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NOVATIEN. ENSEIGNEMENT TRINITAIKE


l’auleur dans les milieux catholiques, mais exclut formellement Novatien. Peut-être faudrait-il penser au pape Lucius. Cf. II. Koch, op. cit., p. 126 sq.

7. Les homélies dites Traclatus Origenis.

En 1900, P. Batiffol et A. Wilmart ont publié sous le titre : Traclatus Origenis de libris SS. Scriplurarum, vingt homélies latines (dont une seulement sur le Nouveau Testament), attribuées à Origène par les deux mss. connus Celte attribution fut presque aussitôt écartée ; outre que le latin semblait bien la langue originale de ces textes, rien n’y rappelait la manière du célèbre exégète. Le nom de Novatien fut presque aussitôt prononcé par C. Weyman, qui trouva quelque écho parmi Jes critiques. En 1902, Hermann Jordan.se croyait autorisé à reconstruire d’après ces homélies toute une théologie de Novatien. Die Théologie der neuentdeckten Predigten Novalians, Leipzig, 1902 (in-8 c de x-224 p. ; les p. 71-104 reproduisent textuellement la petite thèse publiée sous le même titre un mois avant le gros volume). Toute cette construction s’est montrée ruineuse. L’attribution des Traclatus à Grégoire d’EIvire, proposée en passant par dom Morin dès 1900, a été depuis solidement démontrée par dom Wilmart ; les soi-disant Traclatus Origenis présentent en effet une étroite parenté avec des Traclatus in Canlicum dont l’appartenance à l’évêque d’Elvire ne saurait faire de doute. Il faut donc abandonner sans restriction l’idée que Novatien serait l’auteur des Traclatus ; ce qui ne veut pas dire que son œuvre n’aurait pas influé sur Grégoire d’Elvire.

En définitive, comme œuvres certaines de Novatien, il faut compter, outre les deux lettres conservées par la correspondance de saint Cyprien, le De Trinilale et le De cibis judaicis ; à quoi il conviendrait d’ajouter : selon toute probabilité, 1e De spectaculis et le De bono pudicitiæ ; avec beaucoup moins d’assurance, le Quod idola DU non sinl, et son pendant Adversus Judasos ; le De laude martyrii nous paraît plus douteux encore. Les derniers écrits cités n’ont aucune chance d’appartenir à Novatien.

III. La doctrine.

Le schisme provoqué par

Novatien a eu comme point de départ une conception très rigoriste de la morale chrétienne, que Je prêtre romain opposait à un dangereux laxisme. Les œuvres que nous venons de passer en revue ne parlent nullement de cette opposition. Tout au plus pourrait-on dire que la morale qui s’y révèle apparaît quelque peu hautaine et intransigeante. Les lettres mêmes envoyées à saint Cyprien lors de la vacance du Siège apostolique et relatives à la question pénitentielle ne font en somme qu’approuver les décisions du primat d’Afrique et les principes qui les ont inspirées. Il nous paraît difficile d’y saisir la nuance particulière de sévérité que certains ont voulu y trouver. En somme la doctrine morale développée par Novatien se révèle, dans ses écrits, quelle que soit leur date, du même aloi que l’enseignement ordinaire de l’époque. Il n’y a pas d’importance spéciale à lui attacher. Tout ce qu’il dit est excellemment dit par d’autres en ces mêmes moments.

Tout autre est 1 importance du De Trinilale. En même temps qu’il marque très exactement le point où est arrivée la théologie occidentale dans les deux questions trinitaire et christologique, cet ouvrage a fourni un point de départ pour les spéculations ultérieures, et il y aurait toute une étude à faire (qui est à peine ébauchée) sur les répercussions qu’il a pu avoir. Autant que’Adversus Praxean deTertullien, il a contribué à former la théologie latine.

Dieu le Père.

Fidèle à la terminologie de son

époque (laquelle se manifeste tout spécialement dans le symbole baptismal), Novatien envisage l’essence divine moins en elle-même qu’en tant qu’elle est

possédée par le Père. Dieu, pour lui, c’est d’abord le Père. C’est au Père qu’il rapporte les attributs divins que nous avons accoutumé de rapporter & la divinité même : bonté, immutabilité, unité, incompréhensible lité. D’une rapide revue des textes scriptuniircs relatifs a Dieu, et qu’il cherche dans l’Ancien comme dans le Nouveau Testament, il conclut, avec beaucoup de sagesse, que leur interprétation doit se mettre en garde contre les anthropomorphism.es et les anthropopathismes si naturels à l’intelligence humaine. Si les prophètes ont usé d’expressions qui y prêtent, c’était pour se mettre à la portée des simples : non igitur mediocris est Deus, sed populi mediocris est sensus, nec angustus Deus, sed rationis populi anguslus est intellectus habilus. C. vi, P. I., t. iii, col. 922 D. Dans les paroles mêmes du Christ relatives a Dieu, il y a une part considérable d’accommodation, bien que le Christ ait fait faire à notre connaissance de Dieu un sérieux progrès. Car, comme le dit Novatien en une formule admirablement frappée : Id quod (Deus) est secundum id quod est, nec humano sermone edici, nec humanis auribus percipi, nec humanis sensibus colligi potest. C. vii, col. 924 C. Il n’est pas jusqu’à la qualification d’esprit qui ne doive être attribuée à Dieu avec discrétion (le mot est évidemment pris dans un sens plus matériel que nous ne faisons, traduire plutôt spiritus par souffle). Quoi qu’il en soit, on voit que Novatien affirme avec la plus grande force la transcendance du Père. Ce n’est point d’ailleurs qu’il ait la moindre complaisance pour le marcionisme et pour la doctrine du Dieu étranger au monde ; tout transcendant qu’il soit, le Père qui est dans les cieux est un Dieu provident qui gouverne le monde jusqu’en ses plus petits détails : pertingit consequenter ejus ad usque singula quæque cura, cujus ad tolum, quidquid est, pervenil providentia. C. viii, col. 926 B. Dieu de l’Ancien Testament, c’est lui aussi que connaît et qu’adore l’Église. Hune ergo, omissis hæreticorum fabulis atque figmentis, Deum novit et veneratur Ecclesia. C. viii, col. 925 B.

Le Fils de Dieu.

« La règle de vérité qui nous

oblige à croire au Père, nous enseigne aussi à croire au Fils de Dieu, le Christ Jésus, Notre-Seigneur et Dieu, mais Fils de Dieu. » C. ix, col. 927 B. Ainsi, quand il parle du Fils de Dieu, Novatien a tout d’abord dans l’idée le personnage historique de Jésus-Christ. Encore ici il est fidèle à la terminologie du symbole baptismal.

Sur le compte de ce personnage historique, deux opinions diamétralement opposées sont en présence (sans compter Je marcionisme, c. x), entre lesquelles la foi orthodoxe doit tenir un juste milieu. L’écrit de Novatien donne l’impression que les discussions théologiques si vives à l’époque précédente n’ont rien perdu de leur acuité. Comme au début du iiie siècle, modalisme d’une part (Sabellius est expressément nommé, c.xii, col. 933 D, 934 A), adoptianisme de l’autre exagèrent, chacun à sa manière, quand il s’agit du Christ. L’adoptianisme ne veut voir en lui qu’un homme ordinaire, homo nudus et solilarius, c. xi, col. 930 G, en qui se manifeste la même vertu divine qui anime les saints ; le modalisme l’assimile purement et simplement à une apparition sur la terre du Père céleste, transcendant au monde. A voir l’ampleur que donne Novatien à la discussion de l’adoptianisme, il semble bien que c’est cette hérésie qui des deux lui paraît la plus redoutable. C’est contre elle qu’il accumule les preuves tirées de l’Ancien Testament (elles sont assez faibles : Os., i, 7 ; Is., vji, 14 ; xxxv, 3-6 ; Hab., iii, 3) et surtout du Nouveau (utilisation abondante du prologue johannique et de nombreuses paroles du Christ rapportées par le IVe évangile). En deux chapitres compacts, se presse