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MURNER

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ouvrage a été publiée, en 1547, à Anvers. On ne sait pourquoi il donna à la troisième édition un nouveau titre qui pouvait induire en erreur sur l’objet du livre. Il est, en effet, intitulé : Der keyserlichen statrechten ein ingang und wares /linéament, Strasbourg, 1521. Ces Statrechte ne sont qu’un remaniement des Insliluten, dont les quatre livres sont divisés en sept parties. Sauf quelques retranchements, quelques additions et quelques changements, le texte est le même. 2° Ouvrages satiriques.

Pendant que Geiler attaque

les vices du haut de la chaire, que Wimpheling les censure dans ses écrits et que Brandt, dans son Narrenschif], ne cherche sous la folie que le péché, Murner poursuit le même but par ses satires. Né railleur, comme il le dit lui-même dans Arma palienlise (Francfort, B. Murner, 1511), ayant observé pendant ses voyages les mille travers de ses contemporains, il les dépeint avec une verve inépuisable. Cependant il ne se contente point de faire rire, mais il a une intention morale et elle éclate parfois avec une énergie voisine de la brutalité.

1. Son premier pamphlet satirique n’a pas pour objet le vice. C’est sa Germania nova, s. d., s. 1., réimprimée avec la Germania de Wimpheling, en 1875, par K. Schmidt, à Genève. Cet écrit constitue un persiflage spirituel du pédantismeet, de l’ignorance, avec lesquels Wimpheling avait soutenu son opinion sur les anciennes limites de la Gaule.

2. Trois des poèmes satiriques allemands de Murner, les premiers en date, furent composés à peu près à la même époque. Ils ne forment pas un ensemble, mais ils se tiennent pourtant en ce sens que, dans deux d’entre eux, l’auteur développe certaines parties de l’autre ; la Narrenbeschivôrung, s. l., s. d., qui traite des folies ou des vices en général, en les énumérant sans ordre ; Der Schelmenzunft, Francfort, 1512, qui s’occupe des vauriens et des fripons ; Die Geuchmat, Bâle, 1519, qui dépeint les hommes efféminés s’adonnant à la volupté. Chacun de ces trois ouvrages a connu plusieurs éditions. Ainsi de la Narrenbeschwôrung, nous connaissons les éditions, Strasbourg, 1512 ; sans lieu, 1512 ; Strasbourg, 1516 et 1518 ; Augsbourg, 1513 et 1514. La dernière édition doit être celle de K. Gœdeke, Thomas Murners Narrenbeschwôrung, Leipzig, 1879. Du Schelmenzunft, nous avons les éditions, Francfort, 1512 ; Strasbourg, s. d. ; Augsbourg, 1513 et 1514 ; Strasbourg, 1516 ; Francfort, 1518 ; réimprimé par von Waldau, Halle, 1788. La Geuchmat a eu les éditions de Bâle, 1519 ; Francfort, 1565 et 1567. Les trois ouvrages ont été réimprimés dans le Klostcr, le premier, dans le t. vi, p. 613 sq. ; le deuxième, dans le t. i, p. 824 sq. ; le troisième, dans le t. viii, p. 895 sq. La Narrenbeschwôrung est une imitation du Narrenschif} de Brant. Dans les deux les péchés sont représentés comme des folies, mais, tandis que Brant embarque ses fous sur un navire qui les conduit à la mort, Murner se propose d’exorciser les siens. L’invention du Schelmenzunft n’est pas non plus murnérienne, elle appartient à Barthélémy Grieb, auteur du discours facétieux intitulé : Monopolium philosophorum vulgo die Schelmenzunla, que Wimpheling avait fait imprimer en 1489. Grieb ne parle que des étudiants qui se livrent à la débauche. Murner prend le mot Schelm dans le sens général de fripon et même de scélérat. Il ne traite plus le péché de folie ; il lui donne les noms de forfait, de turpitude, et il a particulièrement en vue les infamies qui se commettent par la parole. Die Geuclmiat, achevée après les deux œuvres précédentes, marque un progrès sensible dans le développement du talent de Murner. Cet ouvrage ne constitue pas, comme les deux premiers, une succession de morceaux détachés, l’auteur ne disperse plus sa satire sur toutes les

variétés imaginables de la folie, mais il en choisit une qui lui semble être la plus répandue et qu’il poursuit de ses railleries les plus incisives ; c’est celle des hommes efféminés qui deviennent les victimes des femmes, qui se ruinent pour elles et qui leur sacrifient leur liberté.

