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NICOLAS IV


sainte. Il demandait la célébration, en tout pays, de synodes et une prompte discussion des meilleurs moyens de porter secours à la Terre sainte. Ces assemblées devaient délibérer sur la fusion des chevaliers du Temple et de l’Hôpital, à la rivalité desquels on attribuait en grande partie la chute de Ptolémaïs. Plusieurs des synodes convoqués par le pape lui-même, par lettre ou par ses légats, rendent témoignage des eiïorts de Nicolas IV : mais il mourut bientôt, le 4 avril 1292.

Pendant son court pontificat, Nicolas IV a travaillé également à la conversion des Sarrasins et des infidèles. Il fut à peine monté sur le trône pontifical, qu’il eut le bonheur de recevoir une délégation du roi des Tartares, Arghoun, qui avait renoué les anciennes relations avec Rome, rompues par son prédécesseur Achmet, mort en 1284. La délégation certifia que l’action évangélisatrice des frères mineurs, auprès des Mongols et des Tartares, portait des fruits abondants, qu’un grand nombre s’était déjà convertis, que les deux reines Tuctane et Elegage avaient reçu le baptême, et que le roi Arghoun lui-même était sur le point d’embrasser le christianisme. Nicolas IV exprima sa grande joie pour les bonnes nouvelles que les ambassadeurs lui apportaient et leur confia plusieurs lettres à remettre au roi, aux deux reines converties et à’plusieurs évêques orientaux. Il y engagea vivement le roi à ne pas différer trop longtemps le baptême, et à ne pas attendre le moment où Jérusalem serait de nouveau aux mains des chrétiens ; il félicita les reines et engagea les évêques à travailler pour l’union de la foi. Potthast, n. 22 631 sq., 23 009 ; 23 791 sq. Il renouvela cette demande au roi Arghoun jusqu’à deux fois en 1289 et en 1291. Il écrivit également, en 1289, aux khans Baidu et Cazan qui étaient chrétiens et prisaient beaucoup l’alliance des Européens contre les sultans. En 1291, le pape envoya deux autres frères mineurs au roi Arghoun avec la mission spéciale de le déterminer à se faire baptiser avec ses deux fils Saron et Cassien, et de suivre l’exemple de son autre fils Nicolas qui avait passé au catholicisme.

En 1289, Nicolas IV envoya aussi aux Mongols du nord de la Chine le franciscain Jean de Monte-Corvino, à la demande du grand khan Koublaï qui, à plusieurs reprises, avait déjà sollicité des papes l’envoi de savants chrétiens. Cf. Potthast n. 23 003. Jean de Monte-Corvino y produisit un bien considérable et fut nommé, en 1307, par Célestin V, archevêque de Pékin. Nicolas IV députa, en 1288, deux frères mineurs aux rois d’Illyrie et de Dalmatie pour les ramener avec leurs sujets à l’Église romaine. Il s’efforça également de ramener à l’unité de l’Église les Éthiopiens et les Géorgiens. C’est pourquoi il leur envoya des délégués munis de lettres destinées à l’empereur de l’Ethiopie, Potthast, n. 23 002, au roi de Géorgie, aux patriarches, aux archevêques, aux évêques et aux prélats de ces Églises. Nicolas IV travailla surtout à l’union complète des Arméniens avec l’Église romaine. A partir de 1284, plusieurs franciscains travaillaient déjà comme missionnaires en Arménie, auxquels se joignirent plus tard des dominicains. Le roi Héthun II, de concert avec Nicolas IV, exigea une entière conformité avec l’Église romaine, malgré les résistances partielles, qui s’élevèrent dans les rangs des Arméniens, et il s’en occupa encore, après avoir déposé la couronne pour embrasser la vie monastique. C’est pourquoi Nicolas IV envoya plusieurs nouveaux missionnaires franciscains en Arménie, parmi lesquels les chefs du mouvement spirituel, Ange Clarène de Fossabruno, Marc de Monte-Lupone et Pierre de Macerata. Les

franciscains y travaillèrent si bien que, depuis 1290, le siège d’Akhthamar fut reconnu comme un patriarcat indépendant, et que le siège de Hromglaï fut transféré à Sis, où, en 1307, une grande assemblée nationale, composée de quatorze archevêques et de plus de vingt évêques, déclara se conformer à la plupart des usages de l’Église latine.

