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MORT — MORT (PEINE DE)

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de vie partielle observés. Toutefois, on ne saurait se montrer aussi catégorique. Peut-être, en effet, n’est-il pas imprudent d’affirmer que l’âme, principe vital de l’organisme complet, est encore, par sa présence latente, du moins pendant une courte durée immédiatement consécutive au dernier soupir, le principe premier des manifestations de vie inférieure et^partielle qu’on peut encore observer en^certains tissus ou organes. En tout cas, cette explication est plausible en soi : elle est possible, elle est peut-être probable.

3. Quant aux cas où une reviviscence soit temporaire, soit surtout définitive pourrait se produire à l’aide de massages du cœur ou d’injections intracardiaques d’adrénaline, la théologie catholique doit reconnaître qu’on ne saurait les expliquer, sinon par la persistance de l’âme spirituelle dans le corps soumis à une mort simplement relative. Or, ces reviviscences semblent toujours possibles après une mort subite ou accidentelle. Il s’agit ici, rappelons-le, non de reviviscences tardives, qui se traduisent par de simples mouvements automatiques, cf. Roure, Études, l’y novembre 1904, p. 589, mais de reviviscences précoces où la véritable vie humaine se manifeste. D’Halluin, Le problème de la mort, p. 67.

4. En conséquence, il paraît raisonnable de tirer cette conclusion : si, dans les cas de mort causée par une maladie, il y a, pendant une durée à la vérité fort restreinte, une probabilité extrêmement réduite, mais enfin, une probabilité quand même, de mort relative, dans le cas de mort subite et accidentelle, la mort relative et progressive existe presque à coup sûr.

Aussi les théologiens récents ont-ils formulé, relativement à l’administration des sacrements en cas de mort apparente ou relative, des règles prudentes’qu’il n’est pas permis de négliger. Dans son livre : La mort réelle et la mort apparente et leurs rapports avec l’administration des sacrements, trad. de J.-B. Geniesse, Paris, 1906, le P. Ferreres, S. J., a proposé la règle pratique suivante : « Le prêtre pourra toujours ou presque toujours et même devra administrer les sacrements à celui qui ne les a pas reçus, bien qu’il le trouve mort en apparence, pourvu qu’il ne soit pas entré dans la période de putréfaction. En effet, s’il s’agit de mort subite, tous conviennent aujourd’hui que la’période de la vie latente peut~durer des heures et même des jours entiers ; s’il s’agit de longue maladie, étant donné qu’elle laisse du temps et que l’on voit arriver de loin la mort, le malade ordinairement aura déjà reçu les sacrements, quand il était certainem’iit vivant ; et, si dans quelque cas cela n’a pas eu lieu, le prêtre, arrivé peu de minutes après que le moribond aura rendu le dernier soupir, pourra en conséquence lui conférer les sacrements… Quand même le prêtre arriverait une ou deux heures après, il pourrait aussi, généralement parlant, les’conférer. » Op. cit., n. 138, 139.

Genicot-Salsmans accorde une demi-heure après le dernier soupir, en cas de mort de maladie, plus longtemps, en cas de mort subite ou accidentelle. Institutiones theologiæ moralis, Bruxelles, 1922, t. ii, n. 422. Bucceroni arrive aux mêmes conclusions. Institutiones theologiæ moralis, part. II, vol. iii, n. 754 ter ; 6° éd. Rome, 1915. Vermecrsch opine dans le même sens que Ferreres, Theologia moralis, Paris-Bruges-Rome, 1923, t. iii, n. 661.

Tous ces auteurs recommandent de n’administrer sous conditions les sacrements à ceux qui peut-être ne sont morts qu’en apparence, qu’à la condition expresse d’instruire les fidèles et de leur exposer combien leur conduite serait blâmable s’ils attendaient, après le dernier soupir de leurs mourants pour appeler le prêtre. Cf. Fcrrcres-Geniesse, p. 139, 446.

