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OPTAT DE MILÈVE


nem, innocentise portum, peccalorum naufragium : lias res unicuique credenti non ejusdem rei operarius, sed credentis /ides et Trinitas prseslat. V, i, col. 1047, p. 121. Cf. viii, col. 1058, p. 134, où le ministre du baptême est comparé au fabricant de pourpre, qui ne produit pas de lui-même la précieuse couleur, mais est obligé de l’emprunter aux coquillages marins : si iqitur operarius iste per taclum solum dare colorcm non potest, sic nec operarius baptismatis ex se sine Trinitate dare aliquid potest. L’action de Dieu est attachée à l’invocation du nom des trois personnes de la Trinité, nous dirions aujourd’hui à l’observation des rites prescrits. Mais les dispositions personnelles de celui qui se soumet à ces rites entrent aussi en ligne de compte : Restât jam de credentis merilo aliquid dicere, cujus est fides, viii, col. 1060, p. 137. Par où l’on voit qu’Optât pose, avec un commencement d’exactitude, les principes relatifs à l’efficacité des sacrements que saint Augustin ne tardera pas à développer. On comprend dès lors l’âpreté avec laquelle il condamne la pratique donatiste de la rebaptisation, sans se douter qu’elle pouvait se réclamer du patronage de saint Cyprien.

Les sacrilèges violences dont les donatistes ont usé pour imposer leur baptême aux catholiques déjà baptisés, ne sont pas, hélas, les seules qu’on peut mettre à leur compte. Le livre Vf accumule les récits des multiples attentats contre les choses saintes et les personnes consacrées à Dieu dont les donatistes se sont rendus coupables, tout spécialement depuis leur retour sous Julien l’Apostat ; autels et calices brisés (noter en passant ce qui est dit des autels in quibus et vota populi et membra Christi portala sunt, VI, i, col. 1065, p. 142), vierges sacrées contraintes, après pénitence, à une nouvelle profession religieuse, livres saints dérobés aussi bien que les objets de culte, cimetières enlevés aux catholiques. On sent passer dans ces pages l’indignation de l’auteur, au souvenir d’événements tout récents et dont il a été le témoin. Mais ce qui, peut-être, lui tient encore plus à cœur, c’est le succès que la propagande <lonatiste a rencontré dans les milieux catholiques, la pénible transformation qu’elle a opérée chez ceux qui se sont laissés séduire : ex ovibus subito facti sunt vulpes, ex fidelibus perfidi, ex patientibus rabidi, ex pacifleis litigantes, ex simplicibus seductores, ex verecundis impudentes, féroces ex mitibus, ex innocentibus malitiee artifices. VI, viii, col. 1080, p. 155.

Nous nous sommes expliqué ci-dessus sur la manière dont a pris naissance le livre VIL C’est un conglomérat de morceaux d’origine diverse. Le début (une fois retranchées les interpolations signalées plus haut) est une protestation de bienveillance adressée par Optât aux dissidents ; l’Église catholique est prête à les accueillir aujourd’hui, comme elle était prête à accueillir leurs ancêtres de la première génération. (L’interpolateur a inséré dans ces déclarations une excuse en règle de la conduite des traditeurs, qui détone singulièrement.) A la suite de l’invitation d’Optat viennent « trois petites dissertations sans lien entre elles, destinées probablement à être insérées dans d’autres parties de l’ouvrage : deux discussions sur l’interprétation des textes bibliques qu’avaient récemment allégués des donatistes, et une apologie de Macaire, le terrible artisan de l’unité, que les dissidents reprochaient aux catholiques d’avoir admis à la commuhion. » Monceaux, cp. cit., p. 263.

