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    1. NESTORIUS##


NESTORIUS, ÉPILOGUE DE LA CRISE

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tinople deux prêtres, porteurs de leurs observations et d’un volume de Théodore, scire volentes utrum doctrina Theodori an Ra.bu.lm et Acacii verà esse probaretur. dit Libératus.

Proclus répondit à cette consultation par une lettre dogmatique fort importante, souvent citée lors de l’atïaire des l’rois-Chapitres. (Elle ne figure pas dans les collections anciennes du concile d’Éphèse ; mais a été introduite dans les éditions, Mansi, t. v, col. 421437. texte grec avec la traduction latine de Denys le Petit : cf. A. C. O., iv, 2, p. 187-205.) Proclus y qualifie durement les représentants de la théologie antiochienne, réfute à la manière accoutumée les arguments apportés en faveur de leur dyophysisme exagéré, et propose une doctrine qui, tout en maintenant l’idée des deux natures, sauvegarde mieux l’unité fondamentale du Christ. Libératus a déjà remarqué l’emploi qu’il fait d’une formule sur laquelle on reviendra beaucoup par la suite : « Confessons, disait Proclus, que le Dieu-Verbe, l’un de la Trinité, s’est incarné : confitentes Deum Verbum, unum e.v Trinitate, incarivttum. » Il parlait aussi de l’unique hypostase du Verbe divin incarné, jxîav ôfjt, oXoYW Trjv toû crapxoj0£vtoç QsoO Xôyo’j Û7tôaTaaiv, formule qui, dans sa pensée, recouvrait selon toute vraisemblance l’expression eyrillienne p.îor tpùcnç toû 0eoù Xôvou aïaapy.tofiivr ;, mais qui permettrait ultérieurement d’introduire la distinction, plus récente, entre la <pûaxç et l’Û7r6aTaai.ç. Enfin, il s’élevait assez vivement contre l’idée de répartir entre deux principes distincts les actions du Sauveur.

Tel quel, ce document penchait vers la théologie eyrillienne, et prononçait contre la christologie antiochienne certaines exclusives, dont quelques-unes ne cadraient pas tout à fait avec les termes de l’Acte d’union. Que Proclus répondît en ce sens à la consultation des Arméniens, c’était assurément son droit : ce qui est plus étrange, c’est qu’il ait émis l’idée d’exiger des Orientaux une souscription à sa lettre dogmatique, et un anathème contre diverses propositions de Théodore qu’il y avait annexées. C’est ce que nous apprenons par une lettre de saint Cyrille à Acace de Mélitène. Synod., n. 303 (212), A. C. O., i, l, p. 231 ; P. C ;..i. i. xxxiv, col. 837 : cf..Mansi, t. ix. col. 409. Cyrille ajoute : Ipsi vero non passi sunt. Deinde scripserunt ad me, si anathematizari contigerit scripta Theodori, ornnino percurrere hanc maculam et ad sanctos Patres nostros : Athanasium dieu et Basilium et Gregorium et Theophilum et cseteros. Mais l’invitation de Proclus était appuyée d’une lettre impériale, prescrivant au patriarche d’Antioche et à son synode de ne pas troubler la paix ecclésiastique. Synod.. n. 310 (219), p. 241 ; col. 849. Une fois de plus, Jean dut s’incliner. Il écrivit à Proclus pour lui signifier que le synode des Orientaux savait maintenant à quoi s’en tenir sur la secte de Nestorius : qux nvde sapait vel di.vit h ce omnes abjecimus et anathenvdiziwimus, et qui ea excipiunt et qui eadem quæ ille aliène a pia con/essione sapiunt. Mais il voulait s’en tenir au symbole de Xicée, se contentant d’analhématiser ceux qui s’en écartaient ou l’interprétaient mal ; et il indiquait les Pères soit grecs, soit latins au sentiment desquels il entendait se conformer. I ! ne laissait pas d’exprimer son mécontentement pour tant de nouvelles exigences : toute cette affaire avait été réglée quatre ans auparavant : il ne comprenait vraiment pas cette agitation sans cesse renaissante. Synod., n. 287 (1 ! I7), p. 208-210 ; P. G., col. 810 sq. ; cf. n. 286 (l !)(i), p. 208 : col. 800. l’ne lettre adressée à l’empereur ajoutait qu’il n’apparaissait nullement nécessaire de revenir sur la doctrine de personnages morts dans la paix de l’Église : Quorum enim in sacerdotioet sacris operibus optimum

ftnem vita suscepit, lus pristinam gloriam dedieamus, et non eos judicamus ab eis ex quibus eos audæter quidam reprehendere volant. Ibid, n. 290 a, p. 213 ; P. G., col. 815.

