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OLIKR. VIE


Le tableau de cette activité pastorale a servi de modèle à beaucoup de curés, même de nos jours.

En face de ce zèle les oppositions ne manquèrent pas. Trois ans après son entrée dans la paroisse, en 1644, une persécution violente fut soulevée par des gens que gênaient ces réformes, sous prétexte de soutenir les droits de l’ancien curé. Le presbytère fut envahi, pillé, lui-même traîné par les rues, frappé de coups ; il ne dut son salut qu’au dévouement d’amis qui réussirent à le faire entrer au palais d’Orléans. L’ordre fut rétabli par l’autorité de la reine, et la persécution ne servit qu'à affermir le bien déjà commencé. En 164H-1652, les deux Frondes donnèrent un singulier exercice à son zèle : la paroisse était alors déjà si bien formée, que, dans l’ensemble, le faubourg resta fidèle au roi ; mais les misères profondes, dont ces luttes furent cause, lui donnèrent occasion de multiplier d’une façon incroyable son zèle et sa charité.

Grâce à ces œuvres diverses d’instruction, de piété, de charité, et à la sainteté du curé et de ses collaborateurs, au bout de dix années seulement la prédiction, qui lui avait été faite au début, se réalisa : la paroisse devint la plus fervente de la capitale et le bien produit alors a persévéré à travers le temps et les révolutions et dure encore.

Il avait été également prédit à M. Olier qu’il ne serait curé que pendant dix ans. En 1652, rien ne faisait prévoir qu’il dut bientôt être obligé d’interrompre son ministère, lorsque tout à coup, à la date indiquée, il fut atteint d’une fièvre si violente, qu’il ne restait plus d’espoir au médecin ; le 20 juin, il crut devoir donner sa démission et M. de Bretonvilliers, son disciple préféré, fut installé curé de Saint-Sulpice. L’année suivante il fut frappé de paralysie : sa vie se prolongea dans la souffrance, quatre années encore, durant lesquelles il perfectionna l'œuvre du séminaire.

Séminaire. — La mission principale de M. Olier était l'établissement du séminaire. Mais son acceptation à2 la cure de Saint-Sulpice avait été utile a la fondation de ce séminaire et la fondation achevée, la paroisse fut près de celui-ci comme une école d’application des principes qu’on y recevait. « Maintenant que Dieu va nous établir sur la paroisse de Saint-Sulpice, il nous montre qu’il veut former en cî lieu un séminaire ouvert à toutes les provinces. Voilà pourquoi Dieu veut l'établir dans u î lieu qui n’est ni borné, ni rétréci par aucune juridiction particulière, car cette paroisse n’est d’aucun diocè ; e : elle relève immédiatement du pape. Ce séminaire étant destiné pour le service de l'Église universelle, il était convenable qu’il fût fixé dans un lieu qui n’eut d’autres bornes ou d’autre dépendance que celle du Saint-Siège, à l’honneur duquel il se consacre entièrement. » Établi d’abord rue Guisarde dsrrière le presbytère, il fut transféré, en 1645, rue du Vieux-Colombier, dans une construction nouvelle élevéî par Le Mercier, l’architecte du Louvre.

M Olier donna à ce séminaire un règlement, non celui d’un collège, ni celui d’un noviciat, mais qui devait être accommodé à son double caractère de maison d'étude et de formation spirituelle. Il en traça un qu’il dit avoir pris dans les conciles, les Pères et le ; institutions de saint Charles : ce fut d’abord une ébauche : car il laissa au temps et à l’expérience la charge de préciser et de donner la forme que nous ont conservée les anciens règlements du xvir 3 siècle. Ce qu’il y a de particulier, c’est que la méthode pour obtenir l’accomplissement de la règle diffère du régime de surveillance continue et assez méfiante des séminaires de saint Charles. On compte davantage sur la conscience, sur des procédés de cordialité et

de confiance, sur une discipline paternelle qui assure une obéissance plus spontanée. Be plus, la communauté de vie entre maîtres et élèves est plus complète que dans les autres séminaires fondés en même temps à Paris. Dans ceux-ci, les directeurs, tout en demeurant dans la même maison, ont une certaine vie à part, vie de congrégation. Séparément de la communauté ils font une partie de leurs exercices, l’un d’eux durant ce temps, étant chargé de la surveillance. A Saint-Sulpice, maîtres et élèves suivent la même règle, participent aux mêmes exercices comme l’oraison, l’examen particulier, les offices de la chapelle, les récréations, etc. Tout se fait au nom de la règle à laquelle tous sont assujettis. Cette vie commune, ce contact assidu, cet exemple journalier ont une vertu particulière pour faire accepter la règle, et la faire pratiquer par conscience. Le règlement qui dirige maîtres et élèves n’est que l’armature extérieure. Le principe de vie, dans la pensée de M. Olier est l’esprit même de Jésus-Christ. La maxime fondamentale du séminaire est marquée en tête de l’opuscule Pietas seminarii rédigé par le fondateur : Primarius et ultimus finis hujus seminarii est vivere summe Deo in Christo Jesu.

Le séminaire n’est pas seulement un lieu de formation aux vertus et à la vie ecclésiastique, il est aussi une maison d'études. Dans un écrit sur la fin du séminaire Saint-Sulpice, M. Olier s’exprime ainsi au sujet des études : « On aura soin que rien ne manque de ce qui peut servir à l’instruction des élèves. On s’efforcera donc d’instruire chacun selon sa portée, dans la philosophie, la théologie scolastique, morale et positive, et aussi dans les controverses, afin qu’ils soient toujours prêts à rendre raison de leur foi. »

Ceux qui désiraient obtenir les grades théologiques allaient chaque jour en Sorbonne. Après y avoir écouté les leçons des professeurs, de retour au séminaire, ils avaient des répétitions ou conférences sur les mêmes matières. Pour ceux qui n’allaient pas en Sorbonne, il était plus difficile, surtout durant les quarante ou cinquante premières années, d'établir des cours adaptés à un auditoire aussi varié que celui de ce temps-là. A côté de jeunes gens qui venaient de terminer leurs études littéraires et philosophiques, on voyait un bon nombre de pensionnaires plus âgés, déjà prêtres, chanoines, curés, qui venaient chercher dans la maison autre chose que la science théologique, étant déjà licenciés ou docteurs. Cette composition du séminaire au début explique la part plus considérable donnée dans les règlements primitifs aux exercices de piété, oraison, récitation en commun de l’office, et aussi la nature des études qui occupaient le reste du temps : cas de conscience, cérémonies ecclésiastiques, administration des sacrements. Au profit des plus jeunes qui n’allaient pas en Sorbonne, se donnaient des conférences sur la théologie dogmatique, mais l’enseignement était avant tout pratique, visant à donner à chacun ce qui permettait d’exercer le saint ministère. Pour les uns et les autres on ajoutait des conférences sur l'Écriture sainte et l’histoire ecclésiastique.

Après un stage plus ou moins long, les élèves du séminaire passaient souvent deux ou trois ans à la communauté de la paroisse Saint-Sulpice, qui demeura ainsi jusque vers la fin du xviie siècle une école d’application. (Fénelon y passa trois années). C’est ce qui explique le nombre des ecclésiastiques vivant à la communauté de la paroisse, qui s'éleva jusqu'à 90 à l'époque de M. Tronson.

Plusieurs évêques demandèrent au fondateur de Saint-Sulpice des prêtres de sa compagnie pour diriger leurs séminaires. Il ne put accepter, et c'était son inclination, que la direction d’un petit nombre. Il