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NOVATIEN. L’ÉGLISE NOVATIENNE


faveur. Les clercs resteraient dans le clergé moyennant une imposition des mains et un rejet explicite des doctrines rigoristes de la secte relativement aux bigames et aux lapsi. Dans les agglomérations qui seraient tout entières novatiennes et où il n’y aurait donc pas de clergé catholique, les clercs ainsi réconciliés conserveraient leur grade et leurs fonctions. Là où il y aurait déjà un évêque catholique, l’évêque novatien ne ferait que les fonctions presbytérales, mais l’évêque catholique pourrait lui donner le titre honoraire d’évêque ou de chorévêque. Cette disposition sous-entend que les prêtres et diacres venus du schisme prendront rang parmi leurs collègues catholiques. — Même libéralisme relatif dans les dispositions de la loi civile à leur égard. Alors qu’une loi du 1 er septembre 326 exceptait nettement les hérétiques et schismatiques de certaines faveurs accordées aux catholiques, le souverain, par une loi du 25 septembre, faisait aux novatiens une situation plus tolérable : Novatianos non adeo comperimus prsedamnalos, ut his quæ petiverunt crederemus minime largienda. On leur accordait donc la possession incontestée des lieux de culte et de sépulture, Codex Theodos., XV f, v, 2, édit. Mommsen, p. 855.

S’il faut admettre l’authenticité des documents contenus dans la Vila Constantini d’Eusèbe, ces dispositions favorables aux novatiens auraient fait place, dix ans plus tard, à une hostilité résolue. Les novatiens figurent en tête de la liste d’hérétiques à qui est adressée la lettre impériale du t. III, c. lxiv sq, P. G., t. xx, col. 1140 sq. Le souverain interdit à tous ces gens de s’assembler, même en des édifices particuliers, et confisque leurs lieux de prière, sùxTY)pfouç. Si elle a jamais été portée, cette loi ne fut certainement pas appliquée dans sa rigueur. Des persécutions furent dirigées ultérieurement contre les novatiens, mais parce qu’ils faisaient cause commune avec les cathoiques nicéens. Socrates a conservé le souvenir des cruels moments que passèrent à Constantinople tous ceux, catholiques ou novatiens, qui ne voulaient pas se rallier au credo de Macédonius (voir ici, t. x, col. 1471). L’évêque novatien Agélius dut prendre la fuite ; une de ses églises fut détruite et d’ailleurs promptement reconstruite dans un autre quartier, avec le concours des catholiques.

Survint le règne de Julien l’Apostat ; les novatiens purent rebâtir l’église détruite et lui donnèrent le nom d’Anastasie. L’homéisme de Valens ramena la persécution ; catholiques et novatiens connurent à nouveau les pires ennuis. Ne voulant point se rassembler dans les lieux de culte des ariens (homéens), les quelques catholiques demeurés fidèles fréquentaient les trois églises novatiennes qui finirent par être fermées ; Agélius fut une seconde fois exilé. Ces communes souffrances rapprochèrent novatiens et catholiques ; peu s’en fallut, continue Socrates, que l’union ne se fit complètement, jjuxpoù te èBérpzv èvco69jv ! n cxÙtoôç. Ce furent les novatiens qui "déclinèrent l’invitation. Mais le maintien de la barrière entre les deux groupes n’empêchait pas qu’on ne se rendit mutuellement des services. Les mêmes persécutions qui atteignaient les nicéens fidèles, à Constantinople, se répétaient dans les provinces voisines. A Cyzique, l’église nova tienne fut détruite, une expédition militaire fut organisée contre les novatiens de Paphlagonie, qui aboutit à de sanglantes rencontres. Tout ceci dans Socrates, H. E., II, xxviii. Il paraît que, vers la fin de son règne, Valens permit aux novatiens de Constantinople de rouvrir leurs églises, à la requête d’un (’e leurs prêtres, Marcianus, qui était le précepteur de ses deux filles. Ibid., IV, îx. Dans les provinces la persécution dura jusqu’à l’avènement de Théodose.

