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NICEE (1er CONCILE DE


donc représentés à Nicée, peut-être même ceux qui étaient situés en d’hors des frontières de l’empire romain ; mais les évoques d’Asie Mineure, de Syrie, de Palestine et d’Egypte formaient la grande majorité. Eusèbe rapporte que, parmi les évêques présents à Nicée, les uns étaient célèbres par leur sagesse, les autres par l’austérité de leur vie et leur patience, d’autres par leur modestie. Vita Const., III, ix, p. 81. Eusèbe lui-même, Eustathe d’Antioche, Marcel d’Ancyre, Alexandre d’Alexandrie étaient connus pour leur science théologique ; Léonce de Césarée de Cappadoce, Jacques de Nisibe étaient renommés pour leur sainteté et passaient pour thaumaturges ; Paul de Néocésarée de Syrie, Amphion d’Epiphanie, les Égyptiens Paphnuce et Potamion avaient confessé la foi lors des dernières persécutions. Selon Philostorge, I, 8a, p. 9, parmi les évêques présents à Nicée, 22 étaient partisans d’Arius, tandis qu’Hosius et Alexandre d’Alexandrie étaient bien décidés à enlever la condamnation de l’hérésiarque. Id., 9 a, p. 9. Les débats s’ouvriront pour décider de quel côté pencherait la majorité.

IV. Les débats a Nicée. — Pour les débats du concile de Nicée, nous avons des renseignements émanant de trois témoins oculaires : le récit d’Eusèbe de Césarée, Vita Const., III, x-xii, p. 81-83 ; un fragment d’Eustathe d’Antioche, conservé par Théodore ! , H. E., i, vii, p. 34 ; enfin les indications fournies par Athanasc dans le De dccreiis Nicœnæ synodi et dans YEpislula ad Afros. Socrates, H. E., i, viii, col. 64, et Rufin, H. E., i, ni, col. 469, parlent de discussions préliminaires entre évêques et philosophes ; mais P. Batiffol fait remarquer très justement que « les assemblées d’évêques à pareille date ne délibéraient pas de la sorte ». La paix constanliuieime, Paris, 1914, p. 323. Nous avons déjà fait observer que le dialogue entre le philosophe Phédon et certains évêques, rapporté par Gélase de Cyzique, n’est pas authentique. Est également à rejeter l’historiette narrée par Socrates, fi. E., i, viii, col. 64, Rufin, I, ii, col. 468 et Gélase, H.E., II, v, p. 54, de libelles d’accusation remis à Constantin par des évêques contre certains de leurs collègues, libelles que Constantin aurait fait brûler sans les vouloir lire. Si pareil fait s’était produit, Eusèbe de Césarée n’aurait pas manqué de s’en servir pour glorifier l’empereur.

Au jour fixé pour l’ouverture du concile, le 20 mai 325, d’après Socrates, toc cit.. les évêques se réunirent dans la grande salle du palais impérial de Nicée, où des sièges leur avaient été préparés des deux côtés de la salle. L’empereur fit son entrée en grand costume d’apparat, accompagné non de sa garde, mais seulement de quelques familiers chrétiens. Ayant pris place sur un siège d’or, il fit signe aux évêques de. s’asseoir. L’évêque qui se trouvait à sa droite le complimenta, ensuite l’empereur ouvrit le concile en prononçant en langue latine le discours suivant, qui fut immédiatement traduit en grec. :

O amis, mon vœu suprême était de vous voir assemblés et le voici accompli ; je rends grâce publiquement au Basileus de l’univers, qui, après tous ses autres bienfaits, m’a accordé le bienfait plus grand encore de vous voir, je dis de vous voir assemblés tous dans une pensée commune de concorde. Qu’aucun ennemi malfaisant ne trouble notre présente paix et, puisque par la puissance du Dieu Sauveur les tyrans qui combattaient Dieu ont disparu, qu’aucun Sai’txcov pervers n’expose la loi divine aux blasphèmes. Pour moi, je considère comme redoutable à l’égal d’une guerre, d’une bataille, et plus difficile, toute sédition à l’intérieur de l’Église de Dieu, et j’en ai plus de contrariété que des choses du dehois.

