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Ml HATORI — MURNER


a nome de’Poveri di essa Ilalia. Celte)>ièce ne vit pas le jour. Benoît XIV ayant, le 14 nov. 1748, imposé silence aux deux partis ; elle n’a été éditée qu’en 1 872 dans Scritli inediti, p. 270- : -s22.

Il faut signaler aussi l’intervention de Mural ori dans une question de discipline pénitentielle qui agita fort le Portugal vers 17-15. Certains confesseurs s’étant permis d’exiger de leurs pénitents la divulgation du nom de leurs complices, le patriarche de Lisbonne et le grand inquisiteur s’étaient vivement opposés à ces pratiques, les déclarant illicites. Le grand inquisiteur était allé plus loin, et avait ordonné aux pénitents objets de ces indiscrétions de dénoncer les confesseurs coupables. Mais l’ensemble de l’épiscopat portugais s’alarma de cette sévérité jugée excessive. La chose fut àprement discutée. Sollicité de donner son avis, Muratori s’expliqua dans l’opuscule Lusitanæ Ecelesiæ religio in administrando pœnilentiæ sacramento, Modène, 1747 ; il y rejetait l’idée des interrogations indiscrètes, mais sans vouloir pousser la sévérité contre les confesseurs jusqu’au point où était allé le grand inquisiteur. Il défendait en définitive la prescription que venait de donner le pape Benoît XIV dans la bulle Ubi primum du 2 juin 1746, et qui n’imposait pas aux pénitents, objets des sollicitations indiscrètes des confesseurs, le devoir de dénoncer les coupables.

Mentionnons encore à cette place, faute d’une meilleure, YApologia Epistolæ a SS. D. N. Benedicto XIV ad episcopum Auguslanum scripta, sive de nœi’is in religionem incurrentibus, in-8°, Lucques, 1749. C’est une réponse aux attaques qu’un jeune théologien protestant, Christian Ernest de Wïndheim, avait publiées contre l’ouvrage classique de Benoît XIV, De canonizatione sanctorum, à propos d’une lettre de ce pape adressée à l’évêque d’Augsbourg relativement à un procès de canonisation. Muratori y défend l’attitude de l’Église catholique dans la question du culte des saints, et montre que certains abus populaires qui peuvent s’y rencontrer ne sont pas le fait de l’Église.

On voit par tous les titres que nous avons énumérés si Muratori a pris une large part aux questions agitées de son temps. Il va sans dire que l’attitude de juste milieu qu’il s’efforça toujours de garder ne fut pas du goût de tout le monde. A plusieurs reprises il eut vent que des dénonciations avaient été adressées à Borne contre lui. En septembre 1748, il lui revint que, dans une lettre à l’Inquisiteur général d’Espagne, Benoît XIV avait déclaré que, n’eût été la considération due à son ?ge et à ses travaux, plusieurs de ses ouvrages auraient mérité la censure. Vivement alarmé, le vieillard adres : a au pape, qui l’avait toujours honoré de son amitié, une lettre pleine de filiale déférence, où il demandait qu’on voulût bien lui indiquer les choses dignes de censure (en ses ouvrages) afin qu’il pût les retirer et obtenir son pardon par son obéissance et son humiliation. Lettre du 17 septembre 1748, Episiolario, n. 5612, t. xi, p. 5204. Dès le 25 septembre, Benoît XIV répondait à son vieil ami, . « ’efforçant de calmer ses alarmes, et ramenant l’incident à ses justes limites. D’abord la kl Ire à l’Inquisiteur aurait dû rester secrète ; de plus, elle n’avait pas la portée que lui attribuaient les méchantes langues. Voulant donner à l’Inquisiteur d’Espagne des règles de prudence dans la censure des ouvrages, le pape lui avail fait remarquer qu’il convenait de faire montre à l’égard des bons serviteur de l’Église de quelque longanimité. Dans l’œuvre considérable de tel grand savant, d’un Muratori, d’un Noris, par exemple, il pouvait se trouver quelque détail (prou désirerait plus exact. Était-ce une raison de censurer pour cela des

hommes à qui la religion était grandement redevable ?

