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NICOLAS DE CLAIRVAUX — NICOLAS DE CLAMANGES


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dernier. L’édition des sermons de saint Bernard par Mabillon donne un meilleur texte de quelques-uns de ces sermons. P. L., t. ct.xxxiv, col. 827-850 ; 1049-1055.

II Travaux. — Notice de Mabillon dans la préface au t. in des œuvres de saint Bernard, n. 27 et 36-52, cf. P. L., t. ci.xxxiii, col. 21 et 23-31 ; dom Ceillier, Histoire des auteurs sacrés et ecclésiastiques, 2e édit., t. xiv, p. 732-737 ; Histoire littéraire de la France, t. xui (1811), p. 553-568 ; et les différentes Vie3 île saint Bernard, en particulier li. Vacandard, Vie de saint Bernard, Paris, 1010, t. H, p..’)'>."> sq., 512 sq.

É. Amann.

21. NICOLAS DE CLAMANGES, profes ur à Paris et chanoine de Langres (13637-1 137).

I. Vie et caractère. - — Nicolas Poillevilain naquit vers 1303 à Clamanges, au diocèse de Châlons (Marne) ; c’est pourquoi il est appelé en latin de Clamangiis ou Clemengis.en français de démanges ou de Clamanges. Il était de famille bourgeoise, mais pauvre. Un de ses oncles maternels fut professeur de médecine ; son frère Etienne devint proviseur du Collège de Navarre. C’est dans ce collège que Nicolas entra comme boursier, au cours de sa douzième année. Il y étudia les arts libéraux sous Gérard Machet et Pierre de Nogent. Maître es arts, il ouvrit son enseignement en 1381. En même temps, il se mit à l’école de Pierre d’Ailly et de Gcrson, dont il goûtait beaucoup les idées sur l’ascèse et la mystique ; mais il ne dépassa jamais, en théologie, le grade.de bachelier.

Son enseignement à la Faculté des arts le rendit bientôt célèbre. On a même soutenu, sur la foi de von der Hardt, Magnum œcumenicum Constanticnse concilium, 1. 1 b, p. 72, qu’il devint recteur de l’université de Paris vers 1383 ; mais ce renseignement, accepté par Mùntz, Féret, etc., paraît controuve. Le fait est que, excellent latiniste et orateur éloquent, il fut désigné plusieurs fois pour intervenir, au nom de l’université, dans la politique de son temps. Devenu secrétaire pontifical à la cour d’Avignon en 1397, il eut à souffrir des difficultés qui surgirent quelques années plus tard entre le pape et le roi de France. On l’accusa, en particulier, d’avoir rédigé et même inspiré la bulle comminatoire de 1408. Il se retira à Gênes, puis successivement à la chartreuse de Valprofonds et à celle de Fontaine-du-Bosc. Ses dernières années sont peu connues. On le trouve en 1412 à Langres, où il est chanoine et trésorier de la cathédrale. En 1425, il est de nouveau à Paris, où il a repris son enseignement. Il meurt en 1437 au Collège de Navarre. C’est là qu’il a été inhumé et que, jusqu’à la Révolution, on a pu lire son épitaphe.

Nicolas de Clamanges est une belle figure de la prérenaissance. Épris à la fois de beauté classique, de réforme religieuse, de paix sociale, il ne brille pas seulement parmi les Gérard Machet, les Monstrelet, les Gonthier Colli, les Jean Muret, toute la pléiade de ces hommes de valeur, ses amis, qui firent honneur à l’université de Paris, au début du xve siècle ; il fut de la lignée des plus illustres. Pierre d’Ailly et Gerson, auxquels il dédia plusieurs de ses écrits, le dépassent incontestablement par l’influence et par les œuvres ; il leur est apparenté cependant par la qualité de son âme et la noblesse de son idéal.

Pour connaître l’homme, il faut lire surtout sa correspondance, ainsi que les délicieux petits traités De fructu eremi, Opéra, p. 121 sq., et De fructa rerum adversarum, Op., p. 132 sq., qu’il a composés à l’époque de ses épreuves. On y voit apparaître l’érudit très versé dans la littérature ancienne, l’admirateur de Virgile, de Cicéron, de Térence, le poète, l’orateur qui réveilla dans l’université de Paris l’amour de l’antiquité classique ; on y découvre surtout à chaque page la délicatesse de ses sentiments, l’ardeur de son zèle religieux, la justesse, et la modé ration de ses jugements, la sérénité de sa philosophie.