Nicéen fidèle, celui-ci ne pouvait se montrer sévère

à l’égard de ceux qui avaient souffert pour la foi de Nicée. On le vit bien lors de la conférence qu’il assembla à Constantinople en juin 383, pour mettre un terme aux dissidences religieuses. Fort embarrassé, l’évêque catholique, Nectaire, prit langue avec son collègue novatien, qui lui délégua son lecteur Sisinnius. Ibid., V, x, col. 584 sq. Peut-être le garant de Socrates donne-t-il ici un trop beau rôle à Sisinnius, qui aurait enseigné à Nectaire le vrai moyen de réduire les hérétiques plus ou moins arianisants par un appel aux anciens Pères. Quoi qu’il en soit, le fait qu’Agélius prit place aux côtés de Nectaire pour défendre Vhomoousios, ne pouvait qu’impressionner favorablement Théodose. Les novatiens reçurent officiellement l’autorisation de tenir leur réunions dans la capitale et d’y avoir leurs lieux de culte ; leurs églises jouiraient des mêmes privilèges que les églises catholiques. Voir Socrates, col. 592-593.

Cette tolérance ne devait pas durer longtemps ; bientôt le bras séculier, plus ou moins sollicité par l’autorité ecclésiastique, sévit contre les novatiens. A Rome, au dire de Socrates, VII, ix, col. 756, le pape Innocent I er (401-417) fut le premier à persécuter les novatiens auxquels il enleva beaucoup d’églises. Célestin (422-432) fit de même, et l’évêque Rusticula dut tenir ses assemblées en des maisons particulières. Ibid., xi, col. 757. Les choses n’allaient pas mieux à Alexandrie, où saint Cyrille menait la vie dure aux novatiens. Ibid., vii, col. 752. Socrates fait la remarque qu’à Constantinople, où sans doute l’on perdit moins aisément le souvenir des souffrances communes, la situation de la communauté novatienne resta bonne jusqu’à l’avènement de Nestorius (428). Aussi bien les évêques qui dirigeaient l’Église schismatique en imposaient-ils par leur science ou leur piété. Agélius, qui avait été si fort persécuté par les ariens, avait eu pour successeur Marcien, l’ancien précepteur des filles de Valens, puis Sisinnius dont la science théologique était appréciée de l’évêque Nectaire, et qui savait à l’occasion donner la réplique même à Jean Chrysostome. VI, xxi, col. 729. Après lui était venu Chrysanthe, fils de Marcien, qui avait fait antérieurement une brillante carrière dans l’administration civile, et dont le prestige consolida fort la position des novatiens de la capitale. VII, xii, col. 760. Paul lui succéda, qui de professeur de rhétorique latine s’était fait moine, avait groupé autour de lui un certain nombre d’ascètes et continua sur le siège épiscopal une vie de mortification et de prière admirable, si bien qu’on lui attribua divers miracles. Ibid., xvii, col. 772-773 ; et xxix, col. 828. C’est à lui que s’attaqua Nestorius dès sa prise de possession de Constantinople ; ayant fait détruire l’église des ariens, il pensa pouvoir agir de même contre les novatiens. Des personnes considérables parvinrent à l’en détourner. Ibid., xxix, col. 805. Paul mourut en 439, entouré de la considération de tous ; ses funérailles furent un triomphe, l’on y voyait des représentants de toutes les confessions religieuses, qui pour un instant ne formaient plus qu’une seule Église. Ibid., xlvi, col. 837. Il fut remplacé par Marcien II, avec lequel s’arrête pour nous J’histoire des novatiens de la capitale ; les continuateurs de Socrates n’ont pas songé à la poursuivre, Évagre le scolastique ne prononce même pas leur nom.

Il est probable que la loi de 428, rendue contre les dissidents à l’instigation de Nestorius, et qui mentionne les novatiens (et novatiani sioe sabbatiani) au troisième rang entre les apollinaristes et les eunomiens, ne fut jamais strictement appliquée. A toutes les sectes elle interdisait le droit de libre réunion, et prohibait toutes les libéral tés qu’on pourrait faire en leur faveur, Codex Theodos., XVI, v, 65, p. 878 (insérée au Code Justinien, I, v, 5). Tout cela resta théorique. II