4° Valeur. — Comme nous l’avons indiqué, la part faite à la théologie dans l’œuvre d’Optat n’est pas très considérable. Nous avons souligné au passage l’ébauche qu’il donne d’une théorie des notes ou caractères de la véritable Église et l’amorce d’une

discussion sur l’efficacité des sacrements. Tout cela aura besoin d’être repris, complété, précisé, aussi bien que les idées formulées par lui sur la répression de l’hérésie par la violence. Sur ce dernier point la pensée d’Optat hésite encore. L’évêquc de Milève voudrait bien laisser à l’État seul la responsabilité des mesures coercitives prises contre les dissidents ; il se rend bien compte qu’il y a dans l’emploi de la violence, même au service de la vérité, quelque chose qui n’est pas entièrement d’accord avec l’esprit de l’Évangile. Il plaide, en faveur des sévérités mises en œuvre par les « artisans de l’unité », les circonstances atténuantes : au fond ce sont les donatistes qui ont commencé. Il ne laisse pas de trouver néanmoins que la sévérité eut parfois de bons résultats, et qu’elle est dès lors moins haïssable qu’il ne semblerait au premier abord. Arguistis operarios unitatis : ipsam unitalem improbale, si potestis ! Nam sestimo vos non negare unitatem summum bonum esse. Quid nostra, quales fuerint operarii, dummodo quod operaium est bonum esse constet ? Nam et vinum a peccatoribus operariis et calcatur et premitur et sic inde Deo sacripeium offertur… III, iv, col. 1012, p. 85. Saint Augustin, dans la seconde phase de sa lutte contre le donatisme, se reconnaîtra en ces pensées.

C’est surtout comme historien qu’Optât présente de l’intérêt. Sa sincérité et sa bonne foi, mises en doute fort imprudemment par les critiques allemands D. Vœlteret O. Seeck, ont été magistralement démontrées par L. Duchesne. Soucieux d’opposer aux documents plus ou moins apocryphes, fréquemment allégués par les donatistes, des pièces d’une authenticité vérifiée, Optât s’est appliqué à réunir un dossier du donatisme aussi complet que possible, et ce dossier il s’en est servi avec beaucoup d’habileté. Insuffisante et présentant de graves lacunes pour la période des origines du schisme (Optât, par exemple, ne connaît pas l’existence du concile d’Arles), la documentation d’Optat est beaucoup plus complète pour l’époque qui suit. L’évêque de Milève avait su réunir sur ce temps-là un ensemble de pièces de tout premier intérêt : édits impériaux, lettres et rapports des gouverneurs, pièces judiciaires, actes des conciles donatistes, mandements et lettres pastorales des éveques dissidents, etc. A ces documents écrits, auxquels il renvoie fréquemment, s’ajoutaient les témoignages oraux et les souvenirs personnels de l’auteur. On comprend la haute valeur d’un écrit appuyé sur une telle masse de preuves. L. Duchesne et P. Monceaux l’ont admirablement mise en lumière ; depuis leurs travaux, il n’y a plus à s’attacher aux objections qu’une critique un peu rapide avait accumulées contre l’œuvre d’Optat. Sans doute les recherches ultérieures d’Augustin, à l’époque de la grande conférence de 411 ont-elles abouti à éclairer davantage une histoire, qui fut, dès les origines, infiniment compliquée, mais c’est en prenant comme point de départ l’œuvre de l’évêque de Milève, que l’évêque d’Hippone est arrivé à ce résultat. Comme le dit très justement P. Monceaux, Augustin « a perfectionné la machine de guerre, mais cette machine avait été conçue, exécutée, mise en mouvement, par Optât de Milève, qui dans ce domaine a été le précurseur et le maître d’Augustin. » Op. cit., p. 306.

Un sermon nouvellement découvert d’Optat.


En 1917, dom G. Morin, a publié, en appendice à un recueil de sermons inédits de saint Augustin, un sermon, De natale Domini, qu’il attribuait hypothétiquement à Optât de Milève : S. Aurel. Augustini tractatus sive sermones inedili, Kempten et Munich, 1917, p. 167-178, cf. p. m. Ce sermon était publié d’après un ms. de Wolfenbùttel du ixe siècle. En 1922, utilisant un ms. de Fleury-sur-Loire du viii siècle (aujour-