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NIL L’ASCÈTE


pruntés à la vie même, comme il le demandait aux supérieurs de monastères, De monastica exercitatione, c. xxi-xxxiii, P. G., t. lxxix, col. 748-761.

Le cénobite galate à la physionomie si personnelle ne peut pas être l’ermite homonyme du Sinaï. La question du véritable auteur des Narrationes est toujours à résoudre. Dès le ve siècle nous les voyons attribuées à un Nil. L’identification de ce Nil est une des nombreuses énigmes de l’histoire littéraire de l’antiquité chrétienne. Son existence est à peu près certaine. Car, encore qu’elles soient fortement romancées, les Narrationes offrent un fond ? historique indubitable, surtout si on les confronte avec une lettre de saint Nil dont l’authenticité ne peut être mise en doute. Epist., iv, 62, col. 580 et 581. A la gloire de son saint compatriote, le martyr Platon, saint Nil nous raconte qu’un vieillard originaire de Galatie, après avoir embrassé la vie érémitique au Sinaï en compagnie de son fils, s’en vit séparé par un coup de main des païens et ne le retrouva que sur l’intervention miraculeuse de saint Platon. Le vieillard de saint Nil et le Nil des Narrationes offrent trop de ressemblances pour n’être pas identifiés, comme les récits qui les mettent sous nos yeux présentent des différences si graves que l’on a le devoir de distinguer leurs auteurs. De cette manière, l’existence, au ve siècle, de deux saints du nom de Nil : Nil l’Ermite, auteur des Narrationes et Nil le Cénobite d’Ancyre, auteur des écrits venus sous son nom, nous paraît sortir du domaine de la simple hypothèse pour devenir une certitude.

II. Écrits.

L’œuvre littéraire du moine d’Ancyre est fort étendue et reste, dans son ensemble, suffisamment établie, encore qu’elle demande une édition scientifiquement menée et quoique la critique n’ait pas encore dit son dernier mot. L’écrivain est abondant et facile, trop peut-être. Il ne recule pas devant les répétitions et se refuse de parti pris à brillanter son style, dût-il, par endroits, pour mieux éviter cette coquetterie indigne d’un moine, s’exposer à écrire en barbare. De même il se défend contre les réminiscences des littératures classiques. Stiglmayr, dans Zeitschri/t fur katholische Théologie, 1915, t. xxxix, p. 576 sq. On peut grouper ses écrits en trois classes : correspondance ; écrits consacrés aux vertus chrétiennes ; écrits concernant le monachisme. Resteront à signaler les écrits perdus et les œuvres inauthentiques.

La correspondance.

Aussi volumineuse que

celle de saint Isidore de Péluse dont, par ailleurs, elle ne réalise pas la haute tenue littéraire, la correspondance de saint Nil comprend, à notre connaissance, 1062 lettres ou extraits de lettres. Poussinesen édita 365 à Paris, en 1657, d’après un manuscrit de Florence. Léon Allatius reprit l’édition à Rome, en 1668, et donna quatre livres contenant en tout 1061 lettres, qui sont passées dans la Patrologie de Migne, t. lxxix, col. 81-581. Il y faudrait ajouter une lettre au scholastique Nemertius, dont Pitra, qui l’attribue à Anastase, a édité la version latine. Spicilegium Solesmense, Paris, 1855, t. iii, p. 398. Ces pièces, inégales d’étendue comme de valeur, traitant de diverses questions dogmatiques, morales et exégétiques, dénoncent en leur auteur un homme de Dieu aussi expérimenté que consulté ; elles forment un spécimen original de direction, en même temps qu’elles sont une vraie source d’information sur les usages monastiques et séculiers du temps. Nous sommes loin d’affirmer qu’elles rendent toutes la manière de Nil dans leur rédaction actuelle. Admettons encore que l’examen des circonstances et de la vie de l’auteur en doive modifier la numérotation. Heusi, op. cit., p. 63 sq. Elles restent cependant dans leur ensembfc, au-dessus de

tout soupçon d’inauthenticité. Néanmoins, telle cette lettre 33 du IIIe livre, col. 388-400, qui n’est qu’un conglomérat des lettres 138, 139, 179, 317, 140, 108, 109, 1Il et 135 du IIe livre, les lettres, 64, 65, 113, 114, 160, 170, 248, 245, 320 et 322 du IIP livre, 1 et 7 du IVe livre sont manifestement des empruntsétrangers ou de purs et simples doublets. Heusi, op. cit., p. 80 sq. On avait considéré un grand nombre des lettres niliennes comme de simples extraits desouvrages de Nil ou d’autres auteurs, tels que saint Jean Chrysostome et saint Isidore de Péluse, introduits au cours des siècles dans le recueil des lettres authentiques. Haidacher dans XpuaocTo^ixâ, Rome, 1908, fasc. 1, p. 226 sq. Mais Nil lui-même a fort bien pu se répéter et faire sien tel élément étranger qui allait bien à son but. Il arrive tous les jours qu’on s’inspire dans ses récits de ses lectures. Heusi, op. cit., p. 59.

Écrits moraux.

Outre une grande partie de ses

lettres, Nil a composé plusieurs traités concernant les vertus chrétiennes ; ils ont dès lors une portée universelle. Tels sont : 1. Le Sermo in efjatum illud Evangelii : Nunc qui habet sacculum tollat similiter et peram, et qui non habet, vendat pallium suum et emat gladium (Luc, xxii, 36), P. G., t. lxxix, col. 12631280, dont il n’y pas lieu de suspecter l’authenticité.

— 2. L’instruction Ad Eulogium monachum contient de belles considérations sur l’aspiration à la perfection, expose une sage tactique pour les combats contre le mal et donne des conseils au sujet de la vie monastique. P. G., t. lxxix, col. 1093-1140. Nicéphore Calliste qui la mentionne le premier l’intitule Ta 7tpôç EùXéyiov, Hisloria Ecclesiaslica, t. XIV, c. liv, col. 1256. On peut supposer qu’il connaissait plusieursinstructions adressées par saint Nil à Euloge. Une seule nous est parvenue. — 3. Le De oratione est un délicieux traité de la prière ou de l’esprit de prière, divisé en 153 chapitres ou thèses, selon les 153 poissons de saint Jean (Joa., xxi, 11), où l’auteur procède sous les traits d’un professeur de jeunes moines. Imprimé à Anvers, en 1575, il a trouvé place dans Migne, P. G., t. lxxix, col. 1165-1200. Photius connaissait déjà sa division en 153 chapitres, Bibliotheca, cod. cci, P. G., t. ciii, col. 672. Les Apophtegmata Patrum lui empruntent 8 citations, P. G., t. lxv, col. 305, et, vers 620, le moine Antiochus de Saint-Sabas. de Jérusalem en fit de soigneux extraits dans ses Pandectes. S. Haidacher, Nilus-Exzerple im Pandektes des Antonius, dans la Revue bénédictine, Maredsous, 1905, t. xxii, p. 244-250. Il semble bien que Heusi, n’ait pas de raison suffisante de douter de l’authenticité de la préface, op. cit., p. 118 sq. — 4. Le De octo spiritibus malitiæ, qui ne s’inspirerait pas plus d’Évagrequ’il n’inspirerait Cassien, Degenhart, op. cit., p. 174 sq., mentionné pour la première fois par Antiochus de Saint-Sabas et marqué au coin d’une fine psychologie, s’étend longuement sur la théorie des huit vices capitaux, si répandue au ive siècle. Imprimé en 1557 par Fr. Ginus à Venise, réimprimé au même lieu en 1574 avec les ouvrages de saint Éphrem, puis dansla Bibliothèque des Pères, à Paris, en 1575 et dans le t. vu de celle de Lyon, enrichi d’une version latine parCombefis, il trouva place dans le t. i du supplément à la Bibliothèque des Pères, à Paris, en 1672, d’où il est passé dans Migne, P. G., t. lxxix, col.. 1145-1164.

Écrits concernant le monachisme.

Ces écrit*

forment le groupe le plus considérable des œuvresniliennes. A remarquer qu’elles veulent le lecteur indulgent aux répétitions incalculables. Citons : 1. h’Oratio in Albianum, qui est un joli panégyrique du moine galate Albianus, dont Nil nous présente la vie comme une image lumineuse de la perfection P. G., t. lxxix,