A titre d’indication, signalons que le rituel de

Cambrai, approuvé par la S. C. des Rites, ajoute au texte du rituel romain, titre v, c. i, n. 21, cette recommandation : Hic animaduertere oporlet mortem veram cum specie mortis non necessario congruere, ac proinde extremam unctionem quibusdam esse minislrundam qui spiritum jam emisisse videntur. Cf. Ami du clergé, 28 février 1927.

A..Michel.

2. MORT (PEINE DE). — Après un rapide aperçu historique du débat, qu’a soulevé la peine de mort, nous montrerons la légitimité de son application (col. 2502), et nous examinerons brièvement les principales objections émises contre elle (col. 2506).

I. Historique. —

1°_Il n’y a guère de législation, qui n’ait admis la peine de mort. La Bible nous la montre en usage_au temps des patriarches. Elle nous rapporte de même les décrets de Moïse au sujet de son application. A travers ses récits nous la voyons en vigueur chez les peuples asiatiques aussi bien que chez les Égyptiens. Les lois de Dracon sont restées célèbres chez les Grecs, et tout le monde connaît les sévérités de la législation romaine.

Sans doute l’énormité de la peine capitale attire les réflexions de certains Pères de l’Église, tels que saint Augustin, et leur fait invoquer le recours à l’autorité divine, qui seule peut en légitimer le principe. Cependant nul d’entre eux ne conteste que ce droit n’ait été concédé en certains cas, soit par une loi générale soit par un ordre particulier, à l’autorité sociale, dont le pouvoir vient de Dieu.

Au xii 8 siècle les Vaudois attaquent ce droit. Ils enseignent que la puissance séculière commet un péché grave en prononçant une condamnation à mort. Innocent III leur répond et réprouve leur doctrine en leur faisant signer, en 1208, une formule d’abjuration et de profession de foi, où il est dit entre autres, « nous affirmons, touchant la puissance séculière, qu’elle "peut sans péché mortel exercer le jugement du sang, pourvu qu’elle procède, en portant la sentence, non par haine mais par jugement, non sans précaution mais avec sagesse. » (Denz.-Bannw., n. 425.)

Sur ces réserves, par crainte sans doute de voir maints seigneurs s’arroger des droits Jabusifs, insistent les théologiens du Moyen Age. « Seul a le pouvoir de vie et de mort celui qui a la charge de la communauté », dit saintjThomas, Sum. theol., II a -II®, q.Lxiv, a. 3. Mais il n’y a pas homicide, et par conséquent il n’y a pas de faute contre le commandement, /livin Non occides, lorsque la justice humaine prononce suivant les formes’une peine capitale. « En ce cas l’autorité humaine, dans les choses qui sont soumises à sa juridiction, est le vicaire de Dieu. » Ibid., ia-II 08, q. c, a. 8, ad 3um.

2° Il faut attendre le xvin » siècle pour voir naître ce qu’on appellera plus tard la campagne abolitionniste contre la peine de mort.

Elle fut ouverte par un jurisconsulte italien César Beccaria (1738-1791). Séduit par le philosophisme français, il entreprit d’en appliquer les idées à la législation dans son Traité des délits et des peines publié en italien (1763-1761). Il veut qu’on restreigne l’application de la peine de mort au crime de sédition, ou encore aux cas où la mort du coupable est le seul moyen d’éviter d’autres crimes. C’est qu’il entend réduire le droit de punir à {’utilité générale et conclut que, d’ordinaire, la peine de mort est inutile à la société comme à l’individu. Nous exposerons plusieurs de ses arguments dans la série des objections. Nous les retrouvons’d’aillcurs dans les Œuvres de Jérémie Bentham (1718-1832), le célèbre jurisconsulte et économiste anglais, qui donna l’arithmétique des plaisirs. Ne voyant lui aussi comme fin de toute morale que l’utlllté’alnsl que l’amélioration du bien-être des indi