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MORALE, HISTOIRE SOMMAIRE, 1 1 1© PÉRIODE


doit se proposer dans son travail, Antonin dit que cette fin doit être de pouvoir par là se gouverner soimême et gouverner les autres, et pourvoir, selon sou état, à lui-même et aux siens, part. III, tit. viii, c. i, p. 1, t. iii, col. 293. Voir aussi col. 308.

c Le principe réprouvant l’usure est nettement formulé en ce sens que l’on ne peut, en vertu même du contrat de prêt, et en dehors de toute autre stipulation, comme le contrat de société ou l’achat de rente, ou en dehors de tout titre extrinsèque, exiger aucun intérêt ou aucun avantage matériel, bien que l’on puisse accepter ce qui, en retour, est donné bénévolement. Voir S. Thomas, Sam. theol., II a -II ! E, q. i. xxyiii, a. 1 sq. ; et S. Antonin, Sum. theol., part. II, tit. i, c. vi sq. ; lit. ii, p. 7-1 sq.

On connaît h s heureux effets sociaux de cette doctrine, ainsi que ceux de la législation de L’Église à cette époque ; et on sait aussi que l’activité commerciale, telle qu’elle s’exerçait à cette époque, n’était point empêchée, ni par cette doctrine ni par cette législation, voir A. Vermeersch, S. J., Quwstiones de justifia, 2e édit. Bruges, 1904, p. 496 sq.

d. On peut enfin ajouter que, particulièrement pendant cette période, l’action constante de l’Église faisant le plus souvent servir ses richesses et sa puissance au bien même matériel des sociétés de cette époque, et entourant de sa protection les corporations d’artisans, contenait implicitement un enseignement social d’une très haute efficacité. Comme preuve de cette action bienfaisante de l’Église, nous rappellerons cette parole de Léon XIII dans l’encyclique Rerum novarum, § Nec tamen putandum, parole particulièrement vraie de l’époque dont nous parlons, que l’Eglise a toujours excellé dans les bienfaits qu’elle a rendus à la société, tellement que ses ennemis eux-mêmes font en cela son éloge. Quant à la protection que L’Église donnait alors aux corporations d’artisans, elle est un fait historique bien connu.

III’PÉRIODE, DEPUIS LE COM MENCEM EST DU XVIe SIÈCLE JUSQU’A LA SECONDE MOITIÉ DU XVII’SIÈCLE,

caractérisée en théologie morale comme en dogmatique, par une rénovation très marquée de la théologie scolastique, au moins dans plusieurs pays de l’Europe, et par un développement considérable de la théologie positive. Voir Dogmatique, t. iv, col. 1561 sq.

En théologie morale, comme en dogmatique, col. 1562, cette rénovation scolastique est marquée par l’abandon à peu près complet du commentaire des Sentences, et par l’étude directe de la Somme théologique de saint Thomas dont la synthèse, la méthode et la doctrine sont, au moins en grande partie, adoptées par beaucoup de théologiens.

1° La synthèse de saint Thomas en théologie morale est substantiellement admise par tous les théologiens qui commentent la Somme, soit qu’ils suivent, article par article, l’enseignement de saint Thomas, comme le font Cajétan et BancL, soit qu’ils groupent cet enseignement dans des traités distincts avec d’amples dissertations, comme l’ont fait Grégoire de Valencia, Vasquez et Suarez.

A côté de ces commentateurs de saint Thomas conservant au moins substantiellement sa synthèse, il y a, suri oui dans la première moitié du XVHe siècle, in assez, grand nombre de théologiens qui traitent à pari toutes les matières morales, en se plaçant principalement au point de vue pratique. Chez ces auteurs, la synthèse de saint Thomas es1 abandonnée et remplacée par des traités moins bien coordonnés. Les questions et applications Casuistiques V abondent, mais beaucoup de questions spéculatives, même

Importantes au point de vue doctrinal, sont presque entièrement omises.

Nous citerons principalement : Laymann (+ ii ;  : t. r >).

Tlicologia moralis, Paris, 1630 ; Filliucci (| 1622), De christianis offlciis et casibus conscientiæ, Lyon, 1622 ; Comitolus († 1626), Responsa moralia, Lyon, 1609 ; Castropalao († 1633), De virtutibus et vitiis contrariis, Lyon, 1631 ; Bonacina (+ 1631), Opéra omnia, Venise, 1716.

L’exemple donné par ces théologiens lut suivi par beaucoup d’autres, tellement qu’à la fin de cette période la théologie morale fut habituellement traitée a part comme une partie distincte de la théologie.

2° Méthode. - - Chez les commentateurs de saint Thomas, comme chez saint Thomas lui-même, c’est encore la méthode scolastique qui prédomine et que l’on applique avec toute l’ampleur nécessaire, selon l’importance des questions. En même temps, du moins chez beaucoup de commentateurs, les preuves positives empruntées à l’enseignement patristique ou à l’enseignement théologique, et dirigées surtout con-I le les erreurs protestantes, occupent, pour les questions qui en sont susceptibles, une place considérable, comme chez Grégoire de Valencia, Vasquez et Suarez. Habituellement aussi les applications casuistiques ne sont pas négligées. Chez beaucoup d’auteurs elles ont un développement assez considérable, quoique toujours secondaire.

Chez les théologiens qui, comme Bellarmin dans ses Controverses, s’occupent surtout de la réfutation des erreurs protestantes et qui traitent également de ce qui concerne les questions morales, la méthode positive est principalement employée, avec des preuves solides tirées de l’Écriture, de la tradition ou de l’autorité des conciles, et accompagnées de la réponse aux principales objections ou arguties des protestants. C’est ce que Bellarmin fait particulièrement pour plusieurs questions sur le péché ou le libre arbitre, sur les clercs, les moines et les laïques.

Les théologiens qui traitent à part la théologie morale, en dehors de la synthèse de saint Thomas, négligent habituellement la méthode scolastique et s’adonnent, en très grande partie, à la méthode casuistique. En cela ils ne diffèrent guère des nombreux auteurs qui, à cette époque, écrivent des ouvrages de casuistique, voir t. ii, col. 1872 sq.

3° Les controverses de théologie morale, à peu près inexistantes entre théologiens catholiques, sont habituellement dirigées contre les erreurs protestantes. Elles portent principalement sur la liberté de l’homme, les préceptes de la loi chrétienne, les conseils évangéliques, les vœux, la doctrine relative aux sacrements. Bien que les controverses proprement dites soient, à cette époque, à peu près inexistantes entre théologiens catholiques, il y a cependant, sur plusieurs points, de la part de quelques groupes de commentateurs de saint Thomas, abandon plus ou moins complet de sa doctrine ; abandon provenant principalement d’un éclectisme philosophique trop conciliant à l’égard des doctrines d’Occam.

4° L’enseigne ment social, tel qu’il est habituellement donné pendant cette période par les théologiens moralistes, reste substantiellement ce qu’il était à l’époque précédente, sauf quelques précisions, explications ou applications nouvelles.

1. Relativement à l’origine et à la nature du pouvo’r civil et à sa subordination à l’autorité de l’Eglise

dans la mesure requise, les théologiens qui commentent la Somme théologique de saint Thomas suivent habituellement sa doctrine, sauf sur quelques points, assez secondaires, comme le mode de transmission du pouvoir suprême dans la société civile, avec certaines

explications qu’ils y rattachent.

La doctrine de saint Thomas est particulièrement

soutenue par les théologiens catholiques à (’encontre

des erreurs protestantes assujétissant toutes les ma-