Et, continuait Benoît XIV, dans sa réponse au vieux savant, ce qui, dans son œuvre, avait pu déplaire, , c’étaient quelques affirmations sur la juridiction temporelle du pape dans ses États ; dans les écrits d’un autre, il aurait pu les faire censurer ; mais il était persuadé qu’on ne devait point chagriner un homme de sa valeur.< parce que l’on différait avec lui de sentiment en matière qui n’étaient ni de dogme, ni de discipline ». Lettre citée dans VArchivio Muratoriano, . p. 147.

Iln’était pas inutile de rapporter un peu longuement

cet incident ; cette lettre de Benoît XIV est la plus

I belle justification qui ait été écrite de cet admirable

érudit. Oui, vraiment, il en est peu qui aient aussi bien

mérité de l’Église et de la religion.

Tout l’essentiel sur la vie et l’œuvre de Muratori se trouve dans la Vita del proposlo Lodouico Antonio Muratori, par son neveu Jean-François Soli-Muratori, in-4°, Venise, 1756 ; déjà utilisée parle Moréri, édit. de 1759, t. vii, p. 864 sq., et les autres répertoires et histoires du xviir et du xixe siècle. Un catalogue critique et analytique de ses œuvres se trouve à la suite d’une édition latine d’une lettre de Muratori. par P. Obladen, L. A. Muralorii epistola panvnetica ad superiores religiosorum… pro emendatione sludiorum monasticorum, Augsbourg, 1765.

Le deuxième centenaire de sa naissance en 1872 a valu plusieurs publications importantes. D’abord un Arehiniu Muratoriano (différent du recueil mentionné col. 2549), . publié par Pierre Muratori, Modène, 1872, description analytique et raisonnée de l’énorme masse de papiers laissée par le grand érudit et conservée dans sa famille. L’auteur de ce catalogue étudie systématiquement dans une série de dissertations les divers aspects de l’œuvre du grand savant. Parurent aussi à Bologne la même année : Scritti inediti di L. A. Muratori, en tête desquels se trouve reproduit VArchivio susmentionné. Tout ceci a préparé l’édition de nombreuses pièces de la correspondance, puis de la correspondance complète : Epistolario de L. A. Muratori editoe eurato de Mattco Campori, 12 vol., in-4°, Modène, 1901-191 1 ; on trouvera en tête de chaque volume une Cronobiogru/ia Muratoriana relevant, pour chacune des périodes recouvertes par le volume, tous les incidents de [quelque signification. Signalons encore du même M. Campori, la Corrcspondenza Ira L. A. Muratorie G. G. Leibniz, Modène, 1892.

É. Amann.

MU RIMER Thomas, frère mineur conventuel (1476-1537). — I. Biographie. II. Œuvres (col. 2559). III. Attitude vis-à-vis du protestantisme (col. 2565).

I. Biographik.

Né très probablement, le 24 décembre 1476, à Obernai, près de Strasbourg, Thomas Murner eut une vie très mouvementée et très agitée. De très bonne heure il vint habiter Strasbourg avec ses parents, qui s’y fixèrent, en 1481. Souffrant d’une paralysie douloureuse, que l’on attribuait aux maléfices d’une sorcière, Thomas fut destiné, dès son jeune âge, à l’état ecclésiastique. Guéri de cette pénible maladie, il entra, en 1490, à peine âgé de 15 ans, dans l’ordre des frères mineurs conventuels, au couvent de Strasbourg et, à 19 ans, il était déjà prêtre. Dès cette’époque commence pour ce jeune religieux une véritable vie de nomade. Entre 1495-1500, il parcourut la France, l’Allemagne et la Pologne, et étudia successivement à Fribourg, où il s’adonna aux études de droit, à Paris, où il devint maître es arts et s’adonna de préférence à la théologie, et à Cracovie, où il étudia la philosophie, la philologie et les mathématiques. Dans cette dernière université, il obtint le grade de bachelier en théologie et s’attacha très étroitement, pendant l’hiver 1499-1500, au philosophe ci mathématicien célèbre, Jean de Glogau. Il séjourna, en 1500-1501, à Soleure en Suisse, où il prit connaissance des diverses maisons de conventuels, établis dans ce pays.

En 15(12, on le retrouve à Strasbourg, où il fut bientôt aux prises avec Jacques Wiiuphcling. Ce dernier, voulant ériger dans la capitale de l’Alsace, un