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NICOLAÏ (JEAN’492

membre de la commission des huit docteurs en 1649. Saint-Amour, Journal, p. 68. A l’automne de 1655, Nicolaï fut de la commission des six docteurs chargés d’enquêter sur la distinction d’Arnauld entre le droit et le fait. Il avait hésité à rester simple adversaire libre. Il n’hésita pas à adresser à la reine Anne d’Autriche des requêtes imprimées sur feuilles volantes, pour permettre à un nombre illimité de religieux antijansénistes de prendre part aux votes de Sorbonne, et il eut gain de cause. Jourdain, Histoire de l’université de Paris au XVIIe et au XVIIIe siècle, p. 195 ; Echard. Du suffrage de Nicolaï contre lui, Arnauld jugeait que c’était le seul qui prit soin de chercher des motifs sérieux, encore qu’il ne présentât que des calomnies. Œuvres, t. xx, p. 133-134. Jean Bourgeois combattit ce suffrage de Nicolaï dans l’assemblée du 20 décembre, ibid., p. 428-429, tandis que Nicole préparait une Défense… de M. Arnauld, ouvrage qui fut long à imprimer, mais dont un résumé parut le 23 janvier 1656 : c’est la première provinciale de Pascal. Pascal de la Collection des grands écrivains, t. iv, 1914, p. 112. Il y était question de l’école « qu’on appelle nouveaux thomistes, car ils sont tous comme le Père Nicolaï », et l’auteur attribuait, gratuitement, à Nicolaï une théorie de la grâce suffisante, pouvoir prochain qui n’était ni pouvoir ni prochain, théorie aussi insuffisante que celle du demi-moliniste Le Moine. Ibid., p. 138, 142. Le 29 janvier, la deuxième provinciale raillait le jacobin de n’avoir que des demi-heures pour parler en Sorbonne contre Arnauld.

Le surlendemain, 31 janvier, jour de la clôture des assemblées, Nicolaï, qui ne pouvait plus parler, faisait distribuer des exemplaires de son avis imprimé : Judicium seu censorium sufjragium de propositione Antonii Arnaldl Sorbonici doctoris et socii, ad quæstionem juris pertinenli (nimirum defuisse gratiam Petro sine qua nihil possumus quando Christum negavit) pronunciatum in comitiis theologiciv facultatis, ex parte tantum ac decursim propter temporis brevitatem, et hic série pleniori cum prætermissis appendicibus propter subjunctas causas evulgatum, Paris, in-4°, 49 p. Arnauld fut condamné. Ainsi que Launoi, exclu comme lui de la Sorbonne, il devenait ennemi irréconciable de Nicolaï. En attendant de publier en avril Y Avis délibéralif…, traduction française de son judicium…, Nicolaï publiait une plaquette de 8 pages, in-4° : Thèses thomisticse orthodoxie de gratin divina veritatis jansenianis erroribus ac dogmatibus oppositse. lllusirissimo domino Seguier regio cancetlario nuncupatæ, Paris, Lecointe. Aperietur disceptalio ipso festivo die S. Thomæ post meridiem, ac duobus diebus immédiate successivis antemeridiano simul ac pomeridiano tempore concludetur 7, 8 et 9 hujus martii mensis anno Domini 1636. Ces thèses et le Judicium… montraient à Arnauld que la doctrine thomiste de Nicolaï n’était pas, en matière de grâce suffisante, le pouvoir prochain mais une grâce actuelle suffisante. Un livre d’Arnauld De gratia suffïcienti et efjïcaci doctrina… qui paraissait le 31 mars et s’efforçait de rejoindre les thomistes qu’Arnauld croyait plus proches de lui, en était inopérant. Arnauld se plaint à des amis romains du faux thomisme de Nicolaï : « Tous les disciples de saint Thomas frémissent d’horreur. » Œuvres, t. i, p. 107-122. La défense d’Arnauld… par Nicole, ancien modèle de la première provinciale et qui paraît aussi sur ces entrefaites, est également inopérante contre Nicolaï qui, dit la préface, « après la publication de son avis et de ses thèses ne peut plus passer que pour un jésuite travesti, et un lâche prévaricateur de la doctrine de son ordre. » Nicole veut faire contre Nicolaï une attaque plus pertinente. Contre ses thèses il écrit les Fratris Joannis Nicolai molinis ticx thèses thomisticis notis expuncla où divers textes des thomistes Lemos et Alvarez sont allégués contre la grâce actuelle suffisante selon Nicolaï (illumination de l’esprit et motion divine intérieure de la volonté préparant le déclenchement de la grâce efficace et sauvegardant tout le jeu du libre arbitre). Nicole ajoute quelques injures ( « il méprise la parole de saint Paul : les maudits ne posséderont pas le royaume des cieux… » dans Œuvres d’Arnauld, t. xx, p. 567-573-577, 587) et un Appendix seu F. Joannis Nicolaï calumniarum spécimen. Nicolaï avait montré que, dans les textes soumis à l’examen de la Sorbonne, Arnauld avait masqué que le reniement de saint Pierre comportât un péché de présomption, un jeu du libre arbitre. Arnauld et Nicole se justifiaient par d’autres écrits d’Arnauld ; justification contestable. Arnauld composa aussi contre Nicolaï. en juin 1656, un livre : Vindiciee sancti Thomas circa gratiam sufficientem adversus P. Joannem Nicolaï. C’est un ouvrage autrement sérieux que celui de Nicole, et où Arnauld et son collaborateur, l’abbé de Lalanne, s’efforcent d’ôter à Nicolaï, son appareil de textes de saint Thomas. L’ouvrage plut d’abord à Rome et sembla marquer un renouveau de faveur pour Arnauld. Mais il était bientôt mis à l’Index et, le 16 octobre, une bulle d’Alexandre VII condamnait à nouveau le jansénisme. Nicole. Essais de morale, t. xiv, p. 55.