Nicolas IV ne se contenta pas de travailler à la conversion des infidèles et à l’union des Églises orientales avec l’Église romaine, il combattit aussi vivement les hérétiques et les Juifs dans les différents pays de l’Europe. Il attaqua principalement les joachimites et les apocalyptiques franciscains, parmi lesquels Pierre Olieu occupe une place d’honneur ; et surtout les « frères apostoliques », qui avaient surgi dans la HauteItalie, en 1260, et qui joignaient au spiritualisme des joachimites ou apocalyptiques le panthéisme et le fanatisme politique d’Arnaud de Brescia. Leur fondateur, Gérard Segarelli. se croyait choisi de Dieu pour ressusciter l’ordre éteint des apôtres et appeler à la pénitence le monde perverti. La société de Gérard se répandit bientôt hors du territoire de Parme, et ne tarda pas à se déchaîner contre l’Église romaine. C’est pourquoi Honorius III publia, en 1286, une bulle dans laquelle il interdisait les corporations religieuses qui s’étaient établies sans l’agrément du Saint-Siège, insistait sur les inconvénients d’une prédication entreprise sans mission ecclésiastique, et exigeait que les personnes en question se rattachassent à un ordre approuvé par l’Église. Cependant le fanatisme continuait en Italie et Nicolas IV dut le combattre de nouveau en 1290, et le condamner par une nouvelle ordonnance. En 1294, le conseil de la ville de Parme fit brûler quatre des « apostoliques » et Segarelli mourut sur le bûcher, l’an 1300. Nicolas IV favorisa considérablement l’Inquisition et institua un grand nombre de nouveaux inquisiteurs, franciscains pour la plupart, dans les différents pays de l’Europe.

En dehors de la part active qu’il prit dans la lutte contre les spirituels franciscains, Nicolas IV éleva de nombreux frères mineurs à l’épiscopat et Mathieu d’Aquasparta au cardinalat, concéda d’innombrables privilèges à l’ordre franciscain, travailla à son expansion à travers le monde et composa la règle du t iers ordre de la Pénitence.

Malgré les missions difficiles, malgré les travaux innombrables, malgré les occupations de tout genre auxquels il devait se consacrer, Nicolas IV aurait encore trouvé, d’après L. Wadding, Scriptores ordinis minorum, p. 118. le loisir d’écrire : 1. In militas sanciee Scripturee libros postillee valde utiles ; 2. In quatuor libros sententiarum commentarii ; 3. Sermones de tempore ; 4. Sermones de sanctis. J. H. Sbaralea, Supplementum ad scriptores trium ordinum S. Francisci, t. ii, p. 371-372 lui attribue : 1. Tractatus de indulgentiis ; 2. Régula tertii ordinis S. Francisci ;

3. Statula pro retinendo disciplinée regularis rigore ;

4. Statutum de divisione jructuum, reddituum et proventuum Ecclesiec inter papam et cardinales ; 5. Constitutiones quædam ; G. Bulla de censibus Ecclesiec roman : c ; 7. Epistolee duee de captione Accon ; 8. Bullarum et epistolarum volumina tria.

Tandis qu’il s’épuisait en efforts pour recouvrer ce qui était perdu de la Terre sainte, Nicolas IV mourut le 4 avril 1292, au palais qu’il avait fait bâtir près de Sainte-Marie-Majeure, et fut enterré dans cette basilique. Le cardinal Félix Perettus de l’ordre des Frères mineurs (le futur Sixte V) érigea, plus tard sur sa tombe, qu’on venait de retrouver, en restaurant le chœur, un superbe mausolée avec l’inscription : Nicolao I V Asculano Piceno Pont. Max. cum in neglecto diu sepulcro fere laluisset, F. Félix