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OCCASION, OCCASIONNAIRES


péché. Ils se trouvent d’ailleurs dans l’occasion désormais pour eux involontaire et pratiquement inévitable pour l’instant. Le confesseur se contentera donc de leur promesse, dont ils manifesteront la sincérité en acceptant de prendre les moyens matériels et spirituels aptes à rendre éloignée l’occasion prochaine, comme il a été dit plus haut.

2e Hypothèse : l’occasionnaire est récidiviste. — Celui-là seul est récidiviste qui, après avoir été averti du péril que lui fait courir l’occasion, revient avec les mêmes fautes, sans aucun commencement de correction. Ne serait donc pas formellement récidiviste, au sens strict, celui qui aurait fait des efforts quelque temps couronnés de succès ou serait retombé malgré lui, après avoir usé des moyens que lui a suggérés son confesseur.

1. Cas de l’occasion involontaire et nécessaire.

A ceux qui sont victimes d’une occasion vraiment nécessaire, contre laquelle ils ont la bonne volonté de se garder (leur démarche le montre), une grave obligation s’impose d’user des moyens aptes à rendre éloignée l’occasion prochaine ou de se soustraire courageusement à l’emprise de cette dernière, quoi qu’il leur en coûte.

Cette deuxième solution ne peut évidemment être proposée à ceux qui se trouvent dans l’occasion physiquement nécessaire : que cette occasion soit continue, comme il arrive à ceux qui, par exemple, sont enfermés dans le même cachot que leur complice - ou qu’elle soit discontinue, interrompue, comme il arriverait à un forçat, qui par intervalles serait conduit pour des travaux en tels lieux, où il rencontrerait nécessairement l’occasion prochaine de pécher. Elle ne peut être proposée non plus à ceux qui vivent dans les occasions moralement nécessaires, que nous avons rangées dans la première catégorie, ces occasions dont on ne peut se dégager sans se rendre par ailleurs coupable de quelque faute grave, v. gr. : pour un soldat, déserter : pour une épouse, abandonner le domicile conjugal, etc. (cf. supra, I, 2°). A ceux-là, la première solution, c’est-à-dire l’emploi des moyens propres à rendre éloignée l’occasion, peut seule être imposée.

Quant à ceux qui se trouvent dans les occasions moralement nécessaires de la deuxième catégorie : celle des inconvénients graves résultant d’un grand dommage spirituel ou temporel : scandale public, ou perte de réputation, ou encore abandon d’une profession, dont on tire ses moyens d’existence, mais qui à certains jours exige des démarches inévitables et dangereuses ;

— à ceux-là l’alternative est possible : ou bien leur imposer l’abandon de l’occasion malgré les difficultés et les risques de cette résolution, ou bien leur imposer l’emploi des moyens, dont nous avons parlé. Cf. l re hypothèse, a), b), c).

Quelle méthode suivre ? Le confesseur en demeure juge en face de chaque cas concret qui se présente. Qu’il se souvienne seulement que sa sagesse doit l’empêcher d’aller aux extrêmes. En effet en théorie, d’une part, « il ne faut pas exiger une séparation absolue et déterminée, si cela est notablement plus difficile à réaliser que l’emploi de remèdes suffisants pour éviter le péché au sein même de l’occasion. » Cf. Lehmkuhl, Theol. mor., t. ii, n. 618. Mais, d’autre part, il est des circonstances où une solution radicale et brusquée est plus réalisable que l’effort continuel nécessité par la lutte contre l’occasion. — En pratique, il serait donc imprudent d’exiger du pénitent qu’il subisse un dommage très grave, tel que la perte de tous ses biens, de sa réputation, de sa vie même, alors qu’avec l’aide de la grâce divine une autre manière d’éviter le péché reste possible. Cependant si, par un acte héroïque de volonté, le pénitent se résout à briser tous les obstacles pour se soustraire à l’iniluence pernicieuse, il ne fau drait pas l’en dissuader « à moins que le dommage personnel par lui accepté n’entraînât un grave dommage pour des tiers, qui n’en peuvent mais » (Lehmkuhl, ibid.), par exemple, la ruine totale de sa famille.

Sous le bénéfice de ces observations préliminaires, abordons le problème de l’absolution pour ceux qui sont dans l’occasion prochaine involontaire et nécessaire, continue ou interrompue.

a) A celui qui se décide à une rupture violente il faut donner l’absolution, car il y est évidemment bien disposé. On la lui donnera sur sa promesse une première fois… Mais, s’il ne la tient pas, on en attendra ensuite l’exécution comme preuve de sincérité.

b) Quant à celui qui procède par l’emploi des moyens d’amendement à lui indiqués : a. S’il a été fidèle et énergique en son effort et, partant, a réalisé quelques progrès dans la vertu, on pourra l’absoudre en l’engageant à redoubler de courage. Il n’est plus en effet au sens strict un récidiviste et l’on constate ses bonnes dispositions. — b. Reste le cas de ceux qui, sous l’emprise d’une occasion physiquement ou moralement nécessaire, ne l’oublions pas, après avertissement, n’ont point tenu leur promesse de faire usage des moyens prescrits ou les ont employés sans succès. A l’égard de ces véritables récidivistes, comment agir ? Les théologiens proposent des méthodes différentes en leurs affirmations théoriques, mais en fait convergentes, avec certaines nuances, dans leurs conclusions pratiques. Les voici :

a) La première consiste à refuser l’absolution e lorsque n’apparaît aucune amélioration ni aucun espoir probable d’amélioration. » Saint Alphonse de Liguori, Theol. mor., t. VI, n. 457, adopte cette opinion, parce qu’il estime que ces rechutes éveillent une crainte légitime au sujet des dispositions du pénitent. Il veut donc que l’on diffère l’absolution jusqu’à ce que « le péril prochain soit rendu éloigné ». Ibid., n. 463.

Cependant il a admis, « qu’il faudrait parler autrement avec Holzmann, Laymann, Sporer, Sanchez, Navyrro et tous les autres, très communément, si, dans le moment présent, le pénitent apporte des signes extraordinaires de repentir, car alors resplendit l’espérance d’un amendement. » Ibid, n. 457. Et plus loin (au n. 460), il énumère ces signes extraordinaires qui permettent d’absoudre sans délai (stalim) l’occasionnaire récidiviste. Ce sont : le regret manifesté par des larmes, des soupirs, des paroles venues du cœur ; — une diminution du nombre des chutes ; — le zèle apporté à sa correction par jeûnes, aumônes, prières, messes, ainsi que la fuite spontanée des occasions et l’usage des moyens prescrits pour cela ; — la recherche personnelle de moyens efficaces ; — la démarche spontanée en vue de se confesser ; — un motif extraordinaire de componction tel que l’audition d’un sermon, la mort d’un ami, la crainte d’un cataclysme, et, ajouterons-nous, la bonne volonté réveillée par la prédication d’une mission ; — la confession de péchés autrefois volontairement cachés ; — une restitution déjà effectuée ; — l’aveu d’une compréhension meilleure de son péché et du péril de damnation, qu’il entraîne. « Ce sont marques de la bonne disposition du récidiviste, que les graves auteurs cités n’ont pas traduites au hasard, mais instruits par leur expérience. Aussi je pense que ne se trompera jamais, celui qui se dirige d’après leurs avis. » Ainsi parle saint Alphonse. — En de telles occurrences on pourra donc donner aussitôt l’absolution. On le pourra de même, s’il y a des difficultés à la différer, et alors on sera moins exigeant dans l’appréciation des signes de repentir.

P) On se contentera même trois ou quatre fois de marques ordinaires de repentir, dit une deuxième