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NIGER (ANTOINE) — NIL L’ASCÈTE


confondent avec Antoine de Oculis Nigris, provincial d’Aragon, en 1438. Originaire d’Arezzo, en Toscane, Antoine étudia à Paris, où il conquit le grade de docteur en théologie, d’après les uns en 1405, d’après d’autres en 1413. Il enseigna ensuite la théologie à l’université de Florence, où il fut, en 1424, doyen de la faculté de théologie. Entré d’abord dans l’ordre des frères mineurs conventuels, il passa ensuite aux frères mineurs de l’Observance, sous le généralat de saint Bernardin de Sienne. Antoine a composé quelques ouvrages théologiques : 1. Commentarius in Magistrum Sententiarum, fruit de son enseignement à Paris, ou à Florence ; 2. quelques Opuscula théologien ou tractatus Iheologici, et 3. Sermones prædicabiles. Après s’être consacré à la prédication, pendant les dernières années de sa vie, il mourut, en odeur de sainteté, d’après les uns, à Arezzo, en 1450, d’après les autres, à Sergiani, près de Senario, en 1470.

L. Wadding, Annales minorum, t. x, Rome, 1734, p. 120 ; Scriplores ordinis minorum, 2e édit., Rome, 1906, p. 20, 24, 29 ; J. H. Sbaralea, Supplementum ad Scriptores trium ordinum S. Francisco, t.I, 2e édit., Rome, 1908, p. 90 ; Marc de Lisbonne, Chronicorum ordinis fratrum minorum pars III, t. I, c. xliii ; Fr. Haroldus, Epitome Annalium Waddingi, ad ann. 1424 et 1438.

A. Teetært.

1. NIL L’ASCÈTE ou NIL D’ANCYRE

dit LE SINAITE (Saint), cénobite célèbre du ve siècle, appartient avant tout aux théologiens de la vie spirituelle. — I. Vie. II. Écrits. III. Doctrine.

I. Vie.

Saint Nil devra à ce siècle naissant de l’avoir tiré de l’oubli et peut-être d’avoir tenté le premier de lui rendre sa véritable physionomie. Sa biographie traditionnelle est tirée d’un recueil de Narrationes de csede monachorum et de Theodulo filio, P. G., t. lxxix, col. 583-694, pillées par Nicéphore Calliste, Historia ecclesiastica, l. XIV, c. liv, P. G., t. cxlvi, col. 1256, et les livres liturgiques byzantins, d’où le compilateur du Synaxaire de Constantinople la tira au Xe siècle, ainsi que par les martyrologes depuis le Moyen Age. Consciencieusement étudiée par J. M. Suaresius, dans son Sancli Nili tractatus, reproduit en appendice aux œuvres de saint Nil, P. G., t. lxxix, col. 1367-1434, elle fient en ces quelques lignes : Né à Constantinople d’une famille illustre, Nil fut officier à la cour de Théodose et préfet du prétoire. Engagé dans le mariage, il en eut deux enfants. Épris de solitude, il renonça, vers 390 (Tillemont, Mémoires, t. xiv, p. 190 et 191), ou en 404 (Léo Allatius, De Nilis, 11-14), à tout l’éclat de la vie politique, comme à tout le bonheur de sa vie de famille, pour aller, en compagnie de son fils Théodule, se mettre à l’école des ascètes du Sinaï, tandis que sa fille et son épouse, également avides de vie religieuse, iraient la demander à l’Egypte. Nos ermites, au témoignage des Narrationes, excitaient à la fois la jalousie des anges et exaspéraient la haine des démons par leur vertu, quand, vers 410 (Tillemont, op. cit., p. 205), leur retraite fut troublée par une invasion de Sarrasins, qui firent une razzia au mont Sinaï, massacrèrent plusieurs moines et emmenèrent des prisonniers, entre autres Théodule. Épargné, Nil se mit à la recherche de son fils qu’il retrouva à Éluse, entre l’Arabie Pétrée et la Palestine. L’évêque de cette ville les ayant ordonnés prêtres l’un et l’autre, saint Nil revint au Sinaï où il mourut vers 430.

Tel est le Nil des Narrationes ; est-ce celui des écrits ascétiques ? Encore que la grande majorité des très nombreux manuscrits des Narrationes mettent en avant le nom de saint Nil, à rencontre de quelques unités qui les donnent comme l’œuvre d’un certain moine Anastase, et bien que les Narrationes

aient été regardées jusqu’à nos jours comme une autobiographie, il semble bien qu’il ne faille pas y voir plus qu’une manière de roman, tout au moins pour ce qui regarde notre saint Nil (Heussi, Untersuchungen, p. 155 sq.), s’il est vrai que l’information littéraire, notamment en ce qui concerne la littérature gréco-romaine, de l’auteur des Narrationes n’est pas à mettre en parallèle avec la pauvreté de notre épistolographe, que les aventures de Théodule soulïrent par trop d’invraisemblance et que la chronologie du narrateur ne cadre pas avec les dates sûres de Nil.

Notre Nil, dont l’entrée au monastère semble ne pouvoir pas être reculée au delà de 390, d’après une lettre à un nommé Dioclétien à qui il propose l’exemple d’Apollinaire († 392) comme de quelqu’un encore vivant, Epist., i, 257, P. G., t. lxxix, col. 177, vécut pendant un temps plus ou moins long à Ancyre en Galatie. Il faut même, d’après deux de ses lettres comme d’après le panégyrique du moine Albianus et le traité Ad magnam diaconissam Ancyræ, faire d’Ancyre, tout au moins de la province de ce nom, son pays d’origine. A ce compte, il faudrait en toute justice lui rendre le surnom d’Anci/ranus que lui donnent les signatures de quelques manuscrits du recueil des lettres. Son origine galale n’est pas un obstacle à un long séjour à Constantinople où il puisa, aux pieds de saint Jean Chrysostome, dont, au dire du chroniqueur Georges le Moine (cf. Degenhart, Neue Beitrage., p. 7 et 8), il fut au sens plein du mot le disciple, cet amour filial qui percera si souvent dans sa correspondance. Epist., i, 309, col. 193 ; ii, 265, col. 336, 293 et 294, 345 ; iii, 13, col. 373 ; 199, col. 476. N’est-ce pas là qu’il s’acquit ces nombreuses relations qui le poursuivront dans sa solitude ? Peut-être les dut-il à un poste très honorable ? Il lui faut néanmoins refuser la préfecture de la ville impériale. L’absence de son nom dans tous les index connus des préfets du prétoire de Byzance doit, une fois de plus, nous mettre en méfiance contre l’information historique de Nicéphore Calliste.

Par ailleurs, il faut renoncer à faire de notre Nil un ermite et nous voilà de nouveau loin du Sinaï. Outre qu’il s’en défend et qu’il prêche à qui veut l’entendre la supériorité de la vie religieuse cénobitique sur l’érémitique, De monachorum præstantia, P. G., t. lxxix, col. 1061-1094, il apparaît dans ses écrits, comme fondateur d’un monastère dans les environs d’Ancyre, comme maître des novices et supérieur des moines, comme archimandrite expérimenté, consulté par ses confrères sur l’administration de leurs propres monastères. Epist., i, 18, col. 89 ; iii, 303, col. 532. Cf. Degenhart, Der ht. Nilus Sinaita, p. 98. Enfin, à rencontre du Nil des Narrationes, il semble bien qu’il n’a pas été prêtre. Epist., ii, 261, col. 333.

Le cercle d’influence du moine d’Ancyre paraît illimité et offre quelque chose d’extraordinaire pour ce temps. Sa volumineuse correspondance nous le montre en relations non seulement avec les hommes d’Église de renom, mais avec les fonctionnaires militaires et civils de l’empire et avec Arcadius lui-même. Il y apparaît comme le type des spirituels du temps, habillant toutes ses pensées, comme tous ses conseils et ses graves avertissements, d’images et de paroles scripturaires. Tempérament vigoureux, bon et doux, d’une condescendance évangélique pour la faiblesse, intraitable quand il soupçonne la malice ou une évidente mauvaise volonté, usant d’un saint franc-parler qui frôle l’imprudence avec les grands, il s’émeut fémininement en face de la douleur. Ce type achevé de maître spirituel qui fuyait le monde et le conduisait, était marqué pour être un entraîneur d’hommes parce que ses conseils seraient em-