâ bar Aggaï, après avoir signalé que deux évêques d’Adiabène, Sahlûpâ et Ahadabûhi, avaient pris soin auparavant de la petite chrétienté non encore pourvue d’un pasteur spécial. La donnée sur Pâpâ correspond à celle relevée ci-dessus dans les Acta S. Maris, qui font de Pâpâ le successeur immédiat du disciple d’Addaï. Il semble en outre que la Chronique d’Arbèles, mettant en connexion avec Séleucie-Ctésiphon les deux évêques Sahlûpâ et Ahadabûhi, explique la présence de leurs deux noms dans la chronique de Mari, au début de la liste patriarcale, où cependant ils se trouvent en ordre inverse.

La Chronique de Séerl ne contient rien sur l’accession de Pâpâ au siège de Séleucie. La première fois qu’elle le cite, c’est dans un texte un peu troublant, où il est associé à Sahlûpâ, comme si tous deux avaient exercé ensemble le catholicat : « Au temps de Sahlûpâ et de Pâpâ, catholicos de l’Orient, et d’Etienne, patriarche de Borne… », P. O., t. iv, p. 236 [26]. Elle dit ensuite que sous Bahram II, Pâpâ endura de grandes souffrances, p. 238 [38 ], puis elle ne contient plus qu’une allusion aux difficultés qu’il eut avec les évêques et ses ouailles, au début de la notice sur son successeur, Simon I er bar Sabbâ'ë, p. 296 [86].

Mais l’histoire de Pâpâ ne saurait être traitée si brièvement, car il a tenu une place à part dans l’organisation de l'Église de Perse. Les diocèses, au début du ive siècle, étaient imparfaitement délimités, les élections épiscopales sans contrôle ; il n’y avait pas de patriarche à proximité devant qui porter les questions discutées. Pâpâ « forma le dessein de fédérer toutes les chrétientés persanes sous l’hégémonie de l'évêque des Villes Boyales ». Labourt, op. cit., p. 20 sq. Ceci n’alla pas sans difficultés. Deux récits de la controverse sont parvenus jusqu'à nous, l’un dans les actes de saint Miles, évêque de Suse, qui semble avoir été le chef de l’opposition, Et. Évode Assémani, Acta sanctorum martyrum orientalium et occidentalium…, part. I, Borne, 1748, p. 72 sq. ; P. Bedjan, Acta martyrum et sanctorum, t. ii, Paris et Leipzig, 1891, p. 266268 ; l’autre dans les actes du synode tenu par Dadiso' en 424, Synodicon orientale, p. 46-48, trad., p. 289292. Le premier de ces récits, comme il convient, donne raison à Miles, le second au contraire montre Pâpâ accusé injustement. Il est certain qu’un synode des