En 1658. dans une note de l’édition latine des Provinciales, Nicole disait de Nicolaï : « On dit qu’il remplit les commentaires qu’il fait de la Somme de saint Thomas de ses réponses ou pour mieux dire de ses rêveries. » En 1660, Nicolaï était un des juges qui condamnaient les éditions française et latine des Provinciales à être brûlées par le bourreau. Ibid., p. 95. En 1663, ses commentaires de la Somme paraissaient sous forme d’annotations marginales au texte de saint Thomas, très souvent dirigées contre le molinisme. L’une d’elles, Ia-IIæ, q. ext, a. 3, insistait sur la nécessité d’une prédétermination et d’une prémotion physique suffisantes au principe de la grâce actuelle suffisante, comme d’une prédétermination efficace au principe de la grâce efficace. Les jansénistes répliquèrent que Nicolaï aurait mieux fait de se taire. Nicole, Essais de morale, t. xiv, p. 56. Nicolaï écrivit encore : Apologia naturse et gratis : seu de concordia utriusque, juxta mentem Augustini et Thomæ, Bordeaux, 1665, signalé par Hurter, Nomenclator, 3e édit., t. iv, col. 42.

Mais avant tout cet échange d’écrits polémiques sur la grâce suffisante, dès 1655, Nicolaï avait expliqué complètement sa théorie dans un important ouvrage très répandu et qu’il fallut rééditer en 1670. L’ignorance impardonnable où Arnauld, Nicole et Pascal étaient du contenu de ce travail fondamental, leur a fait successivement accuser tout à fait à tort, Nicolaï d’un demi-molinisme et d’un molinisme complet. Il leur aurait fallu lire les trois in-folio de 840, 870 et 820 pages publiés à Lyon : Raijneri de Pisis ordinis Pnedicatorum Pantheologia sive universa theologia ordine alphabetico per varios titulos distribula, et ex probatis ac præcipuis authoribus olim ab ipso summarie collecta, nunc vero demum ab universis aliarum edilionum corruptelis quas Præ/atio indicabit summo studio emendata restitutis locorum indicibus locupletata ; innumerisque supplemenlis auctior duplo facla per Fr. Joannem Nicolaï doctorem theologorum Parisiensem et in magno conventu parisiensi supradicti ordinis primarium regentem opus non theologicis tantum et concionaloribus (ad quos maxime spécial), sed literatis passim omnibus propter inspersas omnimodas notaliones commodiorc usu propter ejus augmenta in très partes divisum. Nicolaï qui avait