C’est dans le même sens que Jean écrivait à saint Cyrille (lettre dont parle Cyrille dans le texte cité ci-dessus, retrouvée et publiée par E. Schwartz, Konzilstudien, p. 62-66). Celui-ci s’entremit auprès de Proclus pour appuyer la dernière considération qu’avait fait valoir l’évêque d’Antioche, il invoqua le précédent du concile d’Éphèse qui avait condamné un symbole de foi attribué à Théodore, mais sans mentionner le nom de celui-ci, pour ne pas éveiller les susceptibilités des Orientaux. Lettre à Proclus, dans Mansi, t. ix, col. 409 ; lettre à Jean dans Schwartz, loc. cit., p. 67. Mais Cyrille était trop persuadé du danger créé par la théologie antiochienne pour arrêter vraiment la campagne ; c’est à ce moment qu’il rédigea son traité contre Diodore et Théodore qui alimentera plus tard la controverse des Trois-Chapitres (indications fournies par la lettre à Acace de Mélitène, Mansi, t. ix, col. 410).

Les subordonnés de Jean ne montraient pas tous la même patience que lui. En Syrie euphratésienne, la lutte de Proclus contre Théodore amenait Ibas, qui depuis 435 remplaçait Rabbula sur le siège d’Édesse, à prendre la défense de « l’Interprète » ; L’archevêque de Constant inople en prit ombrage et enjoignit, sur un ton comminatoire, à Jean d’Antioche d’exiger, de toute urgence, l’adhésion d’Ibas à son tome aux Arméniens. FYagment de lettre dans Mansi, t. ix, col. 270. Nous ignorons quelle suite fut donnée pour l’heure à cette injonction ; mais Ibas ne tardera pas à s’attirer de bien autres mésaventures.

Toute cette agitation autour des anciens docteurs antiochiens finit pourtant par se calmer. Les uns après les autres disparaissaient, d’ailleurs, les protagonistes des grandes lutles ; Jean d’Antioche mourait en 441 ou 442, saint Cyrille en 444, Proclus en 446. De Nestorius, toujours vivant dans son exil libyen, personne ne semblait plus s’inquiéter. Le calme allait-il revenir dans l’Église ?

On le pensait en Syrie, où, depuis la mort de Cyrille, on se croyait en sécurité. La théologie antiochienne, si durement refoulée dans les années précédentes, reprenait une nouvelle vigueur. Sous la plume de Théodoret, le grand docteur de l’école, elle se débarrassait de certaines imprudences de langage qui l’avaient antérieurement compromise. Le dyophysisme, par les soins de l’évêque de Cyr, prenait définitivement figure d’orthodoxie, juste à l’époque où plusieurs des partisans de Cyrille exagéraient, jusqu’à l’hérésie, les doctrines professées par le grand Alexandrin.

C’est à ce moment aussi qu’Irénée, revenu en faveur auprès de Théodose, était nommé évêque de Tyr et ordonné parle nouveau patriarche d’Antioche, Domnus, avec l’assentiment explicite de Proclus, cf. P. G., t. lxxxiii, col. 1305 C, indice tout à fait remarquable de l’apaisement des esprits.

2° La fermentation monophysite. Ce calme était trompeur. Enhardi par le succès de la théologie eyrillienne où il cherchait son point de départ, le monophysisme prenait conscience de lui-même, réussissait à se faire appuyer à la cour, trouvait en Dioscore, successeur de Cyrille sur le trône d’Alexandrie, un très ferme défenseur, et ne lardait pas à être pour l’Église d’Orient un véritable danger. Nous n’avons pas à raconter ici par le détail l’histoire de l’eutychianisme, voir l’art. Eutychès, mais il est indispensable, pour une intelligence complète de la crise nestorienne, de faire état des premières manifestations qui s’en produisirent. D’autant que, du