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NOTKEH LABEO — NdTKEK DE LIEGE
« offert » au monastère par son oncle, l’abbé Ekkehart

I" (958-071), est devenu écolàtre et est mort en 1<)22. Comme il l’explique lui-même dans une lettre adressée à l’évêque Hugues de Sion, il a été frappé de la difficulté qu’avaient les « scolastiques » à pénétrer le sens des auteurs ecclésiastiques. Pour leur en faciliter l’accès, « il a osé une chose presque inouïe jusquelà », traduire les écrits latins en langue teutonique et les gloser au besoin par des explications empruntées à la dialectique ou à la rhétorique des anciens : ausus sum jæerc rem pêne inusitalam, ut latine scripla in noslram conatus sim verlere, et syllogislice aut figurate aut suasorie dicta per Aristotelem vel Ciceronem vel alium attigraphum elucidare. La même lettre nous donne la liste des traductions déjà exécutées par Notker à ce moment : deux livres du De consolatione et quelques parties du De Trinilale de Boèce, les Distiques de Caton, les Bucoliques de Virgile, Y Andrienne de Térence, les Noces de la philologie de Martianus Gapella, les Catégories et le Péri herméneias d’Aristote (sans aucun doute d’après le latin de Boèce), les débuts de l’Arithmétique, le Psautier au complet (avec gloses tirées de saint Augustin), puis Job (qui n’était encore que commencé à ce moment). En outre Notker avait composé une Rhétorique, un Comput et quelques opuscules latins. Texte de cette lettre dans P. Piper, Die Schriflen Notkers, t. i, p. 859-861. Par un renseignement d’Ekkehart IV, Liber benedictionum, n. xliv, vers 6t sq. (éd. J. Egli, p. 230), nous apprenons qu’au moment de sa mort Notker avait terminé la traduction de Job, et qu’il avait aussi traduit les Moralia de saint Grégoire. De tout cela il nous reste : le Psautier, les Catégories et le Péri herméneias, le De consolatione et les deux premiers livres de.Martianus Gapella, en plus quelques petits écrits (latins et latins-allemands) annexés aux traités de Boèce : De parlibus logicx, De syllogismis, De arle rhetorica. Un court traité sur la musique (en allemand) el un Comput, plus récemment découvert, ne sont pas d’une authenticité incontestable. -— Les traductions de Notker ont une très réelle valeur ; possédant bien les deux langues, il a su ne pas se traîner sur le texte à traduire, trouver pour rendre les ternies philosophiques les mots convenables. Il a donc grandement contribué au progrès des études philosophiques et théologiques soit à Saint-Gall même, soit dans l’Allemagne du Sud.

Textes publiés par P. Piper, Die Schriften Nolkers und seiner Schule, 3 vol., Fribourg-en-B. et Tubingue, 1 18821883 (= Gernumischer Biicherschalz herausg. von Alfred Holder, t. viii-x) ; J. Egli, Der Liber benedictionum Ekkeharls IV., publié dans les Mittheil. de Saint-Gall, fasc. 31, Saint-Gall, 1909, p. 230-234, et les notes ; M. Manitius, Gesch. der lai. Lileratur des M. A., t. H, 1923, § 122, p. 694699, et les histoires un peu développées de la littérature allemande, en particulier J. Kelle, Gesch. der deutsvhen Litteratur von der dltesten Zeit bis zur Mille des XL Jahrhunderts, t. i, Berlin, 1892, p. 232-261 ; J. Bæchtold, Gesch. der deulschen Lileratur in der Schweiz, Frauenfeld, 1892, p. 5876 ; ces deux ouvrages donneront un aperçu sur la vie intellectuelle de Saint-Gall.

É. Amann.
    1. NOTKER DE LIÈGE##


NOTKER DE LIÈGE, évêque de cette ville de 972 à 1008. — Originaire de la Souabe, où il a pu naître dans le premier tiers du xe siècle, il aurait été, au dire des Annales d’Hildesheim (Mon. Germ. hist., Script., t. iii, p. 93), prévôt du monastère de Saint-Gall. Mais ce renseignement, à l’estimation de G. Kurth, reposerait sur une confusion avec quelqu’un des Notker ci-dessus mentionnés. En tout cas c’est de la chancellerie impériale, à laquelle il était attaché, que Notker fut promu, par Othon I er, en 972, à l’évêché de Liège. Cette nomination ne l’empêcha pas de continuer à la cour des fonctions considérables sous les

trois successeurs d’Othon I e1. A trois, sinon à quatre reprises, on le trouve en Italie où il délend les intérêts des souverains germaniques. Ces mêmes intérêts, il les protège en Basse-Lorraine contre Jes ambitions des rois de France ; la correspondance d Adalbéron de Beims, rédigée par Gerbert (le futur Sylvestre II), témoigne de cette action politique. Après le changement de dynastie en France, Notker fut envoyé à Paris pour négocier un traité entre Henri II et Bobert le Pieux. L’accomplissement de ses devoirs de grand feudataire n’empêcha pas, d’ailleurs, l’évêque de Liège de travailler au bien de son diocèse. Non seulement il constitua définitivement la souveraineté temporelle des évêques de Liège, non seulement il embellit la ville épiscopale, mais il travailla, de la bonne manière, au relèvement de la culture intellectuelle et morale de son clergé et de son peuple. L’école de la cathédrale prit un essor qu’elle n’avait pas encore connu et exerça un rayonnement considérable ; c’est d’elle que sortirent plusieurs des grands évêques, à commencer par Wason de Liège, qui travaillèrent à la réforme du xie siècle.

Chose curieuse, ce grand évêque dont l’action fut si considérable, ne semble avoir laissé aucune production littéraire : de sa correspondance même il ne s’est rien conservé. Les trois vies de saints qui figurent sous son nom dans la Patrologie, Vie de saint Remacle, P. L., t. cxxxix, col. 1147-1168 ; Vie de saint Landoald, col. 1111-1122 ; Vie de saint Adelin, col. 1141-1148, se révèlent, à plus ample examen, comme ayant été rédigées par Hériger, écolàtre puis abbé de Lobbes. Notger a mis en tête son propre nom, en les transmettant à ceux qui les lui avaient demandées. Tout au plus pourrait-on porter au compte de notre évêque une courte réponse à une question mathématique, publiée par N. Bubnov, dans Gerberti opéra mathemalica, Berlin, 1899, p. 297-299 (voir la note fort intéressante ajoutée par l’éditeur).

On ne saurait séparer de Notker de Liège, son auxiliaire et ami HERIGER DE LOBBES, qui a été omis ici à sa place alphabétique. Moine de Liège, il fut élu abbé de Lobbes en 990 et mourut en 1007.

Hériger est d’abord un historien : ses Gesla episcoporum Tungrensium, Trajectensium et Leodiensium, témoignent d’une culture littéraire assez considérable sinon d’un sens critique éprouvé. Texte dans Mon. Germ. hist., Script., t. vii, p. 162-189 (= P. L., t. cxxxix, col. 1001-1066) ; l’œuvre a été continuée vers 1052 par un chanoine de Liège, Anselme. — Nous avons parlé des trois vies de saint composées par Hériger sur l’ordre et peut-être avec la collaboration de Notker. — La Vie de saint Ursmer (abbé de Lobbes à la fin du viie siècle), œuvre exclusive d’Hériger, était écrite en vers, il n’en reste qu’un lragment assez long, publié par Mabillon, et réimprimé dans P. L., ibid., col. 1125-1128. — L’Epistola ad quemdam Hugonem monachum, col. 1129-1136, montre que notre auteur s’occupait aussi de questions de chronologie, et qu’il avait étudié d’assez près certains problèmes historiques. — Le Dialogus de dissonantia Lcclesias de advenlu Domini est perdu ; d’après une lettre de Bern, abbé de Beichenau, on y démontrait que Pavent ne devait pas compter plus de quatre dimanches. Cf. Jaffé, Biblioth. rerum german., t. iii, p. 368-369. — Hériger cultivait aussi la mathématique : N. Bubnov a publié des Régulée de numerorum abaci rationibus, et des Regulæ Herigeri in abacum, op. cit., p. 205225, qui témoignent de la connaissance approfondie qu’avait notre auteur de l’abaque (table à calculer), l’éditeur a montré que sur ce point Hériger ne dépendait pas de Gerbert, comme semblait l’indiquer Albéric des Trois-Fontaines (Chronique, an. 990, Mon. Germ. hist., Script., t. xxiii, p. 775). — Au dire