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OCCASION — OCHIN


divisle qui se trouve dans l’occasion involontaire et physiquement ou moralement nécessaire, dont il souhaiterait sortir, si la chose devenait possible. Il en va bien autrement du récidiviste, qui entend demeurer dans une occasion volontaire et libre. Nous allons le dire.

2. Cas de l’occasion volontaire et libre.

Nous n’avons pas à parler de ceux qui sont résolus à vivre dans une occasion de ce genre. Leur mauvaise volonté est évidente et l’on ne peut les absoudre. Nous avons cité plus haut la condamnation portée par Innocent XI contre la 60e proposition laxiste à ce sujet.

Mais si le récidiviste se présente à nouveau au tribunal de la pénitence avec le ferme propos de se soustraire à l’emprise de l’occasion prochaine, faut-il l’absoudre ?

a) Si l’occasion est continue, et par conséquent toujours présente, à qui en est victime, ainsi cohabitation dangereuse, statues indécentes en sa maison, etc., régulièrement il ne faut pas l’absoudre, avant qu’il ne s’en soit libéré. De fait, on peut suspecter à bon droit la sincérité de son ferme propos l’expérience ayant montré qu’il n’a pas été suivi d’effet. « Il faudrait donc, dit saint Alphonse (n. 454), le regarder comme récidiviste et ne pas l’absoudre à moins qu’il n’apporte des signes extraordinaires de repentir. » S’il apporte ces signes, on pourrait l’absoudre « parce que à cause de ces signes le confesseur peut prudemment estimer, que le pénitent n’est pas dans un péril prochain de manquer à sa résolution : ces signes en effet indiquent qu’il a reçu une grâce plus abondante pour écarter l’occasion avec plus de fermeté. Néammoins Roncaglia dit que lui-même en ce cas différerait l’absolution jusqu’à ce que l’occasion fût écartée, si l’absolution pouvait commodément être différée. Et moi aussi j’agirais de cette manière » (n. 454).

b) Si l’occasion volontaire est discontinue, interrompue et n’exerce son influence que par intervalles, ainsi fréquentation des jeux, des danses, des cabarets, etc., il sera plus facile d’ajouter foi au ferme propos du pénitent. C’est pourquoi, dit saint Alphonse (ibid), « saint Charles enseigne avec raison que, si le pénitent se propose fermement de se garder contre elle, on peut l’absoudre une, deux ou même trois fois. Après cela, si aucune amélioration ne survient, on doit différer l’absolution, jusqu’à ce qu’il ait efficacement renoncé à l’occasion. » Mais ici encore et avec plus de facilité, que dans l’occasion continue, on pourrait l’absoudre, d’après l’opinion commune, chaque fois, qu’il se présente avec des marques extraordinaires de regret, surtout s’il se trouve dans une nécessité grave, par exemple, dans le besoin de communier en telle ou telle circonstance. Plusieurs même, estimant saint Alphonse trop sévère, se contentent des signes ordinaires de repentir avec une promesse sérieuse de se mieux garder. Ainsi de Lugo, Ballerini, Noldin, Genicot, Arreguy, etc. - — Enfin en sa prudence le confesseur s’efforcera de mieux disposer son pénitent et de le fortifier en ses résolutions. Au besoin il différera pour un peu de temps l’absolution, car, dit saint Alphonse « on ne peut lui administrer un antidote plus efficace » (n. 456).

Conclusion. — Pour tâcher de mettre un peu de clarté, dans cette matière, que l’on regarde comme assez embrouillée, nous avons dû multiplier les distinctions portant sur les diverses situations, où peut se trouver un occasionnaire. En ce dédale, le fil conducteur sera toujours le grand principe : sans doute, le fait de l’occasion prochaine est une présomption en faveur de l’absence des dispositions requises pour l’absolution ; mais, lorsque l’on peut prudemment juger que le pénitent est, hic et nunc, bien préparé à la recevoir, on peut la lui accorder, suivant la règle générale du sacrement de pénitence.