Quand donc, par la suggestion et le concours de Dieu, j’eus remporté la victoire sur les ennemis, je crus qu’il ne me restait qu’à remercier DieiUet à me réjouir de concert

avec ceux qu’il venait par moi de libérer : en apprenant votre dissension, mon espoir fut déçu, mais j’estimai que l’affaire n’était pas à différer, et j’espérai pouvoir y porter remède moi-même : je vous convoquai tous aussitôt. Je me réjouis de contempler votre assemblée : les choses répondront mieux encore à mon attente, quand je vous verrai tous unanimes et accordés dans une commune paix, qu’il est digne que des hommes consacrés à Dieu comme vous prêchent aux autres. Empressez-vous donc, ô amis, ministres de Dieu, bons cultores de celui qui est à nous tous un commun Seigneur et Sauveur ; examinez ici même les causes de votre dissension, déliez tous les nœuds de la controverse selon les lois de la paix. Ainsi vous ferez chose agréable au Dieu de l’univers, et à moi qui suis avec vous cultor de ce Dieu, vous donnerez une extrême satisfaction. Eusèbe, Vita Constantini, III, xii, p. 82-83.

Après sa harangue, l’empereur donna la parole toïç 7tpoéSpoiç TÎjç ouvôSou, c’est-à-dire aux évêques qui étaient les premiers dans l’ordre de la préséance. Eusèbe, Vita Const., III, xiii. « Alors, continue Eusèbe, les uns commencèrent à accuser les autres ; ceux-ci se défendaient et attaquaient de leur côté ; l’empereur écoutait tout avec une grande patience ; il suivait avec attention la discussion des problèmes ; il reprenait les assertions émises en les corrigeant ou en les adoucissant, de manière à empêcher la discussion de dégénérer en disputes ; il témoignait de la bienveillance à tous et il faisait usage de la langue grecque qui ne lui était point étrangère. Son affabilité gagnait les cœurs ; grâce à la force de ses arguments, il portait la conviction dans certains esprits (ouirrcelflcov) ; ceux qu’il ne pouvait convaincie, il les faisait rougir. Quand quelqu’un parlait judicieusement, il lui donnait des éloges. Il prêchait à tous la concorde. Il arriva à ses fins et mit tout le monde d’accord sur le point en litige. » Tillemont rejette ce récit d’Eusèbe, « parce qu’il semblerait qu’il (l’empereur ) eût été le maître du concile et ait violé sa liberté ». Mémoires pour servir à l’Histoire de l’Église, t. vi, p. 652. Batifïol, op. cit., p. 335, fait sienne l’objection de Tillemont, parce que le récit d’Eusèbe serait en contradiction avec le témoignage de Philostorge, I, 9a, p. 9, éd. Bidez, selon lequel Constantin était au milieu des évêques, « attendant ce que l’assemblée déciderait », et aussi avec celui de saint Athanasc, qui affirme qu’aucune contrainte ne fut exercée sur les membres du concile. Epist. ad episc. JEgypli, P. G., t. xxv, col. 568. Il est à remarquer cependant que le récit d’Eusèbe ne parle nullement de contrainte : l’empereur écoute patiemment ; il dirige le débat et l’empêche de dégénérer en disputes. Il agit donc comme les présidents des assemblées délibérantes des temps modernes. Il prêche la concorde, il s’applique à convaincre, mais en union avec d’autres (cufj.7re£6cov). Or, Batiffol reconnaît lui-même, p. 335, que ceux qui refusaient de signer le symbole « durent être l’objet des instances du prince ». Donc, en rigueur de critique historique, il n’y a rien à opposer au revit d’Eusèbe : si Constantin fut le président effectif du concile, il se contenta, à la façon des présidents d’assemblées modernes, de. diriger les débats et d’intervenir pour réaliser l’accord final. Cf. Duchesne, Hist. anc. de l’Église, t. ii, p. 146.

1° La controverse arienne. — Le débat sur la controverse dogmatique s’ouvrit par la lecture d’un exposé de la doctrine arienne dû à la plume d’Eusèbe de Nicomédie. S. Athanase, De dccreiis, P. G., t. xxv, col. 420 ; Eustathe, dans Théodoret, H. E., 1, vii, p. 34. Cette lecture souleva l’indignation du concile et l’exposé d’Eusèbe de Nicomédie fut déchiré. Ensuite, selon Eustathe, « plusieurs membres du concile, après s’être concertes voulaient, sous prétexte de conciliation, imposer le silence à ceux qui étaient habitués à bien parler », ce qui semble indi-