II. Idées.

Au point de vue des idées, Nicolas est

surtout connu pour ses critiques contre les abus de la

dialectique, contre la simonie dans le haut clergé,

contre la multiplication des fêtes. Encore faut-il bien entendre le sens de ses satires et ne pas perdre de vue l’esprit dans lequel elles ont été écrjtes. Le meilleur moyen de les comprendre sera de parcourir les opuscules dans lesquels il les a formulées.

Les abus de la dialectique sont critiqués dans le De studio theologico, le plus achevé de ses écrits. C’est une réponse à un bachelier en théologie de Paris, Jean de Piémont) qui lui avait demandé s’il croyait plus utile à son salut de prendre la maîtrise et, une fois docteur, de se consacrer à l’enseignement. Nicolas déplore le grand nombre de ceux qui cherchent des grades par ambition ou cupidité, qui dépensent pour cela leur patrimoine, font des dettes, rivalisent d’ostentation et finissent par être réduits à la mendicité, à la flatterie, à la course aux bénéfices, « cette soif dont les hommes brûlent aujourd’hui de façon incroyable. » Il n’admet pas même qu’on étudie uniquement pour savoir ou pour avoir le loisir de spéculer en paix : sauver les âmes, voilà le seul but qui légit : me à ses yeux une vie d’étude et d’er.seignement. Il en prend occasion pour exposer les devoirs du théologien ou du prédicateur, ce qui est tout un pour lui. Le théologien doit mener une vie exemplaire, pour que sa conduite ne contredise pas ses paroles : il doit être en état de grâce, pour que sa parole, jaillie de la source de la charité, soit ardente et efficace ; il doit méditer avec assiduité les saintes Écritures et les commentaires qu’en ont fait les Pères. C’est à ce propos que Nicolas critique les théologiens de son temps : « Ils négligent l’explication de l’Écriture, au témoignage de laquelle ils attachent peu de prix ; » ils se moquent des raisonnements appuyés sur l’autorité, comme si les inventions de l’imagination humaine valaient plus que les textes inspirés ! Ces scolastiques galvaudent tout leur génie en de stériles subtilités ; ils font œuvre de sophistes plutôt que de théologiens, et leurs raisonnements ingénieux ne sont qu’une écorce sans fruit. Les exercices auxquels ils se livrent aiguisent l’esprit, mais n’enflamment pas le cœur et ne portent pas l’âme à la vertu. « La science qui n’instruit que l’intelligence, qu’est-elle, sinon un ferment de vaine gloire, une lampe sans huile ? » Pour Nicolas, la vraie science, que tout théologien doit rechercher, est celle qui pénètre l’âme jusqu’en ses dispositions les plus intimes, affectum. Son antipathie pour les excès de la dialectique lui est dictée par son sens religieux ; c’est un sentiment analogue à celui qui animait Gerson et qui faisait dire à Bossuet : « Malheur à la science qui ne tourne pas à aimer. » Et parce que cet aliment total de l’âme, c’est au fond la vérité divine, il regrette le temps où Pères et théologiens n’avançaient rien qui ne fût confirmé par le témoignage de l’Écriture. Un autre grief qu’il fait à la plupart des docteurs de son temps est de se cantonner dans les écoles, et de laisser à des mercenaires ignorants le soin de leurs paroisses. Quoi d’étonnant si le peuple tombe dans l’erreur et la superstition, quand nul théologien ne l’instruit ? Plutôt que d’ergoter sur des textes, mieux vaudrait donc guérir les âmes. Sans doute, il faut des professeurs de théologie, mais le médecin n’est-il pas plus utile quand, après avoir appris son art. il l’applique ? Nicolas déclare en conséquence, à son correspondant, que nulle vie ne peut être plus parfaite que celle des apôtres.

Nicolas de Clamanges a parlé de la simonie, et en générr.’. ùes abus qu’il a constatés dans l’Église, dans son De corrupto Ecclesi ; r statu, intitulé aussi parfois De ruina Ecclesiæ. La paternité de cet opuscule a été