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NES10RIENNE (L'ÉGLISE), UNION A ROME


deux laïcs, Georges et Jean, qui se disaient les envoyés du catholicos, dépouillés en cours de route par des voleurs qui leur avaient pris les lettres destinées au pape. Très bien reçus par Paul V, pour qui ils firent une relation détaillée de l'état des chrétientés nestoriennes, S. Giamil, op. cit., p. 100-108, ils retournèrent en Orient chargés de cadeaux pour le catholicos, et porteurs d’une instruction, qui avait été rédigée par Marcello Vestri et mise en syriaque par un maronite de Rome.

Élie VIII, encouragé par le métropolite de Diarbékir, Élie, qui semble avoir été l’instigateur de l’union, ibid., p. 131, envoya donc son archidiacre, Rabban Adam, qui arriva à Rome au printemps de 1611, apportant huit documents en syriaque et arabe, qui sont conservés aux archives de la S. C. du Saint-Office. Liste et sommaire du contenu de ces documents dans G. Hofmann, II beato Bcllarminoe gli Orientait, dans Orientalia christiana, t. viii, p. 298303. Reconnaissant volontiers l’autorité suprême du souverain pontife dans l'Église entière, Élie et les prélats signataires se déclaraient disposés à lui prêter obéissance ; ils exposaient leur foi relativement à la Trinité et à l’incarnation, expliquant pourquoi ils appelaient Marie Mère du Christ plutôt que Mère de Dieu. Selon Adam, qui avait rédigé un mémoire pour le démontrer, il n’y avait aucune différence entre la foi de sa nation et celle de l'Église romaine. A Jérusalem, Adam avait été reçu à la communion par les franciscains qui, comme le notaient déjà les envoyés de 1606, recevaient régulièrement les Chaldéens à la confession et à la communion (Giamil, op. cit., p. 104) non cependant sans les interroger sur leur foi, comme le dit explicitement le P. Manerba.

A Rome la foi de Maître Adam allait être épluchée de plus près : ses documents furent confiés à l’assesseur du Saint-Office, qui chargea Pietro Strozzi, secrétaire des brefs aux princes de pourvoir à tous les besoins du voyageur, comme il avait fait en 1606 pour les pèlerins mentionnés ci-dessus. Strozzi demeura pendant trois ans le protecteur né d’Adam, et le considéra toujours avec bienveillance, bien qu’il connût par le menu toutes les discussions qui eurent lieu à son sujet. Il a rédigé sous le titre d' Acta legationis Babylonicæ un volumineux rapport sur la mission d’Adam, dont une copie calligraphiée avec luxe et présentée à Paul V est conservée à la bibliothèque Vaticane, ms. Barberini latin 2690. Le séjour prolongé d’Adam à Rome fut troublé par bien des vicissitudes. Des trois Chaldéens qui l’accompagnaient, un laïc et deux moines dont un prêtre, deux se tournèrent contre lui, affirmant qu’il n’avait reçu aucune mission du catholicos et avait fabriqué les lettres présentées par lui à son arrivée. Les dépositions de ces accusateurs se trouvent dans le manuscrit de la bibliothèque Vaticane, Barberini latin 893, fol. 220233, écrit de la main d’un Oriental, probablement un Maronite qui avait fait la traduction des documents syriaques. Cet inconnu fait montre d’une profonde antipathiepour Adam et d’une façon générale pour tous les nestoriens, que les autres chrétiens d’Orient, dit-il, méprisent et traitent à coups de pierre. On n'était pas tendre non plus au Saint-Office, où l’on voulut à un certain moment appliquer à Maître Adam le châtiment des relaps. Barberini latin 2690, fol. 58 v°. Quatre jours seulement avant la signature des lettres qu’Adam devait emporter, le 21 mars 1614, le commissaire du Saint-Office, d’accord avec Bellarmin, relevait dans un exposé du Chaldéen les erreurs suivantes : animas sanctorum anle resurrcctionem non recipi in cœlis nec Deum videre ; /idem et spem manere in bealis ; resurreclionem non esse futuram in vera carne et sanguine, sed in corpore aerco ; liber tatem sanctorum non permansuram post resurrectionem ; angelos sanctos non cognovisse mysterium Trinitatis nisi post incarnalionem Verbi ; mysterium

regni Dci, quod in fide posilum est, esse nobis impressum cum formatione naturæ. G. Hofmann, op. cit., p. 303.

Il serait vain de vouloir excuser Adam de toute tromperie, mais il n’est pas facile de discerner dans son attitude la part du vrai : ce qui se passa lors de son retour en Mésopotamie donne plutôt raison à ses détracteurs. Toujours est-il qu’après deux ans de séjour, qui s'étaient passés en examens théologiques, séances d’instruction, rédactions de mémoires sur des points de foi, Adam ne put partir comme il l’espérait, au passage de l'été 1613 : le déplaisir fut si vif qu’il en tomba malade d’août à octobre, Barberini latin 2690, fol. 41 v°. Puis ce furent des discussions sur l’itinéraire à suivre : les deux jésuites, qui avaient été désignés pour accompagner Adam jusqu’auprès du patriarche, le romain Giovanni Antonio Marietti et le maronite chypriote Pierre Metochita (al. Metoscita), voulaient s’embarquer à Messine, tandis que les Chaldéens préféraient voyager sur des bateaux vénitiens. Les deux compatriotes de Rabban Adam le quittèrent donc, tandis qu’il restait à Rome pour se soumettre aux exercices auxquels l’avait condamne le Suint-Office : Ideo Sanctissimum Dominum Nvstrum et S. Conyregationem decrevisse prœdictum Adam, qui jam mensibus præteritis in S. Ofpcio émiserai pro/essionem fidei, esse instruendum de supradictis arliculis et post instructionem pr&via abjuratione de formait ilerum absolvendum ab excommunicatione et recipiendum in gremio S. Matris Ecclesiæ catholicæ apostolicæ Bomanw cum clausula citra pœnam relapsi. G. Hofmann, loc. cit.,

Paul V, cependant, avait déjà commencé de donner satisfaction aux désirs du catholicos : par bref du 10 juin 1613, légèrement modifié le 15 mars 1614, le custode de Terre sainte avait reçu l’ordre de restituer aux Chaldéens l’autel qu’ils disaient avoir possédé auprès de la chapelle des franciscains, dans la partie nord du SaintSépulcre. B. Katterbacli, Brève Pauli V Chald&is catholicis allare in ecclesia Hierosoli/mitana concedens, dans Archivum franciscanum historicum, t. xix, 1026, p. 118 sq. Le 25 mars 1611, le bref au catholicos dont la minute avait été soumise, dès le 23 mai 1613, aux cardinaux Bellarmin et Francesco Bourbon del Monte, était expédié ainsi que les autres lettres.

Le départ de l’envoyé patriarcal, accompagné des deux missionnaires, eut lieu le 2 juin 1614. Le voyage ne nous est connu que par la relation de ces derniers, en copie dans le manuscrit de la bibliothèque Vaticane, Barberini latin 5157, fol. 127148, publiée d’après l’exemplaire des archives de la Compagnie de Jésus par le R. P. Tournebize, Brèvee compendioso ragguaglio delta missione jaila per ordinc di A. S. papa l-'aolo V…, dans A. Rabbath, Documents inédits pour servir à l’histoire du christianisme en Orient, t. ii, Beyrouth, 1921, p. 421-428. Adam était parti mal disposé envers les deux mentors qui lui avaient été imposés. Sa rancune s’accentua en raison des longueurs du voyage qui s'éternisa : arrêts à Messine, à Malte, à Chypre où l’on n'était arrivé que le 21 janvier 1615. Adam voulut alors partir pour le Liban et Jérusalem, suivant ce qui avait été arrangé avant le départ de Rome, Barberini latin 1690, fol. 101. Les deux jésuites refusèrent de l’accompagner, per certi giwiti impedimenti, de sorte qu’il fit seul le voyage de Jérusalem. Les trois voyageurs s'étant enfin retrouvés en Alep, ils partirent de cette ville le 8 juin liilô. A Diarbékir, les jésuites eurent le déplaisir de ne pas trouver l’archevêque Élie, pour lequel ils