E. Thamiry.

    1. OCHIN Bernardin de Sienne##


OCHIN Bernardin de Sienne, capucin italien, passé à la Réforme (1487-1564/5). — I. Vie. II. Œuvres. III. Évolution religieuse.

I. Vie.

Fils de Dominique Tommasini, barbier, il naquit en 1487 à Sienne, dans le quartier « dell’Oca » (de l’oie), d’où son surnom d’Ochin. Entré vers 1504 chez les frères mineurs de l’observance dans la province de Toscane, il débuta huit ans plus tard dans le ministère de la prédication où il devait s’illustrer jusqu’à devenir l’orateur sacré le plus applaudi de la Péninsule. En même temps, son habileté dans le maniement des affaires attirait sur lui l’attention de ses supérieurs : dès 1520 le ministre provincial de Toscane, le religieux-gentilhomme Bernardin Tolomei, déclarait plaisamment « qu’il avait fait le bec à l’oie » (par allusion au surnom d’Ochin), en vue de lui assurer sa succession. En effet, lors de l’érection de la custodie de Sienne en province au chapitre général de Burgos (1523), ce fut Bernardin Ochin qui en devint le premier supérieur. Depuis cette date jusqu’à sa défection en 1542, il se vit confier presque sans interruption des charges importantes : au chapitre général d’Assise (1526), il représente sa province et revendique pour elle, avec succès, la préséance sur son ambitieuse consœur de Florence ; en 1531, le ministre général Paul de Parme nomme Ochin son commissaire à Venise, avec mandat d’y faire élire des supérieurs à sa dévotion ; deux ans plus tard, Ochin est membre de la commission chargée de remédier aux abus commis par ce général, et, la même année, 1533, après le décès du commissaire général Benoît Genesius, il administre les provinces cismontanes en qualité de vicaire général. Au début de l’année suivante, il quitta l’Observance pour rejoindre la jeune réforme capucine, à peu près en même temps que d’autres observantins renommés, tels que Bernardin d’Asti, François de Jesi et Jean de Fano. Définiteur général dès 1535, sa nouvelle famille religieuse l’élisait vicaire général en 1538, et le confirmait dans cette charge trois ans plus tard.

A ce moment, Ochin est sans doute le franciscain le plus en vue de l’Italie : Paul III le traite avec faveur, princes et cardinaux se pressent autour de sa chaire, toutes les villes, de Palerme à Venise, se disputent le privilège de l’entendre, le grand public le vénère comme un saint, et ses confrères, heureux de bénéficier de son prestige et de ses relations, le proclament un supérieur modèle. Mais, depuis plusieurs années, les idées de réforme avaient opéré dans son âme un lent travail de désagrégation qui, le jour où il crut se trouver devant la perspective inévitable d’un procès en hérésie, le décida brusquement à rompre avec l’Église catholique.

Au début de septembre 1542, à cinquante-cinq ans sonnés, il passait les Alpes et se rendait à Genève, où Calvin l’accueillait avec satisfaction. Sous prétexte que le vœu de chasteté l’empêchait de suivre librement la voix de Dieu, et voulant aussi sans doute prouver ouvertement sa rupture avec Rome, il épousa à Genève, vers 1544, une femme originaire de Lucques qui s’était mise à son service lors de sa fugue, et dont il eut quatre fils et deux filles. Jusqu’au mois d’août 1545, Ochin resta à Genève en qualité de ministre de la communauté italienne réformée ; ensuite il se rendit à Augsbourg, dont le sénat lui confia les mêmes fonctions. Mais Charles-Quint ayant exigé son extradition après la victoire de Mûhlfeld (1547), il s’empressa de gagner l’Angleterre avec son ami Pierre-Martyr Vermigli. Thomas Cranmer, heureux d’une telle acquisition, le nomma prédicateur italien à Londres et lui octroya une prébende canonicale de Cantorbéry, sans obligation de résidence. En 1553, l’avènement de Marie Tudor mit fin au séjour d’Ochin en Angleterre et