3. Le même sujet concernant les femmes est traité dans Die Mùlle von Scluvyndelszheim und Grede Miïllerin Jarzeit, Strasbourg, 1515. Ce poème, plus dramatique encore que la Geuchmat et plus spirituel, est l’histoire plaisante d’un meunier qui a des embarras à cause de sa femme, de ses visiteurs et de son âne. Le meunier de Schwindelsheim a une femme, nommée Marguerite. Cette Gred Mûllerin était la personnification de la courtisane. L’âne qui se plaint de la charge qu’il porte, tout en étant bien logé et bien nourri, représente les évêques et les cardinaux qui se lamentent du fardeau de leurs fonctions, mais qui n’en dédaignent pas les bénéfices. Nulle part Murner ne s’est raillé du clergé d’une façon plus mordante que dans cet ouvrage. Ainsi son âne volé, il le rencontre comme chanoine dans le chœur d’une église, comme gardien de franciscains, comme prieur de dominicains, comme docteur dans une université.

4. A côté de ces poèmes violemment satiriques, il reste à mentionner De quatuor heresiarchis ordinis Predicatorum de observantia nuncupalorum, apud Suitenses in civitate Bernensi combustis, et la traduction en rimes allemandes : Von den fier kctzren prediger ordens der observanz zu Bern im Schweitserland verbrant, s. 1., s. d., voir ci-dessus, col. 2557. A côté de sorties violentes contre les dominicains, il y a de grands éloges décernés aux franciscains. Ein andechtig geistliche Badenfahrt, in dem baderdicht, gelehrt und ungelehrlen nutzlich zu bredigen und zu lesen, Strasbourg, 1514, qui constitue une allégorie des plus singulières avec la prétention d’être édifiante. Un jour, Murner, malade, dut prendre les eaux. Pour se distraire, il se met à écrire des vers. Le bain qui doit le guérir lui fournit l’idée d’un bain spirituel à l’usage de ceux qui veulent se préparer à la mort : le bain est la pénitence.

5. L’Ulenspiegel qu’il publia en 1519, à Strasbourg, est moins un ouvrage satirique qu’un recueil de contes facétieux, dont Till Eulenspiegel est le héros. Il fut réédité par Lappenberg, en 1854, à Leipzig.

6. Les écrits satiriques de Murner, antérieurs à 1520, sont remplis de plaintes sur les abus qui se commettaient dans l’Église et sur les vices des prêtres et des moines. Après cette date, il les dirige contre Luther et ses adhérents. Après quelques traités polémiques, il publia son poème du grand fou luthérien : Von dem grossen Lulherischen Narrai wie in doctor Murner beschworen hat, Strasbourg, 1523, réédité par H. Kurz, à Zurich, en 1848, et dans le Kloster, t. x, p. 3 sq. C’est là certes l’œuvre capitale de Thomas Murner. Le grand fou ne représente pas tant Luther que l’esprit réformateur, tel que cet esprit était compris par Luther. L’idée fondamentale du poème est la lutte entre les deux principes, dont les représentants sont le moine de Wittenberg et celui de Strasbourg.

7. Une des satires les plus virulentes et les plus grossières est le calendrier des hérétiques et des voleurs d’églises : Der lulherischen evungelischen Kirchendieb und Ketzer kalender (Lucerne, 1526 et 1527). Cette satire a été réimprimée par von Waldau, à Nuremberg, en 1804 ; dans le Kloster, t. x, p. 201 sq., et par Gôtzinger, Zivei Kalender, vom Jahre 1527, Schafïouse, 1865. Elle constitue une réponse aux nombreux pamphlets dont Murner, lors de son séjour à Lucerne, était l’objet de la part des disciples de Zwingle. Le franciscain y soutient que