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NEMESIUS D’EMÈSE

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qui sépare le concile d’Éphèse de celui de Chalcédoine. Notre auteur, on l’aura remarqué, sans admettre la formule de l’union par bon plaisir, xoct’eùSoxîav, admet la terminologie antochienne, telle qu’elle se précise dans VEranistea de Théodoret. Il emploie avec prédilection, en parlant du Verbe incarné, les épithètes d’àaùyyuTOç, d’àrpercToç, qui de l’œuvre de Théodoret passeront dans la formule du concile de 451. Il insiste avec autant de force sur l’idée que le Verbe est à7râ0r ( ç, qu’il ne prend aucune part aux passions de l’humanité, oùaujxTrâaxwv, àXXà auu.7TpdcTTa>v. N’estpas encore du Théodoret ? En sorte qu’on chercherait assez volontiers l’auteur parmi ces Antiochiens, qui entre 431 et 451, tout en abandonnant la personne de Nestorius, entendent bien ne rien sacrifier des affirmations dyophysites. Mais il est du nombre des prudents, de ceux qui jugent inutile de soulever les questions de personnes, à un moment surtout où le monophysisme semble pouvoir compter sur la faveur impériale. — Sans doute, on a fait valoir que la polémique contre Apollinaire et Eunomius n’est plus guère de saison vers les années 410. Mais on oublie, ce disant, que toute la polémique antimonophysite faisait valoir l’origine apollinariste de la doctrine de l’unique nature. L’on ne remarque pas non plus que d’Eunomius ce qui est rejeté, c’est moins son enseignement tri ni taire que ses théories psychologiques et christologiques. Cf. c. iii, col. 605 A. — Il nous semble donc qu’ilfaut revenir sur ce point auxviies des anciens cri tiques ecclésiastiques, vues confirmées par le suffrage des historiens de la philosophie grecque, tels que Ritter et Zeller, quoi qu’en aient dit D. Bender et à sa suite O. Bardenhewer. —. Il n’y a pas lieu d’attribuer à Némésius un petit traité De contemnenda morte, publié sous le nom de Démélrius Kydonès, moine du xiv c siècle (cf. P. G., t. cliv, col. 11691212), et dans la petite collection Teubner (éd. H. Deckelmann, 1901). Les preuves de cette attribution qu’à prétendu fournir J. Drâseke, dans Zeitsch. fur mssensch. Théologie, 1901, t. xi.iv, p. 391-410, n’ont pas convaincu les critiques.

III. Histoire posthumk.

On ne voit pas que le traité de Némésius ait d’abord attiré l’attention. On ne le trouve cité que rarement par son nom dans la littérature grecque : un Anastase, archevêque de Nicée, de date imprécise, lui emprunte avec référence deux réponses dans les’EpcoT^aeiç xal àTTOxpîaeiç, mises sous le nom d’Anastase le Sinaïte, voir P. G., t. lxxxix, col. 505, 515 ; au xe siècle, Moïse Barcépha le cite dans son De parudiso, I, xx, P. G., î. exi, col. 508 A. Mais certains auteurs ne se font pas faule de le copier sans rien dire. Saint Jean Damascène le résume longuement au 1. II de la Foi orthodoxe, c. xii-xxx, P. G., t. xciv, col. 917-969 ; au i.v siècle un certain Mélétios, » moine et médecin, le pille littéralement dans son traité Ilôpl -rîjç toù àvOpajreou xaTaaxeuîjç. Texte dans J. A. Cramer, Anecdola grœca Oxonens., t. iii, p. 1-157.

On a reproché à Méléiios d’avoir fait cet emprunt sans le signaler. Ce n’est pas exact. En sa préface, le moine-médecin donne ses sources, parmi lesquelles il signale Grégoire de Nysse. Loc. cit., p. 1. Or c’est Némésius qu’il désigne par ce nom. Depuis quelque temps déjà, en effet, l’œuvre de l’évêque d’Émèse circulait sous le nom de celui de Nysse, comme le prouve une version arménienne du viiie siècle qui donne ce livre comme étant de Grégoire. Ce dernier, on le sait, avait composé comme suite à V Hexameron de son frère Basile un De opificio hominis, Ilepl xoexaaxeuTJç àvOpwTiou, qui, par suite de l’analogie des titres et aussi du contenu, a attiré à lui le travail de Némésius. Aussi une partie de ce dernier ouvrage figure-t-elle encore sous le nom de Grégoire de Nysse.

D1CT. DE THÉOL ; CATHOL.

Voir P. G., t. xi.v, col. 188-221, et comparer avec t. XL, col. 536-608.

L’Occident en définitive sera victime de la môme erreur. Sans doute la première traduction latine qui est faite au xr siècle par le médecin Alfan de Salernc, t 1085 comme archevêque de cette ville, met le traité sous le nom de Némésius ; mais celle version, d’ailleurs fort médiocre, cède bientôt la place à celle que donne, au milieu du xir siècle, Burgundio de Fisc, le grand traducteur de l’époque (cl. J. de Ghellinck, Le mouvement théoiogique du xir siècle, p. 215 sq.). Or Burgundio publie le traité sous le nom de Grégoire de Nysse ; son texte, vite devenu classique, impose cette attribution à toute l’École. Albert le Grand, saint Thomas d’Aquin ne connaîtront que le Nijssenus. Il est visible que le Docteur angélique s’est inspiré continuellement, dans toute la partie de la I a qui traite de l’homme, non seulement du Damascène, mais de Némésius sous le nom de Grégoire de Nysse. Si ce dernier est assez rarement cité de façon expresse (voir pourtant q. Lxxxr, a. 2 ; q. lxxxii, a. 5 ; q. ciii, a. 6), il est incontestable que son texte est sous-jacent à celui de la Somme théologique de la q. î.xxv à la q. i.xxxiii et aussi à la q. cxvi.. Il y aurait un joli travail à faire sur les emprunts textuels que lui a faits l’Ange de l’École, sur la manière dont il a su ramener à l’orthodoxie péripatéticienne le platonisme de Némésius, sur l’influence qu’eut, en définitive, dans un monde si différent du sien, le vieil évoque d’Émèse.

1. Texte et versions.

- l n Texte grec. — Il a été publié pour la première fois par Nicaise Ellebod, Anvers, 1565 ; puis à Oxford (probablement par l’évêque Paul Fill) en 1671 ; le théologien protestant Chr. Fr. Matthsei en a donné une nouvelle édition à Halle en 1802 ; reproduite dans P. G., t. xl, col. 504-817, avec à la suite les notes de l’édition d’Oxford. Il manque une édition critique ; voir ci-dessous, études sur le texte

Versions.

1. Lutines. — Celle d’Alfan de Salerne,

publiée d’abord par C. Holzinger, qui n’en connaissait pas l’auteur, Leipzig, 1882, l’a été, en 1917, par K. J. Burkhard dans la petite collection Teubner, Nemesi episcopi Premnon physicon, sive Hep ; ç-JasoK à/6po>Tcou, liber a N. Alfano archiep. Salerni in latinum translatus. — Celle de Burgundio de Pise l’a été par le même Burkhard dans cinq programmes de gymnase, Jahresbcricht des k. k. Staals Gymnasiums ini XII. Bezirk von Wien, Vienne, 1891, 1892, 1896, 1901, 1902. La Renaissance a vu paraître les traductions de Jean Cono, Strasbourg, 1512, et de Georges Valla, Lyon, 1538.

2. Arménienne.

Sur cette version ancienne, voir les

travaux italiens indiqués dans l’édit. d’Alfan par Burkhard, p. x-xi ; je ne saurais dire jusqu’à quel point la version arménienne publiée à Venise, 1880, s’appuie sur l’ancienne.

3. Syriaque.

Il y a eu certainement au Moyen Age une version syriaque, au moins partielle ; voir J. Pràscke, Zeitschrift fur wissenschaftliche Théologie, 1003, t. xlvi, p. 506 sq.

4. Modernes.

Signalons au moins la traduction française

de J. B. Thibault, Paris, 1844 ; l’allemande d’Osterhammer, Salzbourg, 1813.

IL Travaux, — 1° Sur le texte. — Rien n’a été fait pour le texte grec depuis l’édition de Matthœi. Les travaux commencés par Burkhard, et publiés dans les Wiener Sludien, 1888, t. x, p. 03-135 ; 1889, t. xi, p. 143 sq. ; 243 sq., n’ont pas abouti à l’édition qu’il voulait faire ; voir aussi du même, Zur Kapitelfolge in Nemesius, dans Philologus, 1910, t. lxix, p. 35-39, et Johannes von Damaskus’Ausziige uns Nemesius, dans Wiener Eranos, Vienne, 1909, p. 89-101.

Sur les sources et le contenu.

 M. Evangelidès, Zwei

Kapitel aus einer Monographie iiber Nemesius und seine Quellen (thèse), Berlin, 1882 ; D. Bender, Untersuchungen zu Nemesius von Emese (thèse), Leipzig, 1898 ; B. Dotnanski, Die Psychologie des Neniesius, dans les Beitràge zur Gesch. der Philosophie des M. A. de Bàumker, t. iii, fasc. 1, 1900, excellente étude ; W. W..Jager, Nemesios ion Emesa, Quellenforschunæn zum Neuplatonismus und seinen Anfàngen bei Poseidonios, Berlin, 1914, fuligineux à